Mobilités : pourra-t-on vraiment se passer de la voiture en 2040 même en ruralité ? Le Loiret dévoile son plan

Le Département du Loiret organisait ce mardi 28 novembre ses assises de la mobilité, histoire d'inventer les intermodalités de transports de demain. Avec un défi si grand que nombreux ont décidé de ne pas s'en occuper : les alternatives à la voiture à la campagne.

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"Pour arriver à nos objectifs de décarbonation, il faut une réduction très importante de l'usage de la voiture. Et je pense que c'est impossible." Ou comment ouvrir une série de rencontres sur la réinvention des mobilités avec un manque d'optimisme certain.

Cette double phrase a été lancée par Yves Crozet, économiste spécialisé dans les transports, lors des assises départementales de la mobilité, organisées ce mardi 28 novembre au palais des congrès de CO'Met à Orléans. Au programme : des tables rondes d'experts, d'élus, de représentants d'associations d'usagers, réunis par le conseil départemental du Loiret pour "discuter, échanger sur les pratiques, sur ce qu'on peut voir ailleurs, imaginer la mobilité durable dans le département", comme l'explique son président Marc Gaudet (UDI).

La toute-puissante route

Dans le public, entre 250 et 300 personnes, venus d'horizons différents... élus, chefs d'entreprise, citoyens et usagers en tous genres, le Département ayant lancé une invitation à tous les habitants du Loiret. "Tout le monde n'est pas venu en tram", ironise un homme dans le public.

Car le sujet du jour est bien la décarbonation des transports, sujet hautement sensible dans un département où 78% des déplacements domicile-travail se font en voiture, selon l'INSEE. Et, à en croire Yves Crozet, "la route va rester dominante" dans les prochaines années. Pas un souhait de sa part, mais un constat, ou du moins une hypothèse.

"En campagne, on sait que la voiture est indispensable", confie Marc Gaudet à France 3. Et pas seulement pour les personnes à mobilité réduite ou les personnes âgées. Indispensable en 2023, ça semble être le cas, mais dans 15 ans ?

Changement de modèle

Pour Sylvie Landriève, il faut expérimenter, et changer de paradigme. Présidente du Forum Vies Mobiles, un think tank créé par la SNCF, elle partage le constat actuel de la mobilité d'Yves Crozet, mais n'en a "pas la même lecture" :

S'il y a des voitures partout, c'est qu'on a une politique continue depuis des décennies en faveur de la voiture. C'est en train de changer, ça peut continuer à changer. Les politiques publiques, ça marche.

Sylvie Landriève, Forum Vies Mobiles

Elle estime que, jusqu'à maintenant, les politiques de décarbonation se sont "attachées à améliorer le système, avec des voitures électriques par exemple", ou en promouvant le covoiturage. "Bien sûr que c'est mieux d'être deux ou trois par voiture, mais on en parle parce que ça permet de ne pas faire l'essentiel, qui est de passer à un autre système."

Où va l'espace public ?

L'autre système, c'est une France où la voiture n'occupe plus la place prépondérante qu'elle occupe aujourd'hui. En ville, ça fonctionne déjà dans de nombreux endroits "parce que la politique a réorganisé l'espace pour le vélo, le tram, le piéton, en laissant le reste à la voiture", analyse Yves Crozet. Reste que, à Paris par exemple, plus de la moitié de l'espace public est encore réservée à la voiture.

Mais les mobilités décarbonées n'ont plus l'intention d'être l'apanage des métropoles. "Les RER métropolitains, c'est bien mais la somme des métropoles, c'est 30% de la population. Et les autres ?", s'interroge Sylvie Landriève.

Romain Roy, vice-président de la métropole d'Orléans chargé des transports, souhaite "prolonger les lignes de tram vers les extérieurs de la métropole". Première étape. Charles-Éric Lemaignen, adjoint au maire d'Orléans, voit "un potentiel énorme" de transports collectifs "dans le périurbain". Deuxième étape, on s'éloigne de plus en plus de la ville centre. Reste le rural. "C'est très peu dense, on ne va pas mettre des transports massifiés", assure l'élu.

Socialiser la route

Alors, comment faire pour décarboner la campagne, pour laisser la voiture au garage, voire à ne même pas avoir de voiture du tout quand on habite dans un petit village ? Le Forum Vies Mobiles a théorisé un système de "sociabilisation" de la route, qui permettrait "de desservir 68 millions d'habitants pour 100 milliards d'euros, environ un milliard par département", assure Sylvie Landriève.

La directrice du think tank observe que la France dispose d'un "réseau routier extraordinairement dense", dont une partie pourrait être "socialiser, en dédier une partie au transport collectif intermodal qui dessert la quasi-totalité de la population". Et, ça tombe bien, les Départements ont la charge de la majorité du réseau routier français. "J'ai du mal à comprendre comment ça pourrait marcher dans mon village rue", lance quelqu'un dans le public. Assurant de pas "vouloir [se] défiler", Sylvie Landriève bote tout de même en touche, et assure que des chiffrages plus précis sont en court par un cabinet spécialisé.

Ce dernier a pris une dizaine de départements français comme cas d'étude, et devrait proposer d'ici quelques mois des itinéraires routiers à complètement requalifier vers de la mobilité douce ou collective. Et le Loiret fait partie des territoires étudiés. Marc Gaudet promet de regarder les résultats, même si "ce que propose Sylvie Landriève est une révolution". Promesse aussi d'"expérimenter là où ce sera possible, et utile, pousser la porte en quelque sorte", soutient-il.

Un plan à 7 millions d'euros par an pendant 15 ans

Cela suffira-t-il à ranger les voitures du Loiret, et à sortir les vélos et les tickets de bus ? Romain Roy, chargé des transports à la métropole d'Orléans, se dit "optimiste" : "Dire qu'il y aura autant de voitures en 2040, c'est pas responsable, il faut savoir se remettre en question. Je pense qu'il y aura une baisse de 20 à 30%, à condition qu'on mette en place les conditions favorables pour qu'il y ait cette baisse."

En attendant d'y voir plus clair, le Département a présenté son schéma des mobilités, axé "mobilité durable", pour 2040. Avec, notamment, des créations de lignes de covoiturage entre Orléans et les principales villes du département (Pithiviers et Malesherbes, Montargis, et Gien), de grandes véloroutes entre ces mêmes villes, des pistes cyclables diverses, et le projet phare du plan : les points nœuds multimodaux.

Soit des zones qui, selon leur importance, proposeront du transport collectif, des aires de covoiturage, des abris sécurisés pour les vélos, des bornes de recharge de véhicules électriques, et autres services dédiés à la mobilité. De quoi, dans l'idée, proposer des offres de transport à moins de 10 km de 98% des Loirétains. Le Département chiffre son plan à 7 millions d'euros par an pendant 15 ans.

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