Depuis une quinzaine de jours, les températures flirtent avec les records. Les derniers relevés du mercredi 27 février indiquent ainsi 19°C, 21°C voire 24°C. Si les bourgeons s'ouvrent, ce temps printanier génère aussi des conséquences imprévues voire inquiétantes.
Les jours se succèdent et se ressemblent, avec une douceur exceptionnelle en région Centre Val de Loire. Mercredi 27 février dans l'après-midi, les températures relevées sont de 19,3°C à Chartres, 20,3°C à Châteaudun, 20,7°C à Blois, 21,3°C à Tours, 23°C à Romorantin.
Dans une interview pour La Nouvelle République, Didier Labat, prévisionniste Météo France à Bourges, affirme que "seul février 1899 a été plus doux que février 2019".
Cette douceur se faisait ressentir dès mi-février. Dans le Loiret, entre le 14 et le 18 février dernier, la moyenne était de 15,8°C. Il faut remonter à 1961 pour avoir des températures équivalentes fin février dans le département.
Mais comme on le voit sur cette carte animée de Météo France, ces masses d'air chaudes ne concernent pas toute l'Europe.
Si ce temps printanier avant l'heure fait le bonheur des habitants du Centre qui profitent du soleil en terrasse, il engendre une série de cinq conséquences qui ne sont pas les bienvenues.Alors que des conditions très douces et majoritairement sèches prédomineront sur l'Europe de l'Ouest, au contraire, une offensive hivernale froide et neigeuse affectera l'est et le sud-est du continent. ? https://t.co/jWuMxTCJtg pic.twitter.com/0r62c4kY0w
— Météo-France (@meteofrance) 22 février 2019
1. Alerte aux particules fines
Première répercussion de cette douceur : la pollution aux particules fines. La situation n'est pas aussi critique qu'en région parisienne ou à Lille, où la circulation des véhicules les plus polluants a par exemple été interdite.
Mais dans le Loiret a été détectée une concentration importante des particules fines, supérieures à 50 microgrammes/m3 par jour, le vendredi 22 février. Face à cette mauvaise qualité de l'air visible, une alerte aux particules en suspension dans le Loiret a été lancée par Lig'Air, l'association de surveillance de la qualité de l'air en région Centre-Val de Loire, comme on peut le voir en rouge sur la carte ci-dessous.
Une autre zone, qui s'étend de l'Eure-et-Loir au Loiret et visible en orange, connaissait une concentration de particules supérieures à 40 microgrammes/m3 par jour.
La qualité de l'air en région Centre-Val de Loire est évaluée quotidiennement par les 26 stations de mesure situées en milieu rural et urbain, comme sur la vidéo ci-dessous place Gambetta à Orléans.
De par sa proximité avec Paris, la région Centre-Val de Loire est souvent traversée par les nuages de particules qui viennent de la capitale.
Pour rappel, les conséquences de la pollution aux particules fines peuvent être extrêmement lourdes : maladies respiratoires, cardio-vasculaires et même des cancers.
Selon Santé Publique France, les polluants atmosphériques causent chaque année 48.000 morts prématurées.
2. Les agriculteurs craignent un retour du froid
A Saint-Martin-d'Auxigny, bassin de l'arboriculture dans le Cher, ces températures élevées entraînent un réveil précoce de la nature. Pascal Clavier, arboriculteur dans ce secteur, explique que "les bourgeons gonflent, il y a du mouvement. D'habitude c'est le calme plat".
"On a des petites fleurs qui poussent au pied des arbres". Bref, la faune et la flore sortent "de leur mode d'hibernation et rentrent en phase active", résume-t-il.
Les exploitants agricoles s'adapteront si la douceur persiste. La difficulté apparaîtra dans le cas où les masses d'air froid reviennent. "Une fois que la nature se lance, elle est alors sensible aux gelées", avec un risque de perte des récoltes."On craint le retour de bâton"
Il est cependant impossible de pronostiquer la météo des jours et semaines à venir : douceur croissante ? Pluie ? Rafraîchissement des températures ?
Dans les vergers autour de Saint-Martin-d'Auxigny visibles sur la vue à 360° ci-dessous, on s'active ces jours-ci. Le bourgeonnement des pommiers "peut poser des problèmes d'organisation", souffle Pascal Clavier. Les ouvriers agricoles ont en effet peu de temps pour effectuer la taille de février avant l'arrivée des fleurs qui sortent habituellement en mars/avril. Il faut concentrer sur une semaine le travail qui s'étale normalement sur un mois.
3. Un retour des oiseaux migrateurs
Qui dit réveil de la nature dit aussi retour des oiseaux migrateurs. Mercredi 27 février, l'association Météo Centre a publié sur Twitter des photos montrant des grues cendrées dans le Loir et Cher.Quelques jours plutôt, l'association publiait une vidéo montrant d'importantes vagues de ces oiseaux migrateurs qui survolaient le département de l'Indre, près de Châteauroux.[Photos] Magnifiques photos de #gruescendrées prises ce mercredi matin, près de Couddes (#LoiretCher), par Garrabey Arnaud pour Météo Centre. #migration #migrationdoiseaux pic.twitter.com/q6C417aPsP
— Asso Météo Centre (@AssoMeteoCentre) 27 février 2019
Les grues cendrées migrent sur environ 2.500 km de distance, pour passer l'hiver en Afrique du Nord ou en Europe méridionale, avant de remonter avec le retour des beaux jours. Elles sont reconnaissables par leur vol migratoire en forme de Y ou V.[Migration des grues cendrées] Importantes vagues de #migration de #gruescendrées ce 20 février 2019 sur nos régions centrales, comme ici dans l'#Indre, près de #Châteauroux. Vidéo : @FloC36 / Association Météo Centre. pic.twitter.com/tfvk4e9jOK
— Asso Météo Centre (@AssoMeteoCentre) 20 février 2019
4. Un pic de pollens et un risque d'allergies printanières
L'ensoleillement et la douceur des températures font grimper le risque d'allergies d'après le bulletin du vendredi 22 février du Réseau national de surveillance aérobiologique (RNSA).Selon Samuel Monnier, ingénieur en aérobiologie au sein du RNSA dans une interview pour franceinfo, les conditions météorologiques sont "très favorables à la pollinisation des arbres".
L'absence de pluies d'une part, et la succession d'un temps frais en janvier et chaud en février d'autre part, augmentent le risque de pollinisation.
Si le sud de la France est principalement concerné, on voit grâce à la carte de vigilance du RNSA publiée mercredi 27 février sur Twitter, que des départements autour de Paris dont l'Eure-et-Loir sont eux aussi touchés.
Les 20 % de Francais qui sont allergiques aux pollens risquent de payer cher ces températures au-dessus des moyennes de saison.Carte de vigilance des pollens mise a jour sur https://t.co/CQmiv9zKtT
— Réseau National de Surveillance Aérobiologique (@rnsa_pollen) 27 février 2019
Attention à la pollution atmosphérique dans les villes qui aggrave les symptômes d'allergies aux pollens en fragilisant les voies respiratoires!#allergies #pollens pic.twitter.com/Yy0qCjcvmp
5. Un patrimoine en danger ?
Face à cet ensoleillement et ces températures exceptionnellement douces, les personnes dont les maisons sont fissurées par les canicules précédentes observent avec attention leurs habitations.Ainsi Solange Dumay, référente en Eure-et-Loir de l’association Les Oubliés de la canicule, a regardé l’état des fissures qui parcourent sa maison, et constate qu'"elles sont restées rétractées". Cependant, elle craint que le printemps et donc l’été n’arrive plus tôt.
Les fissures se créent lors de périodes de chaleur intense, notamment lorsque les maisons sont érigées sur des sols argilo-calcaires asséchés. Or, les réserves des nappes phréatiques n'ont pas été reconstituées durant cet hiver.On risque de voir les fissures apparaître plus tôt, en mai/juin, au lieu de juillet/août.
Les taux d'humidité des sols sont donc relativement faibles, comme le montre la carte des ressources en eaux souterraines de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement en Centre-Val de Loire.
Attention à l'arrivée des pluies ! Les prévisions météorologiques annoncent l'arrivée de perturbations dans les prochains jours. Les habitants de Touraine auront en tout cas su profiter de ce soleil pour publier des photos de leur région sur Instagram, des images aux airs de Toscane.