Le secrétaire de la section locale d'Ajaccio du Parti Communiste Français se présente dans la deuxième circonscription de Corse-du-Sud. Âgé de 28 ans, Pierre-Ange Muselli-Colonna souhaite porter la voix communiste et celle de la nouvelle union de la gauche, même si l'accord ayant abouti à la coalition NUPES ne s'applique pas dans l'île.
Cinq ans après la candidature de Nicolas Alaris et ses 3,92% des voix, le Parti Communiste Français sera de nouveau représenté dans la deuxième circonscription de Corse-du-Sud. C'est Pierre-Ange Muselli-Colonna, secrétaire de la section d'Ajaccio du PCF, qui défendra les couleurs du parti avec Michel Tramoni, maire de Bilia, comme suppléant.
Les 12 et 19 juin prochains, le candidat de 28 ans espère décrocher un premier mandat de député et représenter la gauche insulaire qui part diviser. À l'inverse de celle du continent qui est elle réunie sous la nouvelle bannière NUPES (Nouvelle Union Politique Ecologique et Sociale).
France 3 Corse : Qu'est-ce qui vous a convaincu de briguer ce siège de député ?
Pierre-Ange Muselli-Colonna : L'objectif, c'est d'imposer une cohabitation au président Macron. N'oublions pas qu'il a été réélu grâce à l'apport des voix de gauche pour faire barrage au Rassemblement National. Je souhaite donc porter la parole du Parti Communiste Français, mais aussi de la Nouvelle Union Politique Ecologique et Sociale (NUPES), bien que la Corse ne fasse pas partie de l'accord. Aujourd'hui, il faut redonner de la puissance à la gauche.
Si vous êtes élu, quelles seront vos principales actions en faveur de votre circonscription en tant que député ?
Ma priorité sera de restituer du pouvoir d'achat aux ménages insulaires. Dès le 1er juillet, si une majorité de gauche se dessine à l'Assemblée, nous défendrons cinq mesures nécessaires : l'augmentation du SMIC à 1400 euros net, le blocage du prix des produits de première nécessité, la généralisation du plafonnement des loyers, mettre en place une allocation de revenu jeunesse et annuler la réforme de l'assurance chômage mise en place sous le quinquennat d'Emmanuel Macron.
Au-delà du pouvoir d'achat, je crois que nous devons développer de nouveau les services publics. On voit bien que dans le secteur de la santé et de l'éducation, il y a des besoins importants notamment dans notre circonscription. Par exemple, il y a encore beaucoup de déserts médicaux. Aujourd'hui, pour avoir rendez-vous avec un médecin, certains doivent faire des kilomètres pour se faire soigner. Il faut réimplanter des maisons de santé en milieu rural et dans les quartiers populaires. Nous devons réfléchir à une politique pour favoriser l'installation de médecins dans ces zones rurales où la population est majoritairement assez âgée.
Nous souhaitons également socialiser certains secteurs comme celui des déchets. Aujourd'hui, les mafias y trouvent le moyen de se faire beaucoup d'argent et très rapidement.
Un cycle de discussions devrait s'amorcer entre le futur gouvernement et les élus de la Corse autour de la possibilité d'évoluer vers un statut d'autonomie. Quelle sera votre position sur cette question ?
À ce jour, nous ne connaissons ni le périmètre institutionnel ni le contenu de ce statut. Aujourd'hui, les seuls points sur lesquels les élus de l'Assemblée de Corse semblent s'être mis d'accord sont le statut de résident, le statut fiscal et la co-officialité de la langue corse. Personnellement, au vu des rapports de force politiques et économiques actuels, j'ai peur que la Corse devienne un "nouveau Malte" ou un "Monaco bis". Cela signifie un statut fiscal dérogatoire où l'on favorise les puissances d'argent au détriment des gens modestes qui composent l'essentiel de la population de l'île.
À partir du moment où l'on verra un peu plus clair, si le statut d'autonomie permet d'améliorer les conditions de vie des insulaires, nous le soutiendrons. Mais nous ne nous faisons pas trop d'illusions sur la chose. Si je suis élu député, je prendrai part aux discussions pour être à l'écoute de la Collectivité de Corse et des forces en présence, mais aussi pour être un point relais avec d'autres forces trop peu entendues comme les organisations syndicales.
En Corse, nous avons déjà connu une série de réformes institutionnelles. Est-ce que fondamentalement cela a amélioré les conditions d'existence des Corses ? Non, je ne le crois pas. Depuis quatre ans, nous avons une collectivité unique avec des pouvoirs importants et conséquents. Il n'en ressort pas grand-chose. À ce jour, je ne sais pas quels sont les bons côtés d'une énième réforme. Je serais donc plutôt contre ce statut d'autonomie sauf si l'on nous prouve qu'il améliore les conditions d'existence des Corses.
Aujourd'hui, par exemple, le code du travail est le même que sur le continent. Pourtant, les organisations syndicales le constatent, il est bien plus souvent bafoué en Corse. En Polynésie, le code du travail est encore moins favorable pour les salariés. Imaginez si la Corse obtient ce même statut régi par l'article 74 de la Constitution. Est-ce cela que l'on veut ? Je ne le pense pas.
Sur le continent, les forces de la gauche ont formé une alliance pour les élections législatives. La Corse ne fait pas partie de cette Nouvelle Union Politique Ecologique et Sociale (NUPES). Où en est la gauche insulaire ?
La gauche insulaire se retrouve bien affaiblie. Aujourd'hui, la seule force politique se revendiquant de gauche et ayant une existence permanente, c'est le Parti Communiste Français. On le voit bien sur ces cinq dernières années puisque nous sommes les seuls à ne pas avoir fait l'impasse sur les Municipales, les Territoriales et les Législatives. Pourtant, nous avions essayé d'impulser des dynamiques d'union avec les autres forces de gauche. Cela a été sans succès.
Par rapport à la NUPES, je suis dans l'incompréhension. Lorsque l'on a su que la Corse ne faisait pas partie de l'accord, nos deux secrétaires départementaux du Parti Communiste ont écrit une lettre à notre direction nationale pour savoir pourquoi. Nous avons appris que La France Insoumise a demandé à ce que la Corse n'en fasse pas partie. Je me demande si ce n'est pas lié aux bonnes relations entretenues entre nos trois députés nationalistes avec Jean-Luc Mélenchon et certains membres de son groupe parlementaire. Je suis en colère car nous avons mérité d'être dans cet accord !
Si vous êtes élu député, rejoindrez-vous l'alliance de gauche à l'Assemblée Nationale ?
Ma volonté première est de pouvoir constituer un groupe communiste. Au-delà de ça, j'intégrerai bien entendu avec Le Parti Communiste Français la nouvelle union de la gauche. Au niveau des décisions, nous nous sommes engagés à respecter certains points de programme qui ont fait consensus entre les différentes forces de gauche et de l'écologie politique. Par exemple, la retraite à 60 ans ou encore l'augmentation du SMIC ne poseront pas de question. Ce sont des combats portés par le candidat Fabien Roussel à l'élection présidentielle. Maintenant, s'il y a des désaccords sur certains votes entre les différents groupes de gauche, chacun votera en son âme et conscience.