La défense de Paul Lantieri et de François Rouge a dénoncé jeudi 20 juin un dossier vide de preuves et une manipulation du parquet à l'encontre de leurs clients, au dernier jour du procès de l'affaire du cercle de jeux parisien Concorde à Marseille. Délibéré le 25 septembre.
"Corses + cercle de jeux + milieu de la nuit = voyous"
"Je ne sais pas ce que vous allez faire avec ça", a lancé au tribunal Me Emmanuel Daoud, l'un des avocats de Paul Lantieri, qui s'était présenté au premier jour d'audience le 27 mai après six ans de cavale."S'il n'avait pas été là, ce n'est pas le chapeau qu'il aurait porté, c'est un sombrero", a-t-il ajouté, dénonçant un dossier "où il ne reste rien" après six ans d'instruction et des réquisitions du parquet en retrait par rapport à l'ordonnance de renvoi des juges d'instruction.
Cinq relaxes ont été réclamées parmi les 20 prévenus, le ministère public requérant aussi l'abandon de certains chefs de poursuite, notamment en matière d'extorsion et de blanchiment, réduisant l'essentiel de l'affaire à des infractions à la législation sur les jeux et aux règles fiscales.
Evoquant une absence de preuves quant aux abus de biens sociaux reprochés à Paul Lantieri, Me Daoud a aussi accusé la justice d'avoir fait des raccourcis: "Corses + cercle de jeux + milieu de la nuit = voyous, c'est ça le dossier".
François Rouge; Emmanuel Daoud, avocat de Paul Lantieri
Un réquisitoire qualifié de "polar marseillais"
Le Concorde a peut-être été l'enjeu de rivalités entre clans corses comme le soutient l'accusation, mais l'affirmer ne suffit pas pour condamner, a argué l'avocat, qualifiant le réquisitoire définitif rédigé par le parquet de "polar marseillais qui accumule les poncifs"."Ce devait être le pendant marseillais de l'affaire du Cercle Wagram (instruite à Paris, ndlr), un +classico+ judiciaire peut-être, mais vous n'êtes pas là pour sauver l'honneur de la Jirs" (juridiction interrégionale spécialisée, chargée des affaires de grand banditisme), a lâché l'avocat, qui a plaidé la relaxe en appelant le tribunal à rendre "une décision exemplaire et non pas pour l'exemple".
Avant lui, Me Lionel Moroni, l'avocat du banquier suisse François Rouge, l'associé de Paul Lantieri, s'était appliqué à démonter une par une les accusations formulées contre son client en matière d'association de malfaiteurs, qui "reposent sur du vent": "Pas une écoute où l'on parle d'une infraction, il n'y a rien".
Et de stigmatiser les "tours de magie", "mystifications" et autres "diabolisations" du parquet à l'encontre de François Rouge, honnête homme selon lui qui a perdu 2,7 millions d'euros dans l'affaire, mais aussi "sa banque à Genève et son honneur en Suisse".
Quatre et cinq ans de prison requis
Lundi 17 juin, les deux procureurs, qui se sont relayés pour le ministère public, ont demandé au tribunal de condamner à cinq ans de prison, au maintien en détention et à l'interdiction de gérer pendant cinq ans le principal protagoniste de l'affaire, Paul Lantieri. L'homme d'affaires est poursuivi, notamment, pour abus de confiance et de biens sociaux, association de malfaiteurs, blanchiment en bande organisée.Pour François Rouge, le banquier suisse principal associé de Lantieri, poursuivi pour abus de confiance, association de malfaiteurs, extorsion d'engagement, blanchiment en bande organisée et tenue d'une maison de hasard en bande organisée, il a été requis quatre ans de prison, dont un avec sursis et interdiction de gérer pendant cinq ans. Le banquier a déjà effectué huit mois et demi de prison provisoire.
La présidente de la 6e chambre correctionnelle du TGI de Marseille a mis sa décision en délibéré au 25 septembre à 8h30.