La saison 2023 s'annoncerait plus incertaine que l'an passé pour les hôteliers corses. Ces derniers dressent ainsi un bilan d'avant-saison en demi-teinte. En cause, notamment, une concurrence importante d'autres destinations touristiques moins onéreuse, et des meublés de tourisme toujours plus nombreux.
Après une année 2022 record, 2023 sera-t-elle une saison noire pour les hôteliers ? Au Sud Hôtel, à Bastia, les premiers chiffres de l’avant-saison n’augurent en tout cas rien de bon : "On a une baisse de 15% sur le mois d'avril, et 10% sur le mois de mai", détaille Joseph Bourgeois, le propriétaire.
Une tendance qui se confirme dans les premières remontées faites par les hôteliers à l’Union des Métiers et des industries de l’Hôtellerie : en mai, les professionnels corses déclarent une baisse de leur taux d’occupation de -27 à -55%.
Les chiffres attendus pour août en se basant sur le nombre de réservations sont également inquiétants : les hôteliers anticipent une chute de -31 à -78%.
Des destinations touristiques concurrentes moins chères, et des meublés de tourisme toujours plus nombreux
Les séjours de dernière minute pourraient faire mentir ces prévisions. Problème, la Corse souffre du retour de la concurrence d’autres destinations, inaccessibles l’an dernier à cause du COVID.
"Le problème, c'est que cette année, la plupart des Français continentaux ont été sur des destinations plutôt méditerranéennes, notamment, et donc des destinations concurrentes de la Corse, constate Joseph Bourgeois. Et cela à des prix qui sont quand même assez accessibles, puisqu'inversement la Corse reste assez prohibitive au niveau de l'offre de transport."
Autre facteur pouvant expliquer la méforme du secteur hôtelier : la concurrence des logements type Airbnb, Booking ou Abritel. L’hôtellerie classique propose 147.000 lits en Corse. Soit environ 20% de moins que les meublés de tourisme, et leurs 181.000 lits déclarés. Un chiffre en augmentation de 13% par rapport à l’an dernier.
Des hébergements qui ont moins de contraintes que les hôtels classiques et sont aussi souvent moins onéreux. "Je pense que les Airbnb posent un peu un problème, glisse Julia Jambert, responsable de réception d'un établissement bastiais. Avec l'inflation, les gens se tournent vers des hébergements moins coûteux, donc forcément l'hôtellerie est impactée."
De nouveaux comportements des vacanciers
Mais l’augmentation continue des locations de meublés de tourisme ne s’expliquerait pas seulement par le contexte économique. Elle pourrait être liée à un changement de comportement plus profond des vacanciers.
"C'est un phénomène de fond qui avait déjà commencé à être observé avant la crise sanitaire, et qui se renforce d'années en années, analyse ainsi Sauveur Giannoni, maître de conférences en économie à l'Université de Corse. Aujourd'hui, je pense qu'on arrive à un moment où les professionnels sont de plus en plus préoccupés. Mais je ne ferais pas pour ma part de lien direct avec l'inflation."
Fragilisé, le secteur de l’hôtellerie espère limiter les dégâts en juillet et août. Une haute saison souvent décriée dans la société insulaire, interrogée dans le débat politique, mais toujours indispensable pour les professionnels du tourisme.