Le Loiret teste une solution pour des routes durables face à la sécheresse, une expérimentation inédite en France

Depuis 2018, le département du Loiret collabore avec un centre d'études, au sein de l’Observatoire des routes sinistrées par la sécheresse (ORSS), afin de développer de nouvelles solutions durables et écologiques pour remédier aux dégâts causés sur les chaussées. Une expérimentation est en cours.

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C’est un phénomène qui prend de l’ampleur, notamment sur les sols argileux. En pompant l’eau contenue dans ces derniers, la sécheresse provoque des déformations importantes des routes, les rendant plus dangereuses pour la circulation, notamment des deux-roues, et occasionnant des coûts de travaux de réparation des voiries de plus en plus importants.

En collaboration avec le Cerema (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement), le département du Loiret va donc expérimenter une technique, pour permettre l’amélioration des sols en stabilisant la fraction argileuse, afin de la rendre moins sensible au phénomène de sécheresse.

La RD 921 sert de cobaye

C’est une portion de la RD 921, dont la circulation a été déviée, qui va servir de cobaye. Jusqu’au 18 août, l’entreprise Keller France réalisera des travaux d’injection d’une solution constituée d’eau, de potasse et de lignine (un composant du bois) à l’aide d’une foreuse dotée d’un dispositif spécialement conçu pour cette opération.

"C’est une première en France ! C'est vraiment un produit très innovant. C’est à la base une entreprise américaine qui l’a inventé, il consiste en injections, on fait des petits trous dans les accotements, nous précise Sandrine Eugène, directrice des routes du département. L’idée, c’est que ce liquide va bloquer l’eau dans les accotements. Du coup cela va éviter que, sous la chaussée, on ait des phénomènes extrêmes de dilation ou rétractation de l’argile."

"Des vérifications sanitaires et environnementales ont été effectuées sur la solution injectée par des laboratoires spécialisés, comme l’exigeait le marché public lancé. La batterie de tests a démontré l’innocuité du produit sur la faune terrestre et aquatique", assure-t-elle.

Un enjeu économique certain

L’enjeu est important dans le Loiret, mais plus généralement en région Centre-Val de Loire, c’est pourquoi les six départements ont été choisis pour expérimenter des solutions différentes. Au terme du projet, le choix sera fait et l’exemple du Centre-Val de Loire servira aux autres régions touchées par le problème.

Dans le Loiret par exemple, qui gère 3 613 km de routes, un à deux tiers des chaussées sont concernées par ces phénomènes. Et les répercussions économiques ne sont pas anecdotiques.

"C’est un budget important pour nous le phénomène de sécheresse. En termes de fonctionnement, quand on peut faire de petites réparations, on y consacre 2 à 3 millions d'euros par an. Quand les chaussées sont très abîmées, on part sur des budgets d’investissement assez conséquents. Notre budget pour la reprise des chaussées, en dehors des opérations neuves du type giratoires ou investissements spécifiques, se situe entre 15 et 20 millions d'euros par an", détaille la directrice des routes.

Au total on est sur plus de 20 millions €. Tout n’est pas lié à l’argile, bien entendu, mais il y a une forte proportion.

Sandrine Eugène, directrice des routes du Loiret

Une sécurisation renforcée pour les usagers

La sécurité des usagers est aussi une préoccupation des décideurs locaux. La rétractation des chaussées provoque de grandes fissures longitudinales sur les bas-côtés, parfois planes, parfois décalées de plusieurs centimètres, à l’emplacement des roues droites des conducteurs, ce qui représente un véritable danger.

"Il y a un enjeu très fort des départements d’avoir en amont une solution, et c’est le cas de cette expérimentation. On va neutraliser la cause et éviter que le phénomène se produise pour ne pas avoir ces fractures dans la chaussée", analyse Sandrine Eugène.

Suivre et évaluer l’apport de cette solution

Le suivi et l’interprétation des résultats seront assurés par le Cerema durant au moins trois périodes de sécheresse, et ce jusqu’en 2024 dans le cadre de l’Observatoire des routes sinistrés par la sécheresse. Pour recueillir les données, deux capteurs spécialisés sont mis en place, pour un suivi en continu et à distance.

Toutes ces données collectées vont permettre d’apprécier la qualité et la fiabilité de la solution. Si elle s’avère utile, elle sera utilisée au moment de refaire une route, afin que celle-ci ne subisse plus par la suite les conséquences de mouvements argileux. C’est donc une action préventive, qui devrait éviter au département de faire des travaux assez lourds.

Pour l’entreprise qui commercialise le produit, c’est aussi une grande première. Jusqu’à présent, les essais ont eu lieu en laboratoire. Cette expérimentation grandeur nature devrait lui permettre d’évaluer le coût de la mise sur marché de son produit.

Depuis le 2 août et jusqu’à la fin des travaux, une déviation a été mise en place entre Courcy-aux-Loges et Sully-la-Chapelle, visible dans le tweet ci-dessus. Pendant la durée des travaux, la chaussée sera reprise à cet endroit.

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