Les chiffres du rectorat de Corse indiquent clairement un essoufflement du mouvement de contestation né chez les enseignants après une rentrée scolaire compliquée. Plusieurs syndicats, dont le STC, n'ont pas appelé à la grève.
La gestion de la crise sanitaire dans l'Education Nationale fait les gros titres depuis plusieurs semaines. Et l'affaire "Ibiza", d'où Jean-Michel Blanquer, son ministre, a géré le protocole de rentrée, a encore tendu les relations entre la rue de Grenelle et les enseignants.
Pour autant, après une première journée de grève très suivie, en Corse comme ailleurs, le mouvement marque le pas, ainsi que le confirment les chiffres du rectorat, qui a comptabilisé le nombre de grévistes.
Un matin comme les autres
Ce matin, à 8h15, devant l'école Jean-Toussaint Desanti, à Bastia, rien ne témoignait d'un quelconque mouvement de protestation de la part du personnel. Les élèves du cours élémentaire embrassaient leurs parents et vont rejoindre leurs camarades dans la cour de récréation.
Aujourd'hui, aucun gréviste dans l'établissement. Un vrai changement par rapport à la semaine dernière, où le mouvement avait été très suivi.
Maeva, qui venait de déposer son fils et sa fille, avant d'aller travailler, n'était pas très inquiète. "Dans les journaux, dès hier, tout le monde avait l'air de dire que ça serait moins suivi. Et puis Bastia, c'est petit, on connaît tous un professeur des écoles, ou quelqu'un qui connaît un professeur des écoles. Et la tendance qui se dégageait, c'était plutôt une journée de classe normale..."
C'est effectivement le cas dans la plupart des écoles, collèges et lycées de l'île. Au collège de Luri, la semaine dernière, trois enseignants étaient en grève. Ce jeudi 20, personne. Au lycée Laetitia d'Ajaccio, on ne donne pas de chiffres, mais on reconnaît qu'il y a "très peu de grévistes".
De 52 % à 2 % de grévistes...
Le chiffres annoncés par le rectorat en début d'après-midi ont confirmé la tendance au niveau régional. 2,32 % d'enseignants du premier degré, et 6,2 % d'enseignants du second degré, ont répondu à l'appel. Bien loin des chiffres de la semaine dernière, où 51.82 % des enseignants avait fait grève dans le premier degré, et 37.87% dans le second.
Et pourtant. La Corse est, très marginalement certes, au-dessus des chiffres nationaux. Dans l'ensemble du pays, on comptabilise 1,15% de grévistes dans le premier degré, contre 38,48% le 14 janvier, et 2,18% dans le second degré, contre 23,73% la semaine dernière.
Pas d'appel à la grève pour le STC
L'appel à la grève de ce jeudi 20 janvier a avant tout pour but de maintenir la pression sur Jean-Michel Blanquer et le gouvernement. La semaine dernière, le ministre avait affirmé que 8.000 personnes seraient appelées en renfort dans les établissements, au moins jusqu'à la fin de l'année scolaire, et la mise à disposition de 5 millions de masques FFP2 pour les enseignants de maternelle, sur demande.
Si la FSU, CGT Educ'action, FO, Sud Education, la FCPE, première organisation de parents d'élèves, mais également plusieurs mouvements lycéens sont toujours mobilisés, d'autres ont passé leur tour, à l'image de SE-Unsa, Snalc et Sgen-CFDT. Peut-être résolues à voir si les promesses sont suivies d'actes.
En Corse, le STC, lui non plus, n'a pas appelé à suivre le mouvement. La raison, des revendications tous azimuts, qui brouillent le message. C'est ce que nous explique Jeanne Julien, déléguée du STC educazione : "Certains syndicats confondent une grogne légitime, par rapport à la gestion de la crise, et des revendications salariales. Et ce n'est pas une bonne politique. Bien sûr, nous sommes très peu payés, et nous avons des revendications de ce type. Mais tout mélanger ne peut mener à rien de bon".
Et puis il y a la réalité d'une situation qu'il convient de prendre en compte : "Appeler à la grève toutes les semaines c'est compliqué. Notre responsabilité, c'est de le faire pour de bonnes raisons. Il ne suffit pas d'appeler à la grève, il faut savoir qui suivra l'appel. Il y a de nombreux enseignants qui me disent "moi je ne peux pas, j'ai pas les moyens..." "
Certains syndicats le promettent, la baisse de mobilisation d'aujourd'hui n'est qu'une simple accalmie avant un redémarrage du mouvement dès la semaine prochaine...
"C'est ce qui se dessine, mais il faudra clarifier les choses, et appeler à la mobilisation sur du concret". La déléguée du STC n'en fait pas mystère : si ces conditions ne sont pas réunies, le syndicat nationaliste s'abstiendra, une nouvelle fois, de rejoindre le cortège.