Co-officialité du Corse, amnistie des prisonniers "politiques", statut de résident: Manuel Valls a de nouveau rejeté lundi les demandes les plus symboliques des dirigeants nationalistes corses à l'occasion de sa première visite comme Premier ministre dans l'île.
Très attendue, et malgré ces désaccords persistants, sa visite s'est déroulée dans une ambiance plutôt sereine, illustrée notamment par l'hommage unanime rendu à l'ex-Premier ministre Michel Rocard. Sa mémoire a été saluée à l'Assemblée de Corse par une minute de silence avant que les dirigeants nationalistes de l'île Jean-Guy Talamoni et Gilles Simeoni, puis le Premier ministre Manuel Valls, ne prennent la parole.
"Il y a des lignes rouges"
Tour à tour, le président indépendantiste de l'Assemblée de Corse Jean-Guy Talamoni et le président autonomiste du conseil exécutif Gilles Simeoni ont renouvelé devant le Premier ministre les demandes qu'ils font depuis leur victoire en décembre et notamment les plus emblématiques, sur le statut de résident, la co-officialité de la langue corse et l'amnistie des prisonniers "politiques".
"Ces revendications sont pour nous essentielles. En nous élisant, les Corses nous ont donné mandat de défendre ces revendications, de les porter", a résumé Jean-Guy Talamoni."Votre gouvernement est le premier depuis 40 ans qui visite la Corse dans un contexte aussi apaisé", a-t-il souligné: "il y a un temps pour le conflit et un temps pour la paix. Ce temps est venu. C'est aujourd'hui le bon moment, celui qu'il ne faut pas laisser passer".
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Mais sur les trois points les plus emblématiques, Manuel Valls a réitéré ses refus: "Nous avons démontré par nos échanges et notre travail que des résultats étaient possibles. (...). (Mais) il y a des lignes rouges, vous le savez. L'affirmation de l'identité corse ne passera pas par l'exclusion, la co-officialité de la langue ou le statut de résident", a-t-il dit.
Dans son discours devant l'Assemblée de Corse, le chef du gouvernement a toutefois annoncé plusieurs mesures en faveur de l'île de Beauté, dont la création d'une agrégation en corse, la mise en place d'une "chambre des territoires" à Bastia dans le cadre de la nouvelle collectivité unique de Corse, ainsi que sa volonté de "prolonger" des régimes fiscaux dérogatoires valables en Corse pour lutter contre la hausse des prix de l'immobilier local.
Agrégation de "langue et culture corses"
"La République a une seule langue officielle, le français, car elle est pratiquée par tous. Nous ne reviendrons pas bien sûr sur ce principe", même si elle "reconnaît, aussi, pleinement la langue corse, ciment de votre culture", a poursuivi le chef du gouvernement, dont le discours devant l'Assemblée de Corse a été peu applaudi.
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La collectivité unique au 1er janvier
La collectivité unique qui remplacera l'actuelle et les deux départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse entrera bien en vigueur au 1er janvier 2018 et sera dotée d'une "chambre des territoires" demandée par de nombreux élus corses, même si celle-ci "ne doit pas remettre en cause le principe d'une collectivité unique", a-t-il également rappelé. Enfin, concernant l'arrêté Miot, qui réduit l'impôt sur les successions en Corse, malgré la "contrainte constitutionnelle" du principe d'égalité entre les citoyens français, "j'ai la conviction qu'une voie juridique existe pour prolonger le régime dérogatoire spécifique", a dit Manuel Valls.
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Le désaccord demeure
"Quand il y a des difficultés ce n'est pas seulement à cause de l'Etat. Quand ça va bien ce n'est pas seulement grâce aux institutions corses", a encore lancé Manuel Valls, avant de conclure un discours peu applaudi.
"Il y a eu des avancées techniques mais, au plan politique, le gouvernement n'a pas su donner la dimension attendue et espérée pour construire une véritable solution politique", a regretté Gilles Simeoni.Même écho chez Jean-Guy Talamoni qui, tout en reconnaissant que "certaines questions (avaient) évolué favorablement" a déploré que "d'autres questions (n'aient) pas du tout évolué". "Le désaccord demeure ainsi total sur la question des prisonniers politiques et le chemin sera long pour arriver à un accord", a-t-il conclu.