En campagne avec Gilles Simeoni : "Je ne suis pas là pour faire plaisir à mes amis"

Pendant la campagne des élections territoriales nous vous proposons une série de reportage en immersion sur le terrain avec les candidats. Premier épisode de notre série : le Nebbiu et la Conca d'Oru, dans le sillage de la liste Fà populu inseme. 

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"Je me serais bien reposé un jour avant d'attaquer le sprint final", sourit Gilles Simeoni, alors que les clients la brasserie Santa Maria, au cœur de Patrimonio, s'étonnent de le voir battre campagne en ce lundi de Pentecôte. "Mais il faut être mobilisés en permanence, pour ces territoriales". 

D'un geste, le leader de la liste Fà Populu Inseme, costume gris et baskets, fait signe au serveur de servir la terrasse, et s'assoit. Jean-Charles Giabiconi, maire de Biguglia, s'est invité à une table voisine. 

Une douzaine d'autres colistiers discutent, par petits groupes, au bord de la route, sous un ciel menaçant. Il est un peu plus de 9 heures, la journée de campagne débute tranquillement.

Battre la campagne, plus que jamais

Juliette Ponzevera fait la navette entre les uns et les autres, exposant le programme de la journée. Candidate malheureuse aux municipales à Saint-Florent, celle qui a pris la tête de l'Office Public de l'Habitat de la Collectivité de Corse en janvier dernier est également la régionale de l'étape. C'est donc elle qui supervise la tournée du Nebbiu et de la Conca d'Oru. 

"C'est compliqué, une campagne comme celle-là. Il faut faire en permanence avec les contraintes sanitaires, on ne peut plus organiser de réunions publiques... Alors on va à la rencontre des gens, de village en village. Plus encore que d'habitude". 

Alex Vinciguerra, costume sombre et chevelure blanche, lui, ne voit pas vraiment la différence. Le président de la CADEC, qui discute quelques mètres plus loin avec Anne-Laure Santucci, la maire de Luri, est à une très convoitée troisième place sur la liste. Mais c'est la première fois qu'il prend part à une campagne. Il est novice en politique.  

Venir sur le terrain, c'est ce qui va permettre de construire une réponse aux problèmes économiques.

Alex Vinciguerra

Le monsieur "économie" du projet de Gilles Simeoni se prête au jeu avec plaisir, il l'assure. Et il n'est pas frustré de ne pouvoir exposer en profondeur ses idées à la tribune. 
"Je pense que voir les gens et ressentir les besoins du terrain, c'est essentiel. Vous pouvez construire tous les plans que vous voulez, si ça reste conceptuel cela n'a pas de sens. Venir au niveau du terrain et entendre les besoins qui s'expriment, c'est ce qui va permettre de construire une réponse". 

Prendre le pouls 

Pour l'heure, la conversation, avec les habitués du bar, tourne plutôt autour de la météo et du déconfinement que du PTIC. Mais l'occasion est trop belle de glâner quelques informations sur la visite de Laurent Marcangeli. Deux jours plus tôt, c'est le maire d'Ajaccio, présenté comme le principal concurrent du sortant, qui venait à la rencontre des électrices et des électeurs de la région. A en croire un sympathisant, "il n'y avait pas grand monde". On ne saura pas si c'est vrai, ou si c'est histoire de mettre Gilles Simeoni dans les meilleures dispositions pour une journée qui s'annonce longue....

Ce n'est pas la Corse des nationalistes que je veux construire. Je ne suis pas là pour faire plaisir à mes amis.

Gilles Simeoni

Un peu plus loin, l'un des clients, la soixantaine taquine, fait semblant de s'étonner que le maire-adjoint de Patrimonio, Jean-Baptiste Arena ne soit pas là pour accueillir Gilles Simeoni, son ancien binôme aux législatives de 2012. Jean-Baptiste Arena qui, depuis longtemps, a rejoint les rangs de Core in fronte. Et mène campagne de son côté, pour ces territoriales, en troisième position sur la liste Da per noi...  

Reste que les antagonismes politiques n'expliquent pas tout : le viticulteur avait ainsi accepté quelques jours plus tôt de saluer l'équipe de Laurent Marcangeli et de poser pour la photo du candidat de droite.  

Après le café du matin, direction une ou deux caves viticoles, un passage obligé dans le Nebbiu. "Si on commence à nous faire goûter le vin, on est morts", s'amuse un colistier. 

Au fil des pérégrinations, quelques-uns tentent de profiter du passage du candidat pour faire entendre leurs doléances. Et espèrent être introduits auprès de Gilles Simeoni par une connaissance en bonne place sur la liste... Le quotidien d'un candidat en campagne. Un sourire, quelques mots échangés, plus ou moins longuement selon l'objet de la demande, parfois un échange de numéros. Et enfin, la promesse de "regarder le dossier", selon la formule consacrée.

En terrain allié

L'équipe est attendue à Oletta. Juliette Ponzevera fait de son mieux pour tenir le planning, mais ce n'est pas gagné. Quelques gouttes de pluie lui viennent en aide. Le leader de Fà Populu Inseme donne le signal du départ de Patrimonio : "Bon, on y va avant qu'il se mette à neiger ?"

Devant la mairie d'Oletta, Jean-Pierre Leccia accueille chaleureusement Gilles Simeoni, entouré d'une partie du conseil municipal. Le maire de la commune, figure de la droite insulaire, a également reçu Laurent Marcangeli deux jours plus tôt, mais il ne cache pas ses préférences : 

"Une mandature ne peut être parfaite, mais vous avez réalisé pas mal de choses, et la commune se félicite de la manière dont elle a été traitée. Nous avons trouvé un écho favorable auprès de vous. Vous êtes soucieux du développement de la Corse et de ses territoires, et on fera tout pour vous aider". 

La journée prend un tour plus politique. Face aux élus, abrités de la pluie sous les terrasses de la mairie, Gilles Simeoni promet que le mandat qui s'annonce sera celui de "la concrétisation, rapide, du projet que nous portons"

Mais il sait que son auditoire, s'il est bien disposé, n'est pas forcément totalement acquis à sa cause. Il sait également qu'il y a eu des déceptions, et que les attentes sont fortes. Alors il s'empresse de rajouter : "Il faut faire mieux, je sais qu'il y a beaucoup de choses à améliorer. Mais les cinq ans écoulés ont été difficiles, avec le lourd passif financier de nos prédécesseurs, la fusion des départements, la nouvelle collectivité de Corse, et puis bien sûr l'épidémie de Covid. Je ne veux pas m'exonérer, mais croyez-moi, on a beaucoup travaillé". 

On fera tout pour vous aider.

Jean-Pierre Leccia

L'occasion, une nouvelle fois, de tenter de rassurer celles et ceux qui ne sont pas forcément du même bord. "Ce n'est pas la Corse des nationalistes que l'on veut construire. Je ne suis pas là pour faire plaisir à mes amis. (...) Et la constitution de la liste le prouve, qui reflète la volonté de rassemblement des compétences de toute la Corse". 

Choisir la démocratie

S'invite alors dans la discussion la question, récurrente, de la violence et des rapports entre la CdC et l'etat, régulièrement tendus durant la mandature"Quelle que soit l'attitude de l'Etat, on ne peut avancer que par la démocratie. Et ce sera toujours comme ça. Je ne cherche pas le conflit avec l'Etat, je demande juste qu'on respecte la Corse et les Corses", affirme Gilles Simeoni. 

Alors que l'heure du déjeuner approche, la conclusion revient à Michel Castellani, militant de la première heure et député de Haute-Corse. S'il n'est pas sur la liste, il tient à renouveler une nouvelle fois tout son soutien inconditionnel au leader de Femu. "Moi, je ne vous demanderai pas de vous transformer en agents électoraux, mais d'être des citoyens lucides. Cette élection est très importante. Et quand on connaît Gilles et qu'on connaît sa capacité de travail et son honnêteté maladive, il ne faut pas hésiter à voter". 

Le cortège se met en route vers un restaurant de Poggio d'Oletta, la prochaine étape de cette tournée du Nebbiu et de la Conca d'Oru. De quoi reprendre des forces avant de mettre le cap vers Santu Petru di Tenda, Murato et Saint-Florent. 

 

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