Pédocriminalité : "la Corse est-elle une région qui protège ses enfants ?"

La caravane Mouv'Enfants traverse la Corse, toute la semaine, pour rencontrer les professionnels qui luttent contre la pédocriminalité, recueillir leur expérience et leurs besoins, et faire un bilan de la situation. Aujourd'hui, elle était à Bastia.

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Laetitia est assise sur l'un des sièges sur lesquels prennent place, habituellement, les jurés des procès d'assises. Les débats ont débuté depuis près de deux heures lorsqu'elle prend la parole : "J'ai été victime d'inceste, il y a une trentaine d'années. Je suis allé porter plainte, et un gendarme est venu prendre ma déposition à domicile. Je n'ai pas pu prononcer un mot. J'étais dévastée".

Les victimes parleront quand on les écoutera

Laetitia

Des années après, le traumatisme est encore présent. "On doit vivre avec la honte. Mais la honte, elle doit changer de camp. Et pour cela, il faut que la parole se libère. Mais elle ne peut se libérer que si les gens arrêtent de baisser la tête, de détourner le regard. Les victimes parleront quand on les écoutera. Il y a un enfant sur dix qui est victime d'inceste. Forcément, autour de chacun de nous, il y a une victime qui ne parle pas".

Une cause nationale, mais avec quels moyens ?

Face à la femme brune, emmitouflée dans une large écharpe à carreaux, des éducateurs, des psychologues, des magistrats, des associations, des pédopsychiatres, des gendarmes, réunis à l'occasion de cette première journée d'une semaine de rencontres en Corse, à l'occasion de la venue sur l'île de la Caravane Mouv'enfants.

Tous sont confrontés, parfois au quotidien, à la détresse d'enfants victimes de pédocriminalité. Selon les chiffres du conseil de l'Europe, un enfant sur cinq est victime de violences sexuelles. Et la Corse n'est pas épargnée, même si l'on peine à connaître les chiffres. 

Ces professionnels luttent, avec les moyens mis à leur disposition, contre ce fléau. Et Cette journée, organisée dans la salle des assises du palais de justice de Bastia, c'est l'occasion pour eux de partager leurs expériences, de confier leurs doutes, de pointer du doigt les problèmes auxquels ils doivent faire face, malgré le fait que la protection de l'enfance a été inscrite au rang des grandes causes nationales du quinquennat Macron.

Protéger ses enfants

Derrière leur engagement, presqu'un sacerdoce pour certains, peine à se dissimuler la fatigue, le découragement qui menace, les déceptions...

"La motivation des professionnels, sur le terrain, est plus forte que jamais. Mais le manque de moyens est évident. Il y a des choses qui pourraient fonctionner, il y a des bonnes volontés de part et d'autre, mais il faut donner, enfin, les moyens aux territoires et aux professionnels de protéger les enfants. C'est ça, la question qui se pose : la Corse est-elle une région qui protège ses enfants ?" résume Paule Maerten, la coordinatrice Corse Stratégie Santé Sexuelle, qui coordonne la venue de la caravane en Corse.

Après la matinée d'échanges, l'après-midi sera consacré à des ateliers, autour des trois axes martelés par la caravane Mouv'Enfants : prévenir, protéger, réparer. 

Demain mardi, elle sera à Corte, sur le campus Grimaldi, mercredi à Porto-Vecchio, à la maison de la justice et du droit, et jeudi à Ajaccio, dans la salle d'audience civile du tribunal judiciaire. 

Et vendredi, à l'hôtel Campo dell Oro, à 9 heures, sera livrée une restitution de l'ensemble des travaux de la semaine. Selon Paul Maerten, elle "servira à faire remonter les problèmes rencontrés sur le terrain, et les besoins du professionnel. L'objectif, c'est d'obtenir, enfin, l'engagement des institutionnels. Il est aujourd'hui urgent de passer de la réflexion aux actes".

160.000 enfants victimes de violences sexuelles en France chaque année ; 80 % des agressions sexuelles sur mineur ont lieu au sein de la famille ; 6 victimes sur 10 ne sont pas soutenues lorsqu'elles parlent ; 50 % des victimes font une tentative de suicide...

Il est urgent de passer de la réflexion aux actes.

Les chiffres, effrayants, le prouvent douloureusement.

Entretien avec Arnaud Gallais, co-fondateur de Mouv'Enfants et membre de la CIIVISE, Commission Indépendante sur l'Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants.

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Arnaud Gallais, cofondateur de Mouv'Enfants, à Oghje. ©FTV

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