Depuis plusieurs mois, les élèves de CE2 de l'école François Amadei, à Bastia, travaillent dur sur l'atmosphère et le climat. Avec leur professeur, ils ont élaboré un Mooc visant à sensibiliser les autres enfants à la question environnementale. Un long projet dévoilé ce mercredi.
Assis sur sa chaise dans une des salles du centre social de Paese Novu, à Bastia, Mathis, 9 ans, avoue avoir "les jambes qui tremblent un peu". Le jeune écolier, en CE2 à l'école François Amadei, a été choisi avec quatre autres de ses camarades pour présenter le Mooc "Soyez polis avec l'atmosphère" sur lequel l'ensemble de sa classe a travaillé. Une présentation en grande pompe pour son lancement officiel, ce mercredi 13 octobre, face à la presse et à la direction académique.
Ce parcours de formation en ligne, fait par des enfants à destination des enfants, comprend 80 minutes de vidéos - où interviennent un à un les écoliers - sur les thèmes de l'atmosphère et du changement climatique, et des questionnaires pour tester ses connaissances. Le tout est disponible en accès gratuit sur internet.
Et les professeurs en herbe ne sont pas peu fiers de dévoiler leurs travaux : "Quand on est arrivés en classe au début de l'année, on pensait que ça allait être un CE2 normal, et au final on s'est retrouvés à apprendre plein de trucs sur la terre, et à devoir en reparler pour les enseigner à d'autres enfants !", s'exclame Wiaam, 9 ans, débordante d'enthousiasme.
Éducation au changement climatique
"On a appris plein de chose, sur la pollution, la photosynthèse, ce qui se passe avec le climat, et que la terre va mal", ajoute Roméo, assis à sa gauche. Le jeune garçon se sent d'ailleurs désormais plutôt acteur de la recherche de solutions que simple spectateur du changement climatique. "Avant j'étais un simple citoyen de Bastia. Maintenant des gens dans la ville me reconnaissent, et on va nous voir partout en Corse, et même dans l'idée partout en France !"
On n'a pas fait ça pour devenir des popstars mais pour sauver la planète !
Pour autant, si les écoliers ont "adoré" passer devant la caméra à l'image de leurs idoles des réseaux sociaux - "même si c'était un peu stressant", tempère Mathis -, Wiaam l'assure : "On n'a pas fait ça pour devenir des popstars mais pour sauver la planète ! Il faut que ce soit des enfants qui parlent de ces questions, parce qu'un adulte, un autre enfant ne va pas forcément l'écouter, mais nous, oui."
Des vidéos inspirées des contenus Tik Tok et Youtube
À l'initiative du projet, leur instituteur, Philippe Frasseto. Habitué des "projets éducatifs sur le long-court", le maître d'école souhaitait cette fois proposer un format aux intérêts multiples pour l'éducation et le développement des enfants, sur le fond comme sur la forme.
Ils sont d'autant plus concernés qu'ils sont les générations futures dont on parle si souvent, et qui sont et seront impactées par le dérèglement climatique si les choses n'évoluent pas.
"D'un côté, c'est une manière différente pour eux de travailler, avec de la pratique et des formats vidéos notamment qui leur rappellent des contenus Tik Tok ou Youtube qu'ils regardent, et qui leur permettent d'améliorer leur aisance à l'oral et en public. D'un autre, c'est un moyen pour eux d'apprendre - parce que ce sont des sciences - et de développer leurs connaissances sur l'environnement. Ils sont d'autant plus concernés qu'ils sont les générations futures dont on parle si souvent, et qui sont et seront impactées par le dérèglement climatique si les choses n'évoluent pas."
Partenariats avec des climatologues
Lancé en 2019 par le professeur mais stoppé net pendant une année en raison du Covid-19, le Mooc a mobilisé plus de 40 élèves, épaulés par plusieurs "chercheurs de haut niveau".
C'est ainsi en partenariat avec l'institut Simon Laplace, organisme de recherche autour des différents domaines liés à l'étude de l'atmosphère, que le parcours de formation a été élaboré. Plusieurs climatologues sont également intervenus dans la création des contenus, parmi lesquels notamment Valérie Masson Delmotte, directrice de recherche au CEA (commissariat aux énergies atomiques et aux énergies alternatives) et Jean Jouzel, paléoclimatologue médaillé en 2012 du prix Vetlesen, considéré comme l'équivalent pour les sciences de la Terre du prix Nobel.
18.000 euros auront été nécessaires pour financer l'intégralité du Mooc, vidéos, montage et création graphique inclus. "Nous avons pu trouver des financements auprès de la Collectivité de Corse et la CAF de Haute-Corse", indique Françoise Huguet, directrice de l'association pour l'insertion sociale Opra, partenaire du projet.
"Il y aura toujours des choses à parfaire, mais je suis très heureux du rendu, se félicite Philippe Frasseto. Tous les enfants se sont montrés très motivés et ont fait du bon boulot."
L'instituteur et les élèves espèrent maintenant voir leur travail repris et étudié par le plus grand nombre : "Quand on fait le compte, il y a environ 700.000 enfants de 9 ans en France, et à peu près le même nombre de 10 ans, de 11 ans... Ca fait tout de même un public potentiel assez important", détaille Philippe Frasseto.
Le Mooc "Soyez polis avec l'atmosphère" devrait dans tous les cas être présenté dans les prochains mois à l'Académie du Climat de Paris.