Deux hommes condamnés à des peines allant jusqu’à 8 mois de prison ferme suite à leur interpellation à Calvi avec une arme à bord d’un véhicule blindé

Yohann Campanini et Lucas Tocheport comparaissaient ce lundi devant le tribunal correctionnel de Bastia pour infraction à la législation des armes. Les deux jeunes hommes ont été respectivement condamnés à huit et six mois de prison ferme.

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Une "erreur extrêmement regrettable", et une soirée festive qui a rapidement tourné court : Yohann Campanini, 27 ans, et Lucas Tocheport, 24 ans, ont eu à s’expliquer, ce lundi 26 août, devant le tribunal correctionnel de Bastia, respectivement pour des faits de transport et détention d’arme, et de transport d’arme et usurpation d’identité.

L'affaire remonte au 17 juillet dernier. Il est alors aux environs de 18h10, quand un Range Rover stationné en warning sur le bas-côté de la route, aux environs de Calvi, attire l’attention d’agents de la douane. À l'avant, les deux jeunes hommes en question.

Le véhicule est fouillé. À l’intérieur, les forces de l’ordre découvrent une sacoche, dans laquelle est rangée une arme de catégorie B - un pistolet semi-automatique, accompagnée de son chargeur et de cinq cartouches – non-chambrées.

Une arme prise "par anxiété"

Immédiatement placé en garde à vue, Yohann Campanini reconnaît avoir été le seul conducteur du véhicule. La voiture lui aurait été prêtée par un ami pour "profiter" de sa dernière semaine de vacances sur l’île. Quant à l’arme, affirme-t-il, elle lui appartient. Son achat remonte à "un an et demi ou deux", et il ne dispose pas de permis.

S’il voyageait avec son arme à feu, ce jour-là, alors qu’il se rendait à une soirée avec des amis, c’est en raison de son anxiété, se justifie-t-il. Un trouble relatif à sa vie professionnel : depuis plusieurs années, il occupe au Gabon un poste au sein d'un établissement de jeux.

Or, les faits divers de violence y sont nombreux, et son travail est encadré par des militaires pour sa sécurité. À cela s’ajoute des rumeurs de potentielles menaces à venir avec la tenue des Jeux Olympiques, glisse-t-il… Résultat, de retour en Corse pour un mois, il a pris son arme avec lui "sans trop réfléchir". Un pistolet qu’il garde habituellement caché dans une cabane près de chez sa mère, où il loge le temps de ses congés.

Je ne savais pas que le véhicule était blindé. Pour moi, c’était juste une jolie voiture pour me déplacer, c’est tout.

"Vous vivez au quotidien dans un endroit qui est un peu plus "chaud" [le Gabon, ndlr], et vous arrivez dans un espace plus tranquille [la Corse, ndlr], et là, vous vous dites, il faut que je sorte avec une arme ? s’interroge le président, Philippe Bergeron. Comprenez que tout cela pose question."

"Je n’ai pas réfléchi", se défend le jeune homme, qui l’assure : sortir avec une arme était, bien loin d’une habitude de sa part, une action "totalement épisodique". "Vous vous sentez menacé en Corse ?", insiste-t-on du côté des juges, pointant le choix du modèle de transport, un véhicule blindé. "Non. Je ne savais pas que le véhicule était blindé. Pour moi, c’était juste une jolie voiture pour me déplacer, c’est tout. Et l’arme, c’était une erreur regrettable."

"Une erreur, ce n’est pas quelque chose qui vous envoie de manière générale en correctionnelle, le corrige le président Bergeron. Sortir de chez vous en portant une arme, ce n’était pas une erreur. C'était un choix."

Usurpation d’identité

Pour Lucas Tocheport, la situation est un peu différente : également placé en garde à vue, le jeune homme fournit aux enquêteurs une fausse identité, celle de son frère jumeau. Un mensonge rapidement mis au jour, avec l’analyse, notamment, de ses empreintes digitales.

La raison de cette usurpation d’identité : déjà mis en examen par un juge d'instruction de la juridiction spécialisée de Marseille dans un dossier de "tentative d'incendie en lien avec une association de malfaiteurs", il est placé depuis janvier 2023 sous contrôle judiciaire, et n'a dans ce cadre pas l'autorisation de séjourner sur l'île.

Interrogé sur ce point à la barre, le jeune homme reconnaît avoir violé cette interdiction. Assigné à la résidence parisienne de son père, avec lequel il ne s’entend plus, il est revenu en Corse pour retrouver "sa famille, ses amis, et sa compagne". Il avait d’ailleurs fait une demande de changement de résidence auprès d’un juge pour officialiser la démarche, mais celle-ci avait été refusée.

Lucas Tocheport l’assure : il n’a jamais eu, avant la fouille, connaissance de l’existence de l’arme. Ce 17 juillet, il avait uniquement l’intention de retrouver des amis pour boire un verre, rien de plus.

Le soupçon de faits "plus graves et d’une rencontre qui n’est pas festive"

Un argumentaire qui ne convainc pas le représentant du ministère public. Pour ce dernier, la présence des deux jeunes hommes dans un véhicule blindé soulève déjà de nombreuses questions.

Certes, entame-t-il, "le nombre de véhicules blindés en Corse est un peu supérieur à la moyenne nationale, c’est une particularité insulaire. Mais cela reste quand même assez rare, et réservé à une partie de la population que chacun connaît", dans un milieu "que l’on connaît parfaitement".

"On nous dit que ces deux personnes se retrouvent, comment, on ne sait pas, et on ne le saura peut-être jamais, pour aller faire la fête, et cela dans un véhicule blindé. Monsieur Tocheport a des antécédents qui sont quand même particulièrement significatifs de son comportement au sein de la société. Et on retrouve dans la voiture une arme de poing approvisionnée. Et tout cela tout à fait par hasard", ironise le procureur.

On retrouve dans la voiture une arme de poing approvisionnée. Et tout cela tout à fait par hasard.

Lui voit dans tous les "indices et réponses fournies par ces personnes" l’existence possible de faits "plus graves et une rencontre qui n’est pas festive". Yohann Campanini, rappelle-t-il, a reconnu la possession, la détention et le transport de cette arme. Le représentant du ministère public demande ainsi une peine de 2 ans d’emprisonnement avec maintien en détention.

Pour Lucas Tocheport, "il y a une co-action de deux personnes dans ce véhicule pour le transport de cette arme, qui se trouvait dans la poche centrale", note-t-il. Dans ce cadre, et "compte tenu de la gravité du fait, du contexte, de la condamnation précédente et du non-respect du contrôle judiciaire", le procureur requiert à son encontre une peine de 3 ans de prison, avec maintien en détention.

Un dossier "extrêmement simple" pour la défense

Pour Me Nathalie Aïrola, conseil de Yohann Campanini, les réquisitions sont "extrêmement sévères, pour un jeune homme de 27 ans qui jusqu’au 17 juillet n’avait jamais fait de garde à vue." Plus encore, laisser planer l’idée que dans ce dossier, "il y aurait plus qu’un transport et une détention d’arme, ce n’est pas acceptable."

À l’inverse, ce dossier, estime-t-elle "est extrêmement simple. Monsieur Campanini a reconnu la propriété de l’arme, a répondu à toutes les questions. Il n’a rien à cacher, ce n'est pas un voyou, c’est un travailleur, et il assume ses choix qui sont extrêmement regrettables."

Dans cette situation, l’avocate appelle à une peine aménagée sous surveillance électronique.

Me Antoine Giudici, conseil de Lucas Tocheport, enjoint de son côté à la relaxe pour son client. Une décision motivée par l’absence d’éléments qui pourraient prouver, détermine-t-il, que le jeune homme avait la connaissance de la présence de l’arme dans la voiture.

La relaxe également pour les faits d’usurpation d’identité, insiste l'avocat, dont l’infraction découle dans ce dossier directement des faits de transport d’arme, et ne serait dans ce cadre plus caractérisée.

Jusqu’à 8 mois ferme

Des demandes entendues pour partie par le tribunal correctionnel : après une heure de délibération, Yohann Campanini a été déclaré coupable de transport et détention d’arme, et condamnée à 18 mois d’emprisonnement, dont 10 mois assortis d’un sursis simple.

Les 8 mois restants seront aménagés sous détention à domicile par le biais d’une surveillance électronique, indique le président. Le jeune homme se voit également interdit de port d’arme pendant 10 ans, et son arme est confisquée.

Lucas Tocheport est lui relaxé pour les faits de transport d’arme, mais condamné pour usurpation d’identité à une peine de six mois de prison aménagée en détention à domicile.

Des peines dont se satisfont leurs avocats. Ils ne comptent pas faire appel.

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