À l’occasion du centenaire de la fin de la Première Guerre mondiale, un groupe de Corses de l’association « Aiò Zitelli » effectue un pèlerinage sur les lieux de mémoire de la Grande Guerre. Troisième et dernier épisode : la côte du poivre, dans la région de Verdun.
Ce jour-là, le petit groupe de Corses de l’association « Aiò Zitelli » se rend sur la côte du poivre, dans la région de Verdun. Les combats y ont fait 300 000 morts entre février et décembre 1916. Et parmi eux, beaucoup de Corses.
À Louvemont, village entièrement détruit, l'épopée des soldats du 173e régiment d’infanterie, celui des Corses, est toujours gravé. En libérant le village des Allemands, les militaires insulaires y ont obtenu l'une de leurs quatre citations, la reconnaissance d’un acte exemplaire.
« C’est comme ça qu’on va pouvoir pérenniser cette histoire »
François-Xavier Long est le maire de Louvemont, il a été désigné par le Préfet. Au fil des années, il s'est lié d'amitié avec Jacques Culioli et les autres membres d'Aiò Zitelli. « C’est assez impressionnant parce que chaque fois qu’ils viennent, on a l’impression que c’est la première fois qu’ils arrivent. Pourtant, ils connaissent bien. C’est bien ancré en eux, comme je pense chez tous les Corses. Je crois que c’est comme ça qu’on va pouvoir pérenniser cette histoire, qu’on a tendance à un peu oublier au fur et à mesure », explique François-Xavier Long.
Aujourd'hui encore, la région de Verdun ressemble à un véritable champ de bataille. Parmi les accompagnateurs, se trouve l'archéologue Fréderic Adam. C'est lui qui a notamment identifié André Giansily, le dernier Poilu corse retrouvé il y a trois ans avec 26 autres soldats, tous tués en 1916.
Environ 60 000 corps n’ont jamais été retrouvés et vraisemblablement toujours enterrés sur le champ de bataille de Verdun. Chaque nouvelle identification est un soulagement. « Je fouille régulièrement des tombes de personnes décédées il y a 200 ans, voire 3 000 ans. C’est mon quotidien. Quand je peux travailler sur les soldats de la Grande Guerre, soldats disparus, je peux aller jusqu’à l’identification précise de la personne et tout savoir de sa vie et de leur mort. On passe d’un squelette anonyme à un humain. […] C’est beaucoup plus émouvant », souligne l’archéologue.
« Beaucoup de Sénégalais sont venus ici »
André Giansily a été restitué à sa famille et inhumé en Corse. Son nom repose tout de même sur une croix de la nécropole au pied de l'ossuaire de Douaumont. 16 000 soldats y sont enterrés.
Face à cette imposante et silencieuse nécropole. Le groupe se disperse. Chacun cherche un patronyme familier. « Face à ce cimetière immense, on a tendance à chercher des noms corses », explique un des membres de l’association.
De l'autre côté du cimetière, les tombes musulmanes sont orientées vers la Mecque. Cissé, sénégalais installé en Corse marque le pas devant la tombe d'un des siens. « J’ai voulu venir dans l’idée que je partais en pèlerinage. Beaucoup de Sénégalais qui sont venus ici. Quand Jacques m’a dit qu’il y avait un endroit où les Sénégalais ont été pris au piège, je me suis dit qu’il fallait que j’aille voir où avait commencé la Première Guerre mondiale », livre-t-il.
Les membres d'Aiò Zitelli continueront leur périple de 11 jours en passant par Dieuze, La Chapelotte, et la Somme. Autant de noms ancrés dans la mémoire des Corses. Autant de lieux évoquant la gloire, le sang et la mort.