Un pompier de Calvi a été blessé par un homme à qui il portait secours, ce 18 août. Chaque année, les agressions de sapeurs-pompiers dans l'exercice de leur fonction se comptent par milliers. Et si la Corse n'est pas l'endroit le plus « à risque », elle n'est pas épargnée pour autant.
Anthony* en est convaincu : il fait « le plus beau métier du monde ».
Pompier depuis 13 ans, cette fonction est pour lui une vocation. « Depuis tout petit, je savais que c’était ce que je voulais faire. J’ai grandi en rêvant de devenir à mon tour un soldat du feu. Alors forcément, aujourd’hui, je suis super fier. »
Avec plus d’une décennie de service au sein des sapeurs-pompiers de Haute-Corse, il peut citer « à la pelle » des interventions compliquées.
Agression
Et parmi elles, une dont il se souvient « comme si c’était hier ». Une matinée d’août, aux alentours de 4h, son équipe est appelée pour une bagarre qui aurait dégénéré à la sortie d’un bar. « On arrive sur place, et un des hommes saigne beaucoup d’une plaie au visage. »
Mais quand Anthony s’approche pour initier des premiers soins, l’homme devient violent. « Dans un premier temps, il m’agresse verbalement, refusant que je l’approche. Et quand je décide malgré tout de m’avancer, il devient comme fou. »
Je sais que ça aurait pu très mal finir
L’homme lui « bondit » dessus, et tente de lui asséner plusieurs coups avant d’être immobilisé. Au final, plus de peur que de mal pour Anthony, qui s’en tire avec « seulement » quelques hématomes, mais surtout un mauvais souvenir qui l’a profondément marqué.
« Je fais beaucoup plus attention qu’auparavant, surtout avec les personnes manifestement alcoolisées ou droguées. Je sais que ça aurait pu très mal finir. »
Des agressions similaires à celle d’Anthony, le corps des sapeurs-pompiers de France assure en subir des milliers tous les ans.
Insécurité croissante
Fin juin de cette année, plusieurs syndicats de pompiers ont d’ailleurs appelé à la grève, pour dénoncer des conditions de travail qu’ils jugent dégradées.
Parmi les motifs de complainte, les effectifs insuffisants, la sur-sollicitation, mais aussi l’insécurité, qui serait croissante.
En 2018, un rapport de l’observatoire national des délinquances attestait de cette progression. Le nombre de pompiers déclarant avoir été agressés dans l’exercice de leurs fonctions avait augmenté de 23 % depuis 2017.
Au total, ce sont 2 813 sapeurs-pompiers qui ont témoigné en 2018 d'avoir été victimes d'une agression.
Et plus inquiétant encore, toujours selon l'étude : en dix ans, le nombre d'attaques a bondi de 213 %.
Vigilance accrue
En Corse, on se souvient notamment de l'affaire du Jardin de l'Empereur, le 24 décembre 2015. Une équipe de sapeurs-pompiers est appelée pour ce qui est en réalité une fausse alerte au feu.
L'équipage est ensuite violemment attaqué par plusieurs dizaines d’hommes: armés de gourdins, de clubs de golf, et masqués pour ne pas révéler leur identité, les individus caillaissent le camion des secours. Deux pompiers et un policier sont blessés dans l'attaque.
Depuis cette affaire, la vigilance est accrue pour les pompiers qui interviennent sur le secteur.
Dès lors qu'il y a des appels à l'aide, on intervient malgré tout
Au centre opérationnel départemental d’incendie et de secours, on explique ainsi qu’une note de service à l’intention du personnel rappelle que tout départ d’intervention sur les lieux doit être accompagné par les forces de police.
Même condition pour les situations jugées plus « à risque », comme dans le cas de violences urbaines, par exemple.
Cette règle n'est pour autant pas toujours respectée : « il arrive qu’on soit présents sur place avant les forces de l’ordre. Et dès lors qu’il y a des appels à l’aide, on intervient malgré tout ». Quitte à prendre des risques en essayant de remplir leur mission de secours.
Moins fréquent en Corse
Alors pour assurer la sécurité des sapeurs-pompiers en mission, plusieurs procédures ont été mises en place : « s’ils se sentent menacés, ou s’il y a un risque, ils doivent reculer. Et le conducteur du camion reste au volant au cas où. »
Mais à en croire le centre opérationnel de Corse du Sud, les cas de violence sont sur l'île « moins fréquent qu’ailleurs ».
« On ne peut pas dire que c’est rare, parce que des actes de violences arrivent malheureusement quand même de temps en temps. Mais nous ne sommes pas la région la plus à risque, comparativement aux Hauts-de-France ou à Lyon, par exemple. »
La dernière agression d’un pompier dans l’exercice de ses fonctions en Corse est pourtant récente : ce dimanche 18 août.
Un sapeur-pompier du centre de secours de Calvi a été agressé par un homme à qui il portait secours. Résultat : une plaie qui a nécessité plusieurs points de suture à la tête et 8 jours d’ITT.
On devient pompier parce qu’on veut sauver des gens. Pas pour devenir à notre tour des victimes.
Cette attaque a provoqué une vive émotion dans les rangs des pompiers, comme dans ceuux des élus politiques et au sein la population Corse. Une plainte a été déposée contre l’agresseur.
[CUMUNICATU]
— SIS Cismonte (2B) (@sdis2b) August 18, 2019
Pompier agressé dans l'exercice de sa mission.
L'ensemble des membres du Conseil d'Administration et du personnel du @sdis2b se joignent au #PCASIS @GuyArmanet et au #DDA @JjPeraldi pour condamner un acte indamissible et apporter son soutien à leur collègue SPV. pic.twitter.com/oCUewE3i9W
Il n'empêche que du côté du centre opérationnel d’incendie et de secours de Haute-Corse, on tient le même diagnostic qu’en Corse du Sud : ces agressions, quoique malheureuses, tiennent généralement de « l’épiphénomène ».
« Mais même si ça n’arrive qu’une fois par an, c’est une fois de trop ! » insiste Anthony, sapeur-pompier agressé par le passé.
« On devient pompier parce qu’on veut sauver des gens. Pas pour devenir à notre tour des victimes. »
* le prénom a été modifié