Mardi 14 septembre, le tribunal d'Ajaccio a condamné EDF à payer une amende de 40.000 euros. L'entreprise a été reconnue coupable des deux incendies survenus en juillet 2009 à Aullène et dans le sartenais. Le tribunal est allé contre les réquisitions du parquet. EDF a fait appel.
Ce mardi, EDF a été reconnue coupable par le tribunal correctionnel d'Ajaccio d'être à l'origine des deux incendies survenus en juillet 2009 à Aullène et dans la vallée de l'Ortolo. L'entreprise a été condamnée pour "manquement à une obligation de sécurité par négligence" et devra s'acquitter d'une amende de 40.000 euros.
Mis en délibéré lors du procès ayant eu lieu début juin, le jugement est allé à l'encontre de la relaxe requise par Carine Greff, alors procureure de la République d'Ajaccio.
"C'est la première fois qu'EDF est condamnée pour de tels faits au pénal, souligne André Celli, avocat de la partie civile qui défend cinq communes et une entreprise. Par le passé, elle a été condamnée pour d'autres faits, notamment de négligence ou relatifs à des accidents subis par ses ouvriers, mais pour incendie, c'est la première fois. C'est une immense satisfaction pour ces communes dans la mesure ou leur patrimoine foncier et environnemental a été durement touché."
Même son de cloche chez Jérôme Susini, conseil des communes d'Aullène, Moca-Croce et Petreto-Bicchisano : "C'est une immense victoire parce que ces communes ont eu l'impression d'être délaissées par l'institution judiciaire, a -t-il confié au sortir du délibéré. Ce délaissement a été symbolisé par la relaxe qui a été demandée par le parquert à l'audience. Pour nous, c'est une décision qui était attendue, c'est une décison positive car c'est la première fois qu'EDF est condamnée sur ce fondement."
De son côté, l'entreprise accueille cette décision avec surprise : "C'est tout de même assez surprenant au regard des réquisitions de la procureure de la Républque, déclare Marc Maroselli, avcocat d'EDF. Je dois m'entretenir avec les responsables d'EDF, mais nous nous orientons vers un appel de cette décision. Le sujet principal est de savoir si EDF est oui ou non responsable pénalement de ce qui s'est passé. Ce qu'EDF a contesté avec force."
Vendredi 17 septembre, trois jours après le jugement, EDF a confirmé sa volonté de faire appel par la voix de ses avocats, Mes Marc Maroselli et Hippolyte Marquetty.
La suite de ce dossier est désormais entre les mains de la cour d'appel de Bastia.
12 ans d'instruction
Ce premier jugement du tribunal d'Ajaccio intervient après douze ans d'instruction. Pour rappel, le 23 juillet 2009, deux incendies s'étaient déclarés à Fozzano et dans la vallée de l'Ortolo, ravageant plus de 4.000 hectares. Le vent fort avait notamment poussé les flammes du premier sinistre vers la commune d'Aullène, jusqu'au col de la Vaccia.
Pour les dizaines de parties civiles, parmi lesquelles plusieurs communes, l'office de l'environnement de la Corse, des particuliers et des sociétés, cette catastrophe écologique était de la responsabilité d'EDF. C'est ce qu'elles avaient expliqué le 1er et 2 juin lors de l'audience au tribunal d'Ajaccio.
Pour la partie civile, l'entreprise avait "manqué à ses obligations légales d'élagage d'arbres trop hauts sous les câbles". Ce qui aurait favorisé l'embrasement des champs à cause des étincelles. Pour étayer leur thèse, les avocats avaient mis en avant les "constatations matérielles des gendarmes" et "quatre témoins dans un gîte qui, tous, ont vu des câbles électriques en feu et des gouttes de feu tomber sur la végétation".
La défense d'EDF avait alors répondu qu'une "hypothèse n'est pas une preuve" et "qu'une addition de témoignages, ce n'est pas non plus une preuve".
Dans son réquisitoire, Carine Greff avait demandé la relaxe de l'entreprise en se basant sur ces mêmes arguments. "Oui, ça peut être électrique mais je n'ai que des scenarii, je n'ai pas de preuves", avait déclaré la désormais ex-procureure de la République d'Ajaccio.
Tous les éléments convergeaient vers cette responsabilité
Finalement, le tribunal aura retenu la responsabilité d'EDF. "Tous les éléments convergeaient vers cette responsabilité", a confié Jérôme Susini, l'un des avocats des parties civiles. Et d'ajouter : "c'est une première victoire d'étape."
En effet, la deuxième étape qui concerne les demandes d'indemnisation aurait dû être jugée le 2 mars 2022 devant la justice civile. Après l'appel d'EDF, tout doit être désormais réexaminé par la cour d'appel de Bastia.