"C'est compliqué de trouver du monde" : les restaurateurs et hôteliers inquiets pour l'arrière-saison

Dans l'hôtellerie et la restauration, les prix flambent et les difficultés de recrutement se font ressentir. Malgré une saison touristique favorable, les saisonniers ont manqué. Et depuis la rentrée, la situation ne semble pas s'arranger.

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"Pensez à laisser un pourboire à nos équipes ! Ils ne sont pas payés chers". Ce message, publiquement affiché dans les rues d'une commune française fait réagir. Tout comme celui-ci : "Fermeture aujourd'hui par manque de personnel. Vive la France !".

Sur les réseaux sociaux, ces notes de restaurateurs photographiées par les passants se multiplient, notamment dans les groupes Facebook. On s'y retrouve entre employés pour parler des conditions de travail difficiles, des remarques désobligeantes de son supérieur ou encore de harcèlement. Une façon de dédramatiser certaines situations.

Pour autant, côté employeurs, les difficultés sont aussi notables. Pénurie de personnel, de certaines matières premières, envolée des coûts énergétiques et des transports de marchandises… La liste est longue. Logiquement, la région Centre-Val de Loire n'échappe pas à la règle. D'autant plus dans les commerces dits de proximité.

Une offre non pourvue, à 39 heures par semaine, sans service du soir

Rendez-vous à Nibelle, au cœur de la forêt d'Orléans. Mathilde Leroy et Florent Charpentier ont repris le Relais Saint-Sauveur en janvier 2020. Soit deux mois avant la fermeture générale des restaurants en France, pour cause de Covid-19. "On n'a pas pu du tout se retourner sur les stocks et les réservations. C'était brutal", commence Mathilde Leroy. À 20 heures, ce fameux 14 mars, ils apprenaient que leur établissement devait baisser le rideau à minuit.

Aujourd'hui, le couple attend un heureux événement. Mathilde entame son 7e mois de grossesse. Depuis début août, une affiche est placardée devant le restaurant, fréquenté en semaine (par des ouvriers) autant que le week-end. L'annonce est sérieuse et pourrait en faire rêver plus d'un : 39 heures hebdomadaires, du lundi au dimanche, avec une coupure le mercredi. Les horaires ? De 9 heures à 15 h 30, sans service du soir, donc. Le salaire équivaut à celui de Mathilde Leroy, soit une variation entre 1 400 € et 1 500 € nets par mois.

L'objectif était de recruter une personne au 1er octobre pour une formation de 25 jours. Au total, seulement 6 candidatures ont été reçues au 22 rue Saint-Sauveur. Sérieuses ? "Je pense que c'est sérieux mais ils ne pourraient pas me remplacer. J'ai peur qu'au bout de 2 jours, la personne se décourage. Il faut être partout en même temps, avoir les yeux partout, il faut aller vite…", reconnaît Mathilde Leroy. Alors, en attendant de trouver la perle rare, même au dernier moment, le couple patiente.

Ce qu'on veut aujourd'hui, c'est travailler de chez soi en touchant 4 000 balles

Un restaurateur du Loiret souhaitant rester anonyme

Un peu plus loin, à Pithiviers, un couple de restaurateurs connaît bien la chanson également. Comme beaucoup d'autres, la crise sanitaire du Covid-19 avait poussé Élodie et Sébastien Nanor à puiser l'énergie et à faire preuve d'imagination pour se maintenir à flot. Aujourd'hui, ils ont trouvé leur rythme de croisière. L'ancien établissement Côte et Port, devenu Le Manoa, s'adapte, en permanence.

"On recherche des extras, surtout pour les événements extérieurs, comme les mariages et les festivals", débute Élodie Nanor, aux fourneaux. Avec son mari Sébastien, en salle, ils imaginent bien pourquoi ils peinent à recruter, l'été comme depuis le début de l'arrière-saison.

"C'est compliqué de trouver du monde. Cela ne les intéresse pas de travailler ponctuellement, c'est instable, avec des horaires pénibles, ils sont debout durant des heures. Dans la restauration, on sait à quelle heure on commence, mais pas à quelle heure on finit", résume-t-elle.

À l'approche des fêtes, des denrées plus que rares

Concernant les matières premières, les prix explosent aussi. Élodie Nanor en trouve l'explication dans les différentes crises, notamment agricoles. Résultat : "Tu perds plus de temps à chercher des produits de même qualité, tout en visant une marge correcte". Et, dans la perspective des repas de fin d'année, certaines denrées rares risquent de l'être encore plus.

Du simple au double, pour le foie gras, par exemple, dès maintenant. Ceci dit, difficile de faire l'impasse sur ce produit phare au moment des fêtes. Élodie Nanor en servira à ses clients, bien sûr, mais n'accumulera pas les stocks. Reste tout de même une question en suspens : "Est-ce que les clients seront prêts à mettre le prix ?"

Côté blanchisserie, dans les hôtels, les tarifs augmentent

Lorraine Grosmangin, présidente déléguée à la Fédération internationale des Logis du Loiret

Côté hôtellerie, direction L'Écu de France, dans la commune du Malesherbois. Lorraine Grosmangin dirige cet établissement. Il s'agit d'une institution familiale créée en 1938 par ses arrière-grands-parents. Actuellement, cet hôtel-restaurant profite d'une clientèle à la fois loirétaine et parisienne. Et semble tirer son épingle du jeu.

Du point de vue du recrutement, en tout cas. "On est une dizaine, en tout", dénombre-t-elle. Les collaborateurs s'en vont, puis reviennent. "Je fais du social en permanence avec mes équipes. Il faut que quelqu'un qui travaille à la plonge se sente aussi utile qu'un patron", assume celle qui est aussi la présidente déléguée à la Fédération internationale des Logis dans le Loiret.

Miser sur les conditions de travail n'est plus une option

Les heures supplémentaires, l'ambiance de travail, tout cela semble tenir une place essentielle dans la tête des postulants. Lorraine Grosmangin l'a bien compris. "Je recrute mais je ne passe pas d'annonce", reconnaît-elle.

Côté restaurant, les matières premières répondent toujours à l'appel, relativement bien finalement. La raison ? Les facilités liées au réseau des Logis Hôtels & Restaurants. De fait, la situation est légèrement plus simple. "L'avantage qu'on a grâce à Logis, c'est qu'on dispose de fournisseurs référencés. Un produit ne va pas augmenter du jour au lendemain", explique-t-elle.

Les choses se compliquent avec la partie hôtellerie. Surtout côté blanchisseurs. Toujours la faute à la hausse des coûts de l'énergie et du transport. "On a même du mal à être livrés", précise Lorraine Grosmangin. Pour pallier ces problématiques, une seule option : l'anticipation des commandes. "On fait jouer le réseau Logis de France mais c'est le même problème, ils n'ont pas de stock", conclue-t-elle.

Des envolées de chiffres d'affaires par rapport à 2019

Cette fédération nationale des Logis Hôtels & Restaurants communique sans problème les chiffres de l'été. La saison estivale est positive : "Non seulement les clients n'ont pas renoncé à leur budget vacances, mais ils se projettent déjà sur les prochaines, avec une arrière-saison très demandée."

On le comprend, après deux ans de restrictions liées à la crise sanitaire, les touristes n'ont pas lésiné sur le budget : en région Centre-Val de Loire, le chiffre d'affaires du groupe Logis Hôtels a bondi de 35 % par rapport à 2021 (29 % sur tout le territoire) et de 75 % par rapport à 2019 (78 % en France). Concrètement, depuis la mi-août, les réservations décollent  : +79 % sur l'arrière-saison par rapport à 2021. 

L'inquiétude demeure

Pour terminer, nous avons contacté l'Union des métiers et des industries de l'Hôtellerie, autrement appelée UMIH. "On est très inquiets. Les masses salariales explosent, les matières premières flambent, les énergies gaz et électricité, aussi. Les remboursements de PGE (prêt garanti par l'État, NdlR) sont également complexes. On risque une casse et la multiplication de cas des nombreuses affaires déjà en difficulté", déplore Thierry Deraime, président de l'UMIH du Loiret.

Pour lui, il reste encore une lumière au fond du tunnel : "Des plans d'aide sont peut-être en train de se mettre en place pour les énergies… Pour les grosses entreprises." 

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