Le garde des Sceaux était accusé par un syndicat de magistrats de s'être immiscé dans la gestion par Marie-Laure Piazza, qui préside la cour d'Appel de Cayenne. La magistrate et Eric Dupond-Moretti avait eu maille à partir, en 2016, alors qu'elle présidait la cour d'assises de Haute-Corse.
La plainte qui avait été déposée par l'USM, l'Union Syndicale des Magistrats pour "prise illégale d'intérêts" a été classée par la Cour de Justice de la République, la seule institution habilitée, en France, à poursuivre des membres du gouvernement.
Selon la CJR, "l'infraction était insuffisamment caractérisée". Ses avocats n'ont fait aucun commentaire.
"Relations délétères"
Eric Dupond-Moretti était accusé par l'USM d'avoir mis à profit son rôle de ministre de la Justice pour demander en juillet 2021 "un examen de situation" de la cour d'appel de Cayenne, "afin d'appréhender notamment les répercussions" de son organisation "sur la santé des magistrats et des fonctionnaires".
Le syndicat de magistrats avait pointé du doigt au Figaro, en mars dernier "les relations délétères" entre Eric Dupond-Moretti et Marie-Laure Piazza, la magistrate qui préside cette cour d'appel. Une relation qui "était de nature à empêcher, en raison d'un conflit d'intérêts, tout acte" du ministre concernant le management de la cour d'appel de Cayenne", selon l'USM.
En 2016, alors que Marie-Laure Piazza présidait la cour d'assises, à Bastia, Eric Dupond-Moretti, avocat de l'un des accusés d'un procès, avait en effet remis en cause sa manière de mener les débats, et "lui avait publiquement reproché de faire pression sur les jurés". l'avocat avait alors été sanctionné d'un rappel à la loi.
Précédents
Ce n'est pas la première fois qu'Eric Dupond-Moretti est accusé de "prise illégale d'intérêts", depuis sa nomination à la Chancellerie. Le 16 juillet dernier, à l'issue d'une audition de six heures, il était mis en examen, soupçonné d'avoir profité, déjà, de son portefeuille pour demander des enquêtes administratives, et régler ses comptes avec certains magistrats... Le ministre, entendu à plusieurs reprises, a répété qu'il n'avait fait que "suivre les recommandations de (son) administration".
Le 15 avril dernier, après plusieurs mois d'enquête, les magistrats instructeurs de la Cour de justice de la République ont clos leurs investigations. Le ministère public dispose désormais de trois mois pour rendre ses réquisitions, tandis que les avocats de la défense ont un mois supplémentaire pour émettre des observations.
Cette mise en examen est une première pour un garde des Sceaux.