En pleine période de confinement, la photo du parking bondé d'un centre commercial ajaccien a heurté les petits commerçants des centre-villes, et créé l'émoi sur internet. Elle ne fait pourtant que souligner une situation bien antérieure à l'épidémie de Covid19.
Voilà qui ne risque pas de rassurer les petits commerçants...
Après avoir subi de longues semaines de fermeture au public, beaucoup d'entre eux voient l'approche des fêtes de fin d'année comme l'ultime moyen de sauver leur boutique.
Ruée vers les grandes surfaces
Alors, sans grande surprise, les images des énormes centres commerciaux de Baleone, à la sortie d'Ajaccio qui ont été diffusées hier sur les réseaux sociaux, ont provoqué d'innombrables réactions.Sur ces photos, on voit un parking plein, et d'interminables embouteillages pour parvenir à y accéder. Apparemment, c'est dans les grandes enseignes nationales qu'Ajaccio, et les environs, ont décidé de venir préparer leurs réveillons.Je n'ai pas le droit d'ouvrir mon affaire afin de limiter la propagation du virus.
— Caviglioli (@cavibomba) December 5, 2020
L'atrium aujourd'hui ?
Merci @JeanCASTEX#confinement #COVID19 pic.twitter.com/HCbdFcB9kD
Alors que les centre-villes des principales agglomérations de l'île se meurent depuis des années, pour certains, ce Noël sous Covid19 est le dernier clou dans le cercueil du commerce de proximité...
@Prefet2A
— nathalie lanfranchi (@cuccunella) December 5, 2020
vous interdisez aux bars et restos d’ouvrir, vous interdisez les foires et marches de noël, privant de nombreux artisans et producteurs de travail,vs mettez des amendes aux lycéens qui déjeunent sur le diamant, mais un 5/12/20 à 18h on a ça à l’atrium. Why??? pic.twitter.com/b6RDcPKVWW
Deux poids deux mesures ?
Les petits commerces ont fermé, durant deux mois, au printemps. Et ont dû baisser de nouveau le rideau, durant tout le mois de novembre. Avec la possibilité de mettre en place un pis-aller appelé le Click & Collect. Pas vraiment convaincant, niveau chiffre d'affaires.Depuis le 28 novembre ils ont pu réouvrir leurs portes. Mais avec des mesures sociales qui les contraignent à limiter drastiquement le nombre de clients présents dans leurs murs au même moment. Au maximum un client pour 8 mètres carrés de surface de vente.
Certains sont prêts à attendre leur tour, dans le froid, comme ici devant A Piuma Lesta, à Bastia.
Patrick, un des clients de la librairie bastiaise, résume le problème en quelques mots. "C'est David contre Goliath. Et c'est comme ça depuis des années. Je ne vois pas pourquoi tout le monde semble le découvrir aujourd'hui".
Le Covid19, un révélateur
La réponse semble assez claire. Le Covid19. La pandémie n'a fait que pousser les médias à se pencher sur une situation bien antérieure, comme l'expliquait la géographe Antonia Luciani, porte-parole de Femu a Corsica, sur notre plateau, à la fin du mois de novembre :"Ce deuxième confinement dans une période charnière, les achats de Noël, est un révélateur des inégalités qui existent depuis de nombreuses années entre les opérateurs de la grande distribution et le petit commerce de proximité".
Une guerre des prix perdue d'avance
La vague de protestation spectaculaire sur les réseaux sociaux a, à ce titre, soulevé quelques interrogations légitimes chez certains internautes..."C'est toute l'année que les petits commerçants doivent se battre contre une concurrence déloyale. Ma fleuriste a arrêté de vendre des sapins de Noël, parce que, quand elle doit les acheter à 18 euros la pièce, la grande distribution les vend, elle, à 18 euros. Cette guerre des prix a un impact sur le commerce de proximité qui ne peut plus faire son travail correctement toute l'année" souligne Antonia Luciani.Avec tous les anti amazon, anti atrium, anti Leclerc baleone présents sur les réseaux je me demande qui sont ces gens qui affluent chaque jour vers ces zones de concentrations de cas sociaux... #boycott #maisquequandçanousarrange #aiatch
— Jb Limongi (@JbLimongi) December 5, 2020
Le problème va donc bien au-delà d'un virus mondial et de mesures sanitaires exceptionnelles. C'est toute une politique de développement économique qui serait en cause :
"Les gouvernements successifs ont toujours favorisé l'implantation de grandes surfaces commerciales, notamment en périphérie. On le voit bien en Corse, où il y a un suréquipement en zones commerciales périphériques. Ce n'est pas le cas de nos voisins italiens ou allemands, qui ont un tissu de petits commerces de proximité bien plus important. La France a fait le choix de la grande distribution. Mais on peut faire d'autres choix politiques".
Ce deuxième confinement a été le révélateur de nombreuses injustices entre commerces de proximité et zones commerciales. Il donc urgent pour limiter les effets de crise économique de : ✔️mettre en place des aides d’urgences pour éviter les faillites dans l’urbain comme le rural ✔️exiger des mesures fiscales spécifiques conformes à notre statut d’île montagne pour l’ensemble des TPE, ✔️et sur le long terme mettre un frein définitif à l’expansion des zones commerciales périphériques. À ringrazià à France 3 Corse ViaStella pè u so invintu pè parlà di e zone cummerciale e di u picculu cummerciu
Publiée par Antonia Luciani sur Mardi 24 novembre 2020
A travers la France, les élus de proximité ont manifesté à de multiples reprises leur soutien aux petits commerçants, et ont promis qu'ils défendraient leur cause auprès de Paris. Sur l'île, un plan plus général, nommé Salvezza è Rilanciu, a été adopté à l'Assemblée de Corse.
Reste à savoir s'il sera de taille à lutter contre l'attrait puissant que les grands centres commerciaux continuent d'exercer sur les insulaires...