Le député nationaliste, proche de Jean-Christophe Angelini, brigue un deuxième mandat en juin prochain. On fait le point avec lui sur les perspectives et les enjeux de ces législatives.
55,22 % des voix, face au poids-lourd Camille de Rocca Serra. La victoire de Paul-André Colombani, en juin 2017, dans la deuxième circonscription de Corse-du-Sud, fief de la droite insulaire depuis près d'un demi-siècle, avait fait l'effet d'un tremblement de terre. Le médecin généraliste de Sainte-Lucie de Porto-Vecchio, militant du PNC et proche de Jean-Christophe Angelini, était novice en politique.
Cinq ans plus tard, Paul-André Colombani repart en campagne, pour décrocher un nouveau mandat.
Qu'est-ce qui a motivé votre candidature ?
Nous avons passé la mandature qui s'achève à aborder tous les problèmes de la Corse au palais Bourbon, à sensibiliser l'ensemble des députés à toutes ces questions. Il n'est pas question d'arrêter là. Il va falloir rester dans la lignée de la tâche qui nous a été confiée en 2017, celle de porter la voix de la Corse à Paris. Pas uniquement celle des nationalistes. Et puis la mandature s'est terminée sur un drame, des discussions s'ouvrent entre Paris et la Corse, et nous avons un rôle à jouer.
A ce sujet, quelle sera la position que vous allez adopter, durant les discussions autour de la question de l'autonomie ?
On attend un dialogue sans tabous. L'autonomie, ce n'est pas une fin en soi, c'est un outil que l'on donnera aux Corses pour régler les problèmes du quotidien, le logement, l'énergie, la vie chère ou la précarité. L'île a besoin de ces outils pour mieux adapter les lois qui se décident à Paris, et qui ne conviennent pas à l'île. Ce que l'on va rappeler, encore et encore, c'est que s'il y a une volonté politique, on peut faire tout ce que l'on veut au niveau juridique.
Enfin, j'entends insister sur la nécessité d'un dialogue autour de la culture, de l'identité, et de la langue corse. C'est notre rôle de porter ce message à l'Assemblée nationale. Et de le faire entendre. Durant ces cinq ans, ,nous n'avons été ni des Va-t-en-guerre, ni des Playmobils. On a su faire preuve de responsabilité dans les moments compliqués des cinq dernières années. Et nous sommes crédibles.
Aujourd'hui il y a des problèmes, en Corse, entre les nationalistes. Mais à Paris notre union n'a pas été mise à mal.
Vous dites "nous", régulièrement, lorsque vous nous parlez de votre expérience parisienne. Pourtant, l'entente entre votre mouvement, le PNC, et celui de vos deux collègues, Femu, n'est plus celle qu'elle était en 2017. Ce schisme aurait certainement des répercussions au palais Bourbon, si vous êtes réélus.
Je dis "nous" naturellement. C'est vrai. Pour une raison simple. Nous avons travaillé sur tous les sujets ensemble, avec Michel Castellani et Jean-Félix Acquaviva. Et même, pour aller plus loin, avec Jean-Jacques Ferrara, dans le cas du dossier des prisonniers politiques, par exemple. Sans son appui, on n'aurait jamais eu avec nous lors de notre visite en prison des députés des Républicains.
Je ne vais pas faire de langue de bois. Il y a des problèmes, en Corse, entre les nationalistes. Mais à Paris il n'y a pas eu de difficultés majeures pour travailler. L'union n'a pas été mise à mal, et on ne se pose pas la question de changer notre manière de travailler si l'on est tous les trois réélus.
Si c'était le cas, quelle serait votre stratégie au cours de la mandature qui s'ouvre, pour faire avancer vos dossiers ?
D'abord, on a toujours parlé à tout le monde, depuis notre arrivée, il y a cinq ans. Dans un premier temps, on était non-inscrits, et c'est ce qui nous a permis de nous faire connaître, et d'engager le dialogue avec des membres de tout l'échiquier politique, hormis peut-être le Rassemblement National.
Dans un second temps, logiquement, on a rejoint le groupe Libertés et Territoires, composé de personnalités importantes de droite, de gauche, mais surtout du centre. On espère que le groupe sera renforcé par ces législatives. C'est un groupe équilibré, qui peut jouer un rôle de charnière, dans les années à venir. Et on ne s'en privera pas.
En tout cas, une chose est sûre, on n'a pas été, comme beaucoup de députés qui nous ont précédé, installés dans notre confort de groupe, à ronronner sans soutenir à plein la question corse. Et notre stratégie a été payante, on l'a vu avec Jean-Luc Mélenchon, par exemple, qui parle désormais d'inscrire la Corse dans l'article 74 de la Constitution, ou d'un statut de résident sur l'île... Le soutien de nombreux députés pour le rapprochement des prisonniers à la fin de la mandature, ça a également été le résultat d'un travail quotidien, d'un vrai lobbying.
A côté de cette question de l'autonomie, qui va occuper beaucoup d'espace, quelles seront les principales actions que vous comptez mener au nom de votre circonscription, si vous gagnez début juin ?
Pour beaucoup, ce seront ceux que j'ai initiés au cours des cinq dernières années : le prix de l'essence, qui est un vrai échec du gouvernement Macron ; la question de l'énergie, avec la centrale du Vazzio qui est obsolète, au détriment de la santé des Ajacciens ; la désertification médicale, qui me tient à cœur, et plus largement la désertification du rural, alors que les services publics continuent de plier bagage dans l'extrême-sud ; et puis bien sûr la spéculation immobilière. Il faut qu'on ait les moyens d'aider les Corses à se loger. Aujourd'hui un ménage corse qui vit normalement ne peut plus se loger dans l'extrême-sud de la Corse. C'est intolérable.