Jusque-là, les mariages entre musiques urbaines et langue corse n'étaient pas très heureux. Mais "Je m'en sors", la collaboration entre Djone et Fabrice Andreani, est une vraie réussite. Nous les avons rencontrés.
Fabrice Andreani a hésité avant d'accepter la proposition de Djone. Il le reconnaît. "C'était très casse-gueule. Un projet comme celui-là, ça se se joue sur un fil. On peut vite basculer dans le cliché".
Djone, ou Jonathan Paldacci, que tout le monde appelle John (CQFD), acquiesce : "la rencontre était improbable, c'est vrai. Sur mon premier album, j'avais très envie d'avoir un featuring en langue corse. Je suis dans les musiques urbaines mais je n'oublie pas d'où je viens. Et j'ai tout de suite pensé à Fabrice. Il fait partie des artistes pour qui j'ai beaucoup de respect et d'admiration".
Tu fais un pas vers moi, je fais un pas vers toi.
Fabrice Andreani
Les deux musiciens se connaissent depuis longtemps. Mais quand Djone a demandé à Fabrice Andreani s'il voulait apparaître sur le morceau de Trap qu'il était en train de composer, ce dernier l'a regardé avec des yeux ronds. Jamais entendu parler.
La rencontre de deux mondes
Il faut dire que l'univers de Fabrice Andreani, plus de vingt-cinq ans de carrière au compteur, avec I messageri et Barbara Furtuna, est plutôt éloigné de ce courant musical dérivé du rap du sud des Etats-Unis...
"Il m'a fait écouter des trucs à lui, complètement barrés ! John n'a pas de cran de sûreté, il s'autorise tout", se rappelle Fabrice Andreani dans un éclat de rire. "Mais on a échangé, et je me suis dit "pourquoi pas ?" L'idée c'était de faire chacun un pas vers l'autre. On devait juste prendre le temps de mettre le curseur au bon endroit".
Le résultat, une chanson, Je m'en sors, disponible depuis vendredi 21 janvier.
Le morceau, sur des sons hip-hop, mêle les deux voix, et figure une discussion entre deux enfants de l'île. "Une rencontre, pas une confrontation. Nos univers paraissent éloignés, et pourtant, ils se rejoignent. John est Corse autant que moi. Il vit sa Corse à lui, je vis la mienne. Et c'est ça qui est beau".
John qui, pour la première fois, chante quelques mots en langue corse sur le refrain. "Ca, encore aujourd'hui, quand je l'entends, ça me surprend !" s'amuse le musicien.
Vivre sa Corse, et la raconter
Le mélange des sons, des influences, des cultures, qui aurait pu sembler artificiel, est d'une grande sobriété. Et sert le morceau, et le propos. "On ne voulait pas jouer sur les contrastes, on recherchait un équilibre. Je voulais montrer que les deux styles musicaux ne sont pas incompatibles l'un avec l'autre. Que la tradition et la modernité peuvent donner quelque chose d'intéressant", raconte Djone.
"Ce genre de grand écart est possible, tant que l'on se sent à l'aise, et que c'est fait pour de bonnes raisons", conclut Fabrice, ravi de l'expérience.
Dans quelques mois sortira le premier album de Djone, dont Je m'en sors est le premier extrait. Son titre, Bipolaire. Tout un programme.