Orléans : lecture de contes pour enfants sur Facebook par les libraires de Chantelivre

A défaut de pouvoir ouvrir les portes de leur établissement, des libraires d’Orléans se relaient pour proposer chaque jour, sur Facebook, une histoire contée à destination des enfants. Un moyen pour elles de divertir les petits et de créer du lien en cette période de confinement.
 

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C’est un petit moment de bonheur quotidien qui excède rarement cinq minutes. Il est offert gracieusement par deux Orléanaises, libraires de leur état, confinées mais passionnées par leur métier.

Depuis le 20 mars dernier, elles mettent en ligne, chaque jour, une vidéo « maison » dans laquelle elles lisent une histoire pour les enfants. Des récits parfois drôles, émouvants, instructifs ou même décalés.
 

 

"Qu’est-ce qu’on va leur faire faire ?"

L’idée a germé très vite après l’annonce de la fermeture des commerces non-essentiels, le 14 mars, par Édouard Philippe. Pour l’équipe de la librairie Chantelivre se profile alors une période de chômage partiel.

« Ce soir-là, quand je suis rentrée chez moi, j’étais un peu sonnée », explique Marlène Brocail, la responsable.

Deux jours plus tôt, le président Emmanuel Macron avait annoncé la fermeture des écoles. « On avait eu beaucoup de monde à la librairie le vendredi et le samedi. Et les gens n’arrêtaient pas de nous dire : mais qu’est-ce qu’on va faire faire à nos mômes ! », poursuit Marlène. « On organise beaucoup d’animations et celle appelée l’Heure du Conte est très courue. Avec tous les titres jeunesse que l’on a (20 000 références environ NDLR), on pouvait se lancer ».

 

Deux libraires, deux façons de conter

Confinées chez elles, Marlène Brocail et Julie Morel s’emploient à tour de rôle à conter des histoires au travers de vidéos mises en ligne sur la page Facebook de la Librairie Chantelivre. Et leur style est diamétralement opposé.

Voix douce, calme et claire, Marlène s’attèle régulièrement aux histoires longues. Julie, spécialisée en littérature jeunesse, parle fort, pointe l’humeur et donne le ton lors de récits plus courts.

Et pour le choix des histoires, elles ne se sont même pas concertées. Juste avant l’entrée en vigueur du confinement, chacune de leur côté, elles sont allées une dernière fois à la librairie faire leur sélection.


Histoire surprise

D’ailleurs, la mise en ligne des vidéos est le moment où Marlène découvre les histoires de Julie et inversement. « Julie fabrique plusieurs vidéos l’une après l’autre et me les envoie. Elle profite de la sieste de son fils pour les enregistrer », explique Marlène. « Moi, je les fais au jour le jour ».
Et pour les afficionados, chaque après-midi, l’histoire lue est une totale surprise car pas question pour les libraires d’annoncer le titre en avance.

Si on se penche sur l’historique des vidéos de ces deux dernières semaines, on trouve plusieurs livres de la collection l’École des Loisirs, des histoires divinement illustrées et des récits extrêmement variés et souvent drôles.
« On n’avait pas envie de grosses nouveautés ni de classiques que tout le monde connaîtrait déjà », analyse Marlène.

Techniques « un peu roots »

Côté fabrication, il a fallu improviser. Et là encore, à chacune sa technique. Pour Julie, c’est appareil photo sur pied et lecture de côté. Pour Marlène, smartphone à la main et cadrage zénithal (depuis le dessus NDLR).
« C’est vrai que c’est un peu roots. Je fais ça en tailleur sur le tapis de ma fille. Car après plusieurs essais, j’ai remarqué que la terrasse était trop bruyante et mon salon trop lumineux. Et puis je parle à voix basse pour éviter que le chat ou mes enfants ne débarquent dans le champ au beau milieu d’un enregistrement », sourit Marlène :
 

Au début, je refaisais la vidéo plein de fois. Maintenant, c’est one shot ! La seule contrainte, c’est le format du livre. Il faut qu’il rentre dans le téléphone et ça, ça en élimine pas mal.

 
Quand Marlène Brocail s'installe pour enregistrer ses lectures du jour ©Marlène Brocail

 

Parenthèse pour tous

Au début de l’aventure, Marlène et Julie avaient imaginé hiérarchiser, organiser les vidéos par tranche d’âge. Et puis chemin faisant, elles y ont renoncé.

« Mettre un âge pour une histoire, c’est très subjectif. A la librairie, on a beaucoup d’adultes qui achètent des albums jeunesse. Et si on l’avait fait, on aurait surement loupé des gens. Ils seraient passés à côté d’histoires qui auraient pu leur plaire. Là, on joue la surprise ».
Et de prendre Emile est invisible de Vincent Cuvellier et Ronan Badel (éditions Gallimard Jeunesse) pour exemple : « C’est un livre plein d’humour et de doubles sens. L’histoire fonctionne aussi bien pour un petit de 3 ans qu’un jeune de 11 ans.

Un bouquin, ça se partage, quel que soit notre âge ».

 

Guest-stars du dimanche

Pour l’heure, le duo de libraires/conteuses tient bien le rythme d’une vidéo par jour. Seule entorse à la règle, le dimanche. Mais là aussi, Marlène et Julie ont eu une chouette idée. Elles diffusent un poème, lu par un enfant.

C’est Mona, la fille de Marlène qui a montré la voie en premier avec un texte issu du Livre des beautés minuscules de Carl Norac. Thaïs, lui a emboîté le pas le dimanche suivant avec un poème de Paul Verlaine. « C’est une maman qui m’a envoyé la vidéo spontanément », raconte Marlène.  
 

 

Garder le lien

Car depuis qu’elles se sont lancées, Marlène et Julie reçoivent beaucoup de messages. De bibliothécaires, de clients fidèles, d’inconnus qui approuvent la démarche et se délectent quotidiennement de leurs lectures. « On a plein de gens qui nous disent que c’est super. Et je sais grâce à notre page Facebook que nos vidéos ont même été vues aux États-Unis » ! se réjouit Marlène.

« On garde le lien avec nos clients et leurs enfants, on en crée avec d’autres et on leur dit surtout qu’on est là avec eux, pour les soutenir ».

 

Démarche désintéressée

La librairie Chantelivre d’Orléans, comme tous les commerces non-essentiels, est fermée jusqu’à nouvel ordre. Et en raison du confinement, aucune activité n’y est possible, aucune commande, aucune livraison. « J’ai reçu des messages de personnes me reprochant de ne pas pouvoir leur fournir de livres. Pour nous, c’est un sacré truc d’avoir dû fermer la boutique. Avec nos histoires, on ne voulait pas non plus donner envie aux gens d’aller acheter leurs livres sur Amazon », explique Marlène.
 

Sous les vidéos, beaucoup de commentaires évoquent l’envie d’acheter les livres lues par les deux libraires. « On n’a pas vraiment le choix pour le moment. Notre démarche n’est pas du tout commerciale aujourd’hui. Mais plus tard, j’espère que les gens se souviendront de nous quand les commerces rouvriront ».


 
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