Les personnels soignants sont une nouvelle fois dans la rue pour dénoncer la situation catastrophique de l'hôpital public. En Centre-Val de Loire, plus grand désert médical de France, la situation est particulièrement dégradée. Entre manque cruel de personnel et faible reconnaissance de leurs professions, les soignants témoignent de leur quotidien pour demander plus de moyens.
Devant le parvis de l'hôpital d'Orléans, une cinquantaine de personnes sont réunies derrière des banderoles aux slogans chocs. "Personnels maltraités = patients en danger", ou encore "Ma santé n'est pas une marchandise". Les soignants du CHR et des établissements de santé de la région manifestent ce mardi 7 juin à l'appel de la mobilisation nationale.
Le message est clair et affiché en gras sur la tonnelle : "Non aux fermetures de lits, de services, d'hôpitaux de proximité". Ici, aides-soignants, infirmières et sympathisants de la cause s'indignent contre l'état des services de santé en France. "Le personnel soignant craque", alertent les manifestants.
"On va droit à la catastrophe"
Le manque de personnel est l'inquiétude qui revient dans toutes les bouches. "S'ils n'arrivent pas à recruter ni à garder ceux qui sont encore là, on va droit à la catastrophe", prévient Adrien, aide-soignant en USLD (Unité de soins longue durée) au Bois-Fleury. Celui qui travaille avec les personnes âgées déplore ce que sous-effectif implique : "Le soir ça va être supprimer le goûter, on va finir par faire une toilette partielle, ne pas lever les résidents. Nous n'avons pas le temps pour faire plus."
A l'hôpital public, on avertit sur les difficultés de recrutement depuis des mois. Le 28 mars, la quasi-totalité du personnel paramédical des urgences du CHRO étaient en arrêt de travail pour "souffrance au travail". Une semaine plus tard, les médecins du service rentrent dans une grève, qui dure encore aujourd'hui, en soutien à leurs collègues.
"On se retrouve avec des patients qui stagnent aux urgences parce qu'il n'y a pas de lits en hospitalisation pour eux, explique Julie, 43 ans, aide-soignante aux urgences à Orléans. Parfois il n'y a même pas assez de brancards, on doit les mettre sur des sièges." Pour elle, les soignants deviennent même parfois "maltraitants" car ils ne peuvent plus accueillir correctement.
Si les relations avec la direction sont tendues depuis un moment, Julie estime que sur ce coup la solution passera par des mesures nationales. Pour cette première mobilisation du nouveau quinquennat, les revendications elle souhaite une revalorisation salariale, une reconnaissance de leur métier et surtout des campagnes de recrutement massifs.
L'ARS Centre Val de Loire a proposé une prime pour les jeunes soignants sortis d'école, mais cette différenciation entre collègues ne passe pas. "Attirer les jeunes diplômés est très bien, mais il ne faut pas oublier ceux qui sont déjà là, rapporte Julie. Si on perd nos anciennes qui ont de l’expérience, on va perdre en qualité de soins et d’apprentissage pour nos jeunes collègues qui sortent d’école."
Aujourd'hui un binôme aide-soignante-infirmière doit s'occuper de 25 patients. Cela nous met en danger nous et nos patients
Si la formation d'infirmière est parmi les plus attractives sur Parcoursup, les abandons sont en cours de formation ou en début de carrière sont légion. Sarah, 25 ans, travaille depuis tout juste 4 ans aux urgences du CHRO. "Aujourd'hui un binôme aide-soignante-infirmière doit s'occuper de 25 patients. Cela nous met en danger nous et nos patients." La jeune infirmière pense déjà à une reconversion. "Le soir, on rentre chez soi en pleurs en se disant qu'on n'a pas fait du bon boulot, et en se demandant quel pourrait être notre avenir plutôt que d'être infirmière."