Corse : la difficile place des architectes face aux projets immobiliers polémiques

La journée des architectes de Corse s’est tenue ce vendredi 26 mai à Ajaccio. Suite à la médiatisation de certains projets immobiliers polémiques, la profession peut parfois être mise à mal. Mais pour le conseil régional de l’ordre de la région, une seule ligne de conduite : le respect des devoirs et la responsabilité.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

À Ajaccio, dans une petite salle de la Citadelle, de jeunes architectes prêtent serment. Quelques minutes plus tôt, leur parrain, Jean-Christophe Quinton, de la profession, leur rappelle : l’architecture rend habitable le monde et elle n’a jamais cessé de répondre à cette mission.

Une mission plus ou moins facile en fonction des territoires. Et la région dans laquelle les jeunes professionnels ont choisi d’exercer ne cumule pas les plus évidents. En plus des problématiques liées à l’absence de documents d’urbanisme et à l’économie, les polémiques autour de projets immobiliers s’accentuent.

Après celle des “Hauts de Borivoli, à Sotta, est née, mi-mai, celle de la plage de Palombaggia, Paradisu di a Baia, à Porto-Vecchio. Tous les deux dénoncés et mis en lumière par le parti indépendantiste Core in Fronte, ils proposent des villas pouvant atteindre plusieurs millions d’euros et jusqu’à une plage privée pour le dernier.

“Il ne faut pas s’emballer”

Si en termes légaux les deux dossiers semblent différents, le premier dispose de permis de construire et non le second, les architectes, en tant que profession, peuvent parfois être pointés du doigt par la société civile ou des associations.

Présidente du conseil régional de l’ordre des architectes (CROA) de Corse, Sylvia Ghipponi, indique que son organisation a pris connaissance du second projet et en a débattu en interne. Mais aucun avis public du CROA de Corse ne sera donné. Sur le cas de Porto-Vecchio, elle précise néanmoins : aucun permis de construire n’a été déposé et on est encore au stade d’avant-projet donc on a toujours des doutes. On est plutôt une organisation professionnelle et on essaye de régler ce genre de questions entre nous avant de répondre publiquement.

Sylvia Ghipponi ajoute : On aurait pu être choqué qu’il y ait été écrit plage privée, ponton privé… Mais ce sont des plans qui peuvent être récupérés, des indications qui peuvent être ajoutées par les maîtres d’ouvrage. Ce n’est pas forcément l’architecte qui est responsable de tout. Il ne faut pas s’emballer. Je ne suis pas pour l’emballement médiatique, mais plus pour discuter, entre confrères, des difficultés auxquelles on peut être confrontés.

Un nécessaire “aggiornamento” de la profession ?

Il n’empêche que de tels projets peuvent apporter, directement ou indirectement, un discrédit à la profession. Un risque à éviter à tout prix pour la présidente du CROA de Corse. Notre métier n’est pas que de construire, mais d’être aussi responsable, de ménager notre territoire, de faire en sorte de ne pas participer à la financiarisation de la construction, à cette espèce de course financière. Tout ceci fait partie de nos devoirs”, appuie-t-elle.

Se pose aussi la question “de ce que l’on est en tant que profession”, complète Sébastien Celeri, ancien président du CROA de Corse. Il faut que l’on fasse notre aggiornamento… Se dire est-ce qu’on se dirige à être plus comme des ingénieurs et des techniciens ou alors, est-ce que l’on reste porteur d’un message de l’intérêt public ? Et ce dernier point c’est la loi qui le dit. Le petit groupe que nous sommes aujourd’hui [le conseil régional de l’ordre des architectes de Corse ndlr.], nous nous sommes plutôt rassemblés autour de cette vision-là des choses, c'est-à-dire la notion de l’intérêt public qui prime sur tout“, détaille-t-il.

Ouverture d’une formation à l’université de Corte

Des valeurs et des devoirs que les deux architectes comptent bien transmettre au sein d’une école d’architecture en Corse. Pour l’heure, aucun établissement de la sorte n’existe sur l’île et le projet est défendu de longue date.

Signe potentiel d’une évolution positive, une formation HMONP [Habilitation de Maîtrise d’Œuvre en son Nom Propre ndlr.] de 15 places ouvre ses portes à l’université de Corse, en partenariat avec l’école d’architecture de Versailles, en septembre 2023. C’est un pas important, car cette formation, la sixième année, nous permet de nous installer après en nom propre. C’est comme les avocats qui doivent après passer l’examen du barreau. Cette année, est l’année clef, car c’est une habilitation professionnelle et elle permet à de jeunes diplômés de rentrer travailler dans des agences ici. Donc c’est un pas, car le partenariat avec une école est déjà formalisé et on peut imaginer qu’elle génère une antenne par la suite”, soutient l’ancien président du CROA de Corse.

L’établissement permettrait ainsi aux étudiants et aux futurs architectes notamment de Corse d’être confrontés, très tôt, aux problématiques du territoire. Des problématiques qui existent partout ailleurs, sauf qu’en Corse, elles sont pires”, conclut-il.

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité