En raison du manque d'eau, la production de fourrage est faible cette année. Pour nourrir leurs troupeaux, les éleveurs devront très rapidement avoir recours à l'importation. Ce qui aura un coût.
Dans ce pré, en bordure de la Gravona, l’herbe est verte comme au printemps. L’homme qui l’exploite réalise trois coupes de foin par an. Sur les 4 000 presses produites, un millier sert pour son troupeau et le reste est vendu. Cette année, il a néanmoins fallu arroser dès le mois d’avril.
« On a arrosé très tôt et on n’a plus arrêté d’arroser jusqu’à aujourd’hui. Et même aujourd’hui on arrose encore. Le coût final de la presse de foin est beaucoup plus important puisque le coût en eau est multiplié par deux.
On va augmenter de 50 centimes d’euro voire un euro maximum, mais on n’appliquera pas la hausse qu’on devrait appliquer. On se connait tous et on ne peut pas faire ça à des éleveurs et que nous aussi on est des éleveurs », indique Jean-Michel Casalta, producteur de fourrage.
La production insulaire est en baisse de 30 à 50% cette année du fait de la sécheresse. Ainsi, les éleveurs vont devoir se rabattre sur le foin du continent, ce qui implique plus de dépenses. Le fourrage corse est vendu entre 8 et 9 euros la presse, il en coûte entre 12 et 14 euros pour du foin venu de la plaine de la Crau dans le Var.
« Il est inconcevable que nos vaches mangent du foin de la Crau »
Dans le courant du mois, on s’attend à une forte hausse de la demande agricole. « En septembre et octobre, c’est la période des mises bas pour les ovins. Les gens sont obligés de bien complémenter les troupeaux pour préparer la période de lactation. Ensuite, les éleveurs bovin en octobre, lorsqu’ils redescendront de la montagne feront face à une pénurie d’herbe », précise Jean-Marc Bessone, directeur commercial d'une coopérative agricole.
L’office de développement agricole et rural de la Corse (ODARC) veut agir dans plusieurs directions. Déjà, une aide de 4 000 euros est apportée aux exploitants qui sont contraints de transporter de l’eau pour faire boire les troupeaux. Pour ce qui est de l’importation de fourrage, sur les 350 euros du prix à la tonne hors taxes, 110 euros sont liés au transport, une réunion est prévue jeudi avec les acteurs concernés.
« Nous sommes en train de faire un travail, que ce soit avec les transporteurs terrestres, les transporteurs maritimes, l’office des transports et l’ensemble des distributeurs au niveau de la Corse pour faire en sorte de trouver un moyen de porter une aide au niveau des exploitants agricoles qui seraient dans le besoin d’importer du foin », explique François Sargentini, président de l' ODARC.
De leur côté, les producteurs de fourrage assimilent ce type d’aide à une subvention déguisée pour leurs concurrents du continent.
« Aujourd’hui, il est inconcevable que nos vaches, qui font des veaux corse, que nos brebis, qui font du lait corse, elles mangent du foin de la Crau. Parce qu’après on peut se poser la question : est-ce que c’est du lait corse et de la viande corse », s’interroge Jean-Michel Casalta.
En attendant les fourragers s’organisent. Dans ce champ, du millet a été planté, un type de plante africain adapté aux changements climatiques.