Le tribunal de commerce de Marseille doit se pencher une nouvelle fois mercredi sur le dossier SNCM pour examiner les nouvelles offres de reprise déposées par trois repreneurs potentiels pour la compagnie maritime placée en redressement judiciaire en novembre.
Entre 780 et 900 salariés sur 1500
Le 11 mai, le même tribunal avait donné dix jours aux trois candidats à la reprise -le groupe corse Rocca, l'ex-directeur du port de Marseille Christian Garin et la société Baja Ferries- pour présenter des offres améliorées et avait prolongé la période d'observation de six mois, jusqu'au 28 novembre.Depuis, les trois repreneurs potentiels ont revu leur copie et monté de nouveaux dossiers, déposés dans les temps auprès des administrateurs judiciaires.
"Leur périmètre social est compris entre 780 et 900 salariés", a précisé la SNCM, qui compte aujourd'hui environ 1.500 salariés en contrat à durée indéterminé (CDI).
Les élus du personnel doivent se prononcer mardi sur ces offres de reprise –un avis purement consultatif- sous réserve que les administrateurs judiciaires leur aient d'ici là fait parvenir leurs propres conclusions: ces conditions doivent être remplies pour que le tribunal puissent examiner les offres le lendemain.
Mais depuis le dernier passage de la compagnie devant le tribunal de commerce, certains points en suspens semblent avoir été clarifiés. C'est tout particulièrement le cas des quelque 440 millions d'euros d'aides jugées indûment perçues par les autorités européennes, dont le remboursement demandé par Bruxelles plombait le dossier depuis son origine.
Cette condamnation avait d'ailleurs officiellement poussé les actionnaires, Transdev (66%) et l'Etat (25%), à précipiter le redressement judiciaire pour, selon eux, s'en affranchir, en recréant une société suffisamment différente pour pouvoir parler d'une "discontinuité économique".
C'est désormais acté par les autorités européennes elles-mêmes: "La Commission européenne considère que la discontinuité est aujourd'hui établie et que le repreneur choisi par le tribunal de commerce ne sera pas exposé au remboursement des 440 millions d'aides publiques", a ainsi indiqué le secrétaire d'Etat aux Transports Alain Vidalies devant l'Assemblée nationale mardi.
"DSP transitoire"
Face à l'autre grand point d'interrogation du processus, l'éventuelle transmissibilité de la délégation de service public (DSP) de la desserte entre la Corse et le continent, un schéma semble aussi se dégager. Ce méga-contrat attribué à la SNCM et La Méridionale portait à l'origine sur 570 millions d'euros (57 millions par an de 2014 à 2024), mais le tribunal administratif de Bastia, à la suite d'une plainte d'un concurrent, Corsica Ferries, l'a annulé à compter d'octobre 2016.La DSP, avait prévenu Bruxelles, ne pouvait être transmise à un quelconque repreneur, condition sine qua non à ses yeux de la fameuse discontinuité économique. Pour y remédier, résume la SNCM dans un communiqué, les trois candidats à la reprise "évoquent dans leur +business plan+, de manière directe ou indirecte, une DSP transitoire sous forme de sous-délégation", une formule "évoquée devant les repreneurs" par Bruxelles.
En clair : tenue de reprendre la partie de la DSP incombant à la SNCM après sa "disparition", La Méridionale "sous-déléguerait" au repreneur ces activités, dans l'attente de la négociation d'un nouveau contrat.
Mais dans un courrier adressé aux différentes parties au dossier révélé par Les Echos, le PDG de La Méridionale, filiale du groupe spécialisé dans la logistique du froid Stef, a laissé entendre qu'il voulait participer au choix du repreneur de la SNCM: "son +business model+ et ses conséquences économiques et sociales doivent être réalistes selon notre appréciation", relève Marc Reverchon.
Ces mises en garde ont fait bondir la SNCM : "En indiquant (...) qu'il entendait participer au choix du repreneur de la SNCM et attendre la rentrée de septembre pour se décider, le président de La Méridionale (...) sort de son rôle et fait courir le risque d'un échec du processus".
En réalité, deux des trois candidats à la reprise -Baja Ferries et Christian Garin- évoquent ce schéma dans leur offre. Le groupe Rocca ne l'intègre pas, et Baja Ferries prévoit même un schéma -à 537 CDI seulement- au cas où elle devrait faire sans cette sous-délégation, a-t-on appris de source proche du dossier.