L'espèce, qui est en voie d'extinction, avait trouvé en Corse un havre de paix. Mais selon Global Earth Keeper, ce n'est plus le cas. En cause, une urbanisation anarchique, et pas vraiment contrôlée par l'Office Français de la Biodiversité, qui regarderait ailleurs. L'ONG a porté plainte. 

"En Corse, c'est un véritable massacre au profit des résidences secondaires"
Nadège Chavane, membre de l'association Global Earth Keeper à Porto-Vecchio, n'y va pas par quatre chemins. 

L'ONG environnementale qui lutte pour la défense des animaux à travers le globe tire la sonnette d'alarme. Une fois de plus. Le sujet de leur inquiétude : les tortues d'Hermann, une espèce en voie d'extinction, et protégée. En France, elle n'est plus présente que dans deux endroits : dans le massif des Maures, et en Corse. 

Les tortues chassées de leur habitat naturel

A en croire Global Earth Keeper, la frénésie immobilière qui s'est emparée de l'île fait planer sur ces tortues une lourde menace. "Ca ne peut plus durer. Nous avons la fâcheuse tendance de construire à tout-va sans nous préoccuper du vivant". 

Des centaines de tortues sont écrasées par les bulldozers et pelleteuses.

Global Earth Keeper

En effet, avant même les incendies, la pollution ou encore l'agriculture, c'est la destruction de son habitat naturel qui fait le plus de mal à la tortue d'Hermann. 

Alors, depuis 2007, un arrêté protège cet habitat naturel. Et si un chantier immobilier est prévu quelque part, on doit s'assurer que le terrain n'abrite pas d'espèces protégées. 

Si c'est le cas, il faut demander une autorisation à la préfecture, en faisant valoir "des raisons impératives d'intérêt public majeur". Très clairement, un hôpital, et pas grand chose d'autre. 

Si la préfecture délivre la dérogation, il faut s'assurer de trouver un habitat qui convienne à l'espèce à proximité...

En principe.

Les services de l'Etat en cause

Seulement voilà : à en croire GEK, en Corse, c'est loin d'être toujours le cas. Particulièrement dans le sud de l'île, et tout particulièrement dans la baie d'Ajaccio.

Un endroit de choix pour les promotions immobilières juteuses. En 2019, selon l'Insee, les permis de construire ont augmenté de 26 %...

C'est là, normalement, que devrait entrer en scène l'OFB, ou office français de la biodiversité...

C'est cet organisme d'Etat qui est chargé de vérifier que tout ce passe dans les règles. Et que les espèces menacées ne souffriront pas du chantier mis en route. 

Global Earth Keeper l'affirme : en Corse, l'OFB ne fait pas son travail, et ignore, voire passe sous silence, les fréquentes alertes des riverains et des associations de défense de l'environnement. L'ONG affirme avoir recueilli de nombreux témoignages. 

Et n'hésite pas à rendre publiques des mails qui, selon elle, le prouvent. 

Ainsi, ce courrier envoyé à un lanceur d'alerte qui avait sollicité les services de l'OFB.
On assure au défenseur de l'environnement que des agents vont se rendre sur le terrain. Mais on prend soin de préciser "qu'en cas d'infraction(s) constatée(s) vous serez entendu en qualité de témoin dans cette affaire"... 

Pour GEK, cela ne fait guère de doute. Un tel message s'apparente à des pressions "afin de déterminer autrui à s'abstenir de faire ou délivrer une déposition".

Une plainte déposée au parquet d'Ajaccio

Alors L'ONG, le 26 novembre dernier, a déposé une plainte auprès du parquet d'Ajaccio pour subornation de témoins. La peine encourue est de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende. 

Dans la foulée elle publiait, dans le même temps, une vidéo pour dénoncer ces prétendues dérives.

Sans surprise, l'OFB n'a pas tardé à réagir :
"L’Office Français de la Biodiversité conteste avec la plus grande fermeté l‘ensemble des propos tenus à son encontre dans la présente vidéo et en particulier les allégations relatives à de prétendus agissements susceptibles de s’apparenter à de la subornation de témoin ou toute tentative d’intimidation à l’encontre de tout lanceur d’alerte exerçant librement ses droits".

Le pot de terre contre le pot de fer.

Maître Gérard Tiberi

Pour l'heure, l'enquête préliminaire est toujours en cours. Gérard Tiberi, l'avocat de GEK, estime qu'elle devrait aboutir dans les prochains mois. "On devrait avoir quelque chose en février ou en mars. Même si avec le Covid, cela pourrait être un peu plus long. A ce moment-là, soit le procureur a des éléments et poursuit, soit nous allons devant le juge d'instruction". 

L'ancien bâtonnier du barreau de Bastia l'affirme, l'ONG n'est pas prête à abandonner le combat. "Il y a un rapport de force engagé. Et nous sommes le pot de terre contre le pot de fer, l'Etat. Mais c'est un pot de terre Corse, et on ira jusqu'au bout".  

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