Territoriales : Femu a Corsica dicte ses conditions pour une liste commune

La cunsulta de Femu, dimanche 25 avril, pourrait bien marquer la fin de Pè a Corsica, la coalition qui a porté les nationalistes au pouvoir, telle qu'on la connait. Femu entend recadrer ses partenaires, le PNC et Corsica Libera. En montrant qui est le chef. De quoi faire voler en éclats l'union ? 

La campagne qui s'ouvre, c'est le moment des bilans. Celui de la mandature sortante, traditionnellement. Mais également celui de Pè a Corsica, la coalition des trois partis nationalistes de la majorité territoriale, Femu a Corsica, le PNC et Corsica Libera.
Une coalition formée en 2015, et qui a porté les nationalistes aux affaires à l'assemblée de Corse. La coalition devait durer 10 ans. La cunsulta de Femu a Corsica, hier, a semé quelques doutes sur le fait qu'elle aille à son terme. 

Un recadrage autoritaire

70 délégués du parti de Gilles Simeoni, président de l'exécutif, étaient réunis dimanche 25 avril par visioconférence. Et ils ont établi les termes du contrat concernant la coalition qui briguera un nouveau mandat.

C'est le leader de Femu qui en exposera le contenu exact dans les prochains jours, mais Jean-Félix Acquaviva, secrétaire national du parti, en a dévoilé les principales tendances. Et c'est peu de dire qu'il y a quelques changements : 

D'abord, Femu est décidé à rompre avec la logique des partis et des quotas de places au sein de l'exécutif qui était en place. En corollaire, il prône l'ouverture de la liste au-delà de la famille nationaliste. "Il faut, pour se renouveler, dépasser les logiques d'appareil. C'est comme cela que nous transformerons l'essai".

Ca ne peut pas être la course à l'échalote entre les membres de l'exécutif

Jean-Félix Acquaviva

Deuxième point, qui en dit long sur l'entente au sein de Pè a Corsica, la volonté d'affirmation du leadership du président de l'exécutif. Jean-Félix Acquaviva rappelle que l'exécutif est, selon le ghjuramentu de 2015, le "gouvernement de la Corse". 
Et ce gouvernement, comme tous les gouvernements, doit avoir un seul pilote. "Ca ne peut pas être la course à l'échalote entre les membres de l'exécutif", précise le député de la deuxième circonscription de Haute-Corse qui n'hésite pas à parler de "baronnies". Pour avancer, selon lui, "il faut éviter d'être gênés par les disfonctionnements qui ont eu lieu lors de la précédente mandature".

Enfin, Femu milite pour une harmonisation des discours lors de la campagne, et durant les années à venir. Pour le parti de Gilles Simeoni, le constat peut sembler tardif, mais il est indéniable : il n'y a pas un, mais des nationalismes.

Et il est temps d'agir en conséquence : "on ne peut plus se permettre d'ambiguïtés sur le projet de société qu'on veut pour la Corse. Il faut en finir avec les positions discordantes sur de nombreuses questions. Il faut se recentrer sur nos principes, nos valeurs. La morale, l'éthique, doivent être au centre de notre politique".

Jean-Félix Acquaviva, à ce titre, prend l'exemple de l'économie de la rente spéculative, à laquelle, selon Femu, il faut absolument tourner le dos. Le député se garde bien de citer des noms, mais, pour les observateurs, ce sont les récentes prises de position du nouveau maire de Porto-Vecchio, Jean-Christophe Angelini, qui pourraient être en cause.

Un patron, sinon rien

Le message semble clair : tout le monde doit tirer dans le même sens, et la direction c'est Femu qui l'indiquera. Le patron, c'est Gilles Simeoni.
My way, or the highway, disent les américains...

Il faut dépasser la logique de la chasse gardée.

Jean-Félix Acquaviva

Peut-on, alors, assister à un éclatement de l'union dès le premier tour ? Pour Jean-Félix Acquaviva, il est trop tôt pour répondre : "bien sûr que les autres partis nationalistes sont à respecter. Mais on ne peut se permettre la reconduction d'un rapport de force au sein de Pè a Corsica. Il faut dépasser la logique de la chasse gardée dans les offices, par exemple. Et donner une autre dimension à notre rassemblement". 

Des fissures profondes 

Pour l'heure, les termes exacts du contrat ne sont pas encore connus. Et désormais, tous les regards sont tournés vers Gilles Simeoni, qui prendra la parole dans la semaine. Son discours sera-t-il aussi radical que les celui de Jean-Félix Acquaviva, ou plus conciliant ? A quelques semaines du premier tour, on peut se demander si Femu pourrait se permettre de faire l'économie des voix du PNC et de Corsica Libera. Si ce n'est au premier tour, du moins au deuxième...

Du côté des partenaires de Pè a Corsica, on attend également d'en savoir plus avant de réagir.

Petru Antone Tomasi, président du groupe Corsica Libera à l'Assemblée, a fait savoir que le parti "s'exprimera dans les prochains jours sur la situation politique et les élections territoriales à venir". On n'en saura pas plus, mais on peine à croire que le positionnement de Femu suscite un quelconque enthousiasme du côté des indépendantistes. Jean-Guy Talamoni et les siens avaient très mal vécu l'épisode des municipales, qu'ils avaient déjà vu comme une trahison de l'esprit de Pè a Corsica.  

Il faut prendre un peu de recul. Nous arrêterons notre position samedi.

Jean-Christophe Angelini

Mais c'est entre Femu et le PNC, entre Gilles Simeoni et Jean-Christophe Angelini, que les différents semblent les plus profonds. Politiques autant que personnels. dernier en date, la signature par le maire de Porto-Vecchio d'une convention dans le cadre du PTIC avec le préfet, alors que le président de l'exécutif dénonçait de son côté les modalités d'attribution de ces aides de l'Etat, qui selon lui, contournaient la CdC. 

Hasard malicieux du calendrier, au lendemain de la cunsulta de Femu, c'est Pierre Savelli, maire de Bastia et proche de Gilles Simeoni, qui a signé a son tour une convention PTIC. Mais cette fois-ci en des termes qui conviennent au président de l'exécutif. 

Concernant Pè a Corsica, et le nouveau contrat envisagé par Femu, Jean-Christophe Angelini reste prudent : "pour l'heure je ne ferai aucun commentaire. Nous avons pour notre part un cunsigliu samedi prochain, à 18 heures. Toute la semaine, nous allons échanger, avec les membres du PNC mais avec d'autres également, et samedi on arrêtera notre position. Il me semble nécessaire de prendre un peu de recul".

Un recul que le leader du Partitu di a Nazione Corsa, selon certaines indiscrétions, pourrait avoir pris depuis quelques temps déjà. Des rumeurs de plus en plus pressantes font état de démarches de la part du maire de Porto-Vecchio pour constituer sa propre liste. 

Une chose est sûre, l'offensive de Femu a Corsica pousse ses partenaires à se positionner rapidement, alors que la date de dépôt des listes approche à grands pas. Mais si la virulence des propos peut surprendre, on imagine que, dans un camp comme dans l'autre, on n'a pas vraiment été pris au dépourvu. La maison Pè a Corsica tremble sur ses fondations, mais en interne, les fissures avaient fait leur apparition depuis des mois...

 

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