"La Corse n'est pas condamnée à subir une vie violente", Hélène Davo installée à la tête de la Cour d'appel de Bastia

L'audience solennelle d'installation d'Hélène Davo aux fonctions de Première présidente de la Cour d'appel de Bastia s'est tenue ce vendredi. Ex-conseillère de justice d'Emmanuel Macron, sa nomination avait suscité la polémique en juin dernier.

"La vie judiciaire a ses rites. Nous y sommes aujourd'hui, dans nos robes ourlées d'hermine." Difficile de trouver un siège de libre dans la salle des assises du Palais de justice de Bastia, ce vendredi 23 septembre après-midi.

C'est face à une salle comble qu'Hélène Davo a prononcé le discours inaugural de son installation en tant que Première présidente de la Cour d'appel de Bastia.

Au premier rang, plusieurs invités d'honneur : Charlotte Caubel, secrétaire d'Etat chargée de l'enfance, Nicole Belloubet, ex garde des Sceaux, et surtout Eric Dupond-Moretti, actuel ministre de la Justice. Également présents, des membres du Conseil supérieur de la magistrature, des chefs de cour, ou encore le procureur général de Paris, et quelques élus insulaires, tels que Pierre Savelli, maire de Bastia, et Ange-Pierre Vivoni, maire de Sisco et président de l'association des maires de Haute-Corse.

"Au-delà des symboles parfois désuets, les audiences solennelles sont un moment quasiment unique dans notre République, un moment privilégié de rencontres et d'échanges avec tous ceux qui accompagnent la justice", sourit Hélène Davo. Un rite qui prend un écho particulier en Corse, poursuit-elle, "terre de rituel, de cortèges, de fêtes aussi pour conjurer le passé, affronter le présent et convoquer l'espoir."

"Notre justice et votre île, la mienne aussi par adoption désormais, si vous me le permettez, doivent se retrouver pour résoudre ensemble les problèmes qui encore trop souvent troublent nos vies", tranche-t-elle. La magistrate le répète : "la Corse n'est pas condamnée à subir une vie violente, elle peut choisir une vie prospère."

Ainsi, face "à la délinquance et à la criminalité organisée, face au trafic de drogue et aux dérives mafieuses", Hélène Davo prône une "tolérance zéro de l'Etat". "Dans les fonctions qui sont désormais les miennes, je veillerai que la justice ait les moyens d'adapter sa réponse [...], je ferai tout pour que les jugements soient rendus avec confiance et sérénité."

Une justice proche de ces justiciables

La magistrate poursuit : "Je ne vous présenterai pas aujourd'hui un programme déjà bouclé. J'ai tant à apprendre et à comprendre. Mais je vous fais deux engagements : écouter, pour toujours mieux comprendre et je l'espère nous faire entendre, et poser des choix, les expliquer et les assumer."

Hélène Davo promet ainsi une présidence à la tête de la Cour d'appel de Corse privilégiant le dialogue, avec les différents acteurs de la justice comme avec les justiciables, dans un cadre de "crise de confiance qui doit nous conduire à mieux nous faire connaître pour mieux nous faire comprendre", souffle-t-elle.

La magistrate indique faire le vœu de "construire un projet dans lequel nos justiciables seront au cœur, tous nos justiciables, et en particulier nos citoyens les plus démunis qui en sont souvent les plus éloignés." Avant de poursuivre : "Rassembler, écouter, travailler ensemble à un contrat de progrès de la justice sur l'île, voilà mon ambition."

Un défi qu'Hélène Davo se dit "impatiente et déterminée à relever. J'arrive ici fortifiée par des principes plus grands que nous-même, et portée par la chaleur de cette hospitalité corse qui n'est pas qu'un mythe. Mes premiers contacts dans cette île me l'ont confirmée : la Corse n'est jamais qu'une parenthèse. Elle marque pour toujours, au plus intime d'une vie."

Première femme à la tête de Cour d'appel de Bastia

On ne prend pas la tête d'une Cour d'appel en Corse par hasard, souligne-t-elle. Elle assure avoir choisi l'île pour ses "singularités". "Je n'y suis jamais venue auparavant, je n'ai aucun à priori. Et j'ai la faiblesse de penser que pour mes fonctions, ce regard neuf sera un atout."

Avant Hélène Davo, jamais une femme n'avait occupé les fonctions de Première présidente de la Cour d'appel de Bastia. Une première dont Hélène Davo se félicite, et pour laquelle elle assure "mesurer l'honneur". "Je ferai tout pour en être digne".

La présence remarquée du ministre de la Justice

Un "très beau discours" et une "vraie chance pour la Cour d'appel de Bastia", plus petite Cour d'appel de France, d'avoir à sa tête "ce grand magistrat", estime Eric Dupond-Moretti au sortir de l'audience solennelle.

Concomitante avec son déplacement de deux jours en Corse, la présence du ministre de la Justice n'en reste pas pour le moins inhabituelle pour une pareille audience solennelle, et apparaît comme un soutien explicite à la magistrate. Car il est peu dire que la nomination d'Hélène Davo par le conseil supérieur de la magistrature le 9 juin dernier, puis son officialisation par décret officiel, avait suscité la polémique.

C'est ainsi jusqu'ici hors des tribunaux qu'Hélène Davo a effectué la majeure partie de sa carrière. Juge d'instruction au Tribunal de grande instance de Paris entre 2003 et 2005, elle devient magistrate de liaison au sein du ministère des affaires étrangères de 2012 à 2017, puis directrice adjointe de cabinet de l'alors garde des Sceaux Nicole Belloubet. Un poste qu'elle occupe durant deux ans et demi, avant de passer conseillère pour la justice à l'Elysée jusqu'en avril dernier.

Une courte expérience en juridiction, moins de cinq ans, et aucune présidence d'un tribunal dénoncée en juin par l'union syndicale des magistrats. Pour Céline Parisot, sa présidente, il s'agissait même d'une "nomination politique".

Des accusations qu'Hélène Davo rejette fermement : face aux médias, quelques heures avant son installation, elle a assuré être dans un état d'esprit "serein", et avoir été "très bien accueillie par l'ensemble de [ses] collègues." "Je suis la seule conseillère justice à ne rien avoir demandé au président de la République. Je laisse à d'autres le soin de faire des polémiques."

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