Cinq appartements thérapeutiques permettent d'accueillir, à Ajaccio, des patients en traitement venus de toute la Corse. Cet espace porte le nom de Suzanne Chaigne, qui avait fait don de ses biens à la Ligue contre le Cancer. Des appartements qui apportent bien plus qu'une aide matérielle.
Agnès fait elle-même la visite de ce qui fut son logement. « C’est ici que je suis restée durant deux ans et demi », déclare-t-elle en ouvrant la porte.
Atteinte d'un cancer des ovaires en 2014, elle a résidé dans l’appartement durant son traitement, afin d'éviter les allers-retours quotidiens entre le golfe du Valinco et l’hôpital d'Ajaccio.
Le lieu est chargé de souvenirs. « Il y a des bons souvenirs parce que j’ai rencontré des gens formidables, qui m’ont beaucoup soutenue. Et des moins bons parce que… c’est la maladie. Ça me rappelle la maladie », livre-t-elle.
Rassuré
Aujourd'hui, trois des cinq appartements thérapeutiques mis à disposition des malades et leurs accompagnants sont occupés. Sans doute par peur du regard des autres ou parce que la maladie reste cachée au sein des familles, seul Dumè a accepté d’ouvrir sa porte.
Depuis que sa vie s'est mise entre parenthèses, le studio qu’il occupe le rassure. « Les trajets ça fatigue. Ca fatigue et puis moi, j’ai eu des rayons et après, je faisais une heure et demi de chimio parfois. Alors je rentrais un peu dans le cirage », témoigne-t-il.
Tous les patients, en chimiothérapie ou en radiothérapie, habitant à plus de 30 kilomètres d'Ajaccio peuvent bénéficier de ces logements, moyennant une participation journalière de 19 euros. La durée du contrat varie selon les traitements, mais en règle générale elle court entre cinq et neuf semaines.
Mais l'espace Suzanne Chaigne ne se résume pas à ça. « Les petits plus sont les soins de support qui sont proposés aux patients, en priorité la psychologie. Une psychologue passe toutes les semaines dans les appartements à la rencontre des nouveaux venus et au suivi des gens qui résident un petit peu plus longtemps. Il y a aussi des conseillers en diététique, de la sophrologie et de la médecine traditionnelle chinoise », explique Carole Schulz, secrétaire du comité Corse-du-Sud de la Ligue Nationale contre le Cancer.
Retour à la vie normale
Un studio est dédié à ces activités pour rendre cette escale la plus agréable possible, car on ne fait qu'y passer. Céleste a combattu trois cancers. Si à 74 ans la patiente, actuellement en rémission, éprouve le besoin de libérer son corps et son esprit, c'est parce qu'elle doit faire un contrôle à l'hôpital de Marseille très prochainement. « Ce sont des moments difficiles parce qu’il faut se replonger dans le passé, on a des examens à faire et donc on se sent un peu crispée, un petit peu mal à l’aise par rapport à cette maladie. Mais je sais maintenant que je pourrai faire un petit peu de relaxation et de sophrologie », raconte-t-elle.
Car dans chaque cancer, passé le choc du diagnostic, du pourquoi moi, et du sentiment d'impuissance face à la maladie, se succèdent l'acceptation des traitements et des effets secondaires.
Le retour à la vie normale ne met pas toujours fin à une sorte de dépression sous-jacente. « Quand vous êtes en rémission, tout s’arrête d’un coup. Et les patients disent souvent : ‘Je suis complètement abandonné.’ Ils disent : ‘Maintenant, on ne s’occupe plus de moi.’ Moi, je suis à la ligue, et je continue. Je leur maintiens ce lien, j’espace les rendez-vous de plus en plus et après, je les renvoie vers d’autres collègues. […] Mais souvent mes patients, je les revois après. J’ai toujours un lien avec eux au sein de la ligue […] », indique Audrey Augis, psychologue au sein du comité Corse-du-Sud de la Ligue Nationale contre le Cancer.
Une aide psychologique qui peut donc commencer au sein des appartements thérapeutiques de la ligue. Parce que les traitements modifient le cours d'une vie, il y a un avant et un après-cancer.