Tri insuffisant, coût trop élevé : la chambre régionale des comptes s'est penchée sur la collecte des déchets dans le Cap Corse

Que faut-il faire pour améliorer la collecte des déchets dans le Cap Corse ? La chambre régionale des comptes de Corse a inspecté le fonctionnement de la collecte et du traitement des déchets. Elle préconise notamment de mieux gérer le temps de travail des agents.

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Dans la communauté de communes du Cap Corse le coût du service de la collecte est deux fois plus élevé que celui observé en moyenne sur le plan national dans les zones touristiques. Il est également supérieur à la moyenne régionale, note un rapport de la Chambre régionale des comptes paru récemment.

Ce prix est en augmentation puisque le coût de la tonne a doublé entre 2014 et 2020, période durant laquelle la Chambre régionale des comptes a étudié les poubelles du Cap Corse.

Qui paie ?

Le financement est assuré à 53% par la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) et la redevance spéciale appliquée aux professionnels. Le reste est apporté par le budget général.

"Si les caractéristiques du territoire sont génératrices de dépenses (habitat dispersé, flux touristique, topographie), le déficit d’optimisation des moyens humains contribue à les accentuer", note la Chambre régionale des compte dans son rapport. Tout en soulignant la différence importante entre haute et basse saison (60% des déchets sont produits entre mai et septembre, quand les touristes et les 55% de personnes ayant une résidence secondaire dans le Cap Corse sont présents) la Chambre estime que les moyens humains sont mal répartis en basse saison.

Le taux de remplissage des camions serait trop bas, le temps de travail théorique des agents insuffisamment contrôlé.

Contrôler le temps de travail

"L’EPCI [la communauté de communes, ndlr] a en effet opté pour le maintien de quatre collectes par semaine pour le littoral et de deux collectes par semaine dans les hameaux alors qu’à l’échelle nationale, une collecte hebdomadaire voire une collecte bihebdomadaire sont couramment observées dans ce type de zones rurales (habitats isolés, hameaux", détaille le rapport.

"En exploitant les données produites par l’outil de géolocalisation, la chambre a examiné la collecte pour l’ensemble des flux durant trois semaines couvrant trois périodes distinctes. Le contrôle confirme une durée moyenne de collecte inférieure à 4 heures (temps de pause compris) et pour certaines tournées, une durée inférieure à 3 heures."

Contractuellement, les agents sont censés travailler 5h50 durant 6 jours en saison touristique et effectuer des journées de 6 heures durant 5 jours le reste de l’année.

La Chambre recommande de mettre en place une organisation permettant d’optimiser les tournées de collecte des déchets et le temps de travail des agents. Elle conseille à l'intercommunalité de davantage contrôler ce temps de travail effectif.

Taxer les professionnels

Autre recommandation pour compenser les problèmes de coût : mettre davantage à contribution les professionnels et les administrations et évaluer la quantité de déchets qui leur est imputable. Notamment car certains produisent un nombre plus importants de déchets durant la période touristique.

"La chambre observe que la redevance est appliquée en méconnaissance du volume des déchets réellement produit par les professionnels. Son mode de calcul n’a jamais été revu. Les produits de la redevance n’ont évolué que de 2 % durant la période sous revue contre une augmentation de 20 % du produit de la TEOM", insiste le rapport.

En outre, la Chambre souligne que le tri des déchets, s'il s'est amélioré entre 2014 et 2020, demeure insuffisant. 40% des déchets produits dans le Cap Corse sont triés, un résultat "en-deçà des objectifs fixés tant aux plans territorial que national."

De nouveaux enjeux à venir

D'autant que pour répondre aux règles nationales et régionales, la Communauté de communes du Cap Corse devra monter en puissance sur le tri des déchets. Fin 2023 la loi évolue et contraint les producteurs de biodéchets (déchets alimentaires et des autres déchets naturels biodégradables, comme les matières organiques) à les trier à la source. Cela pourrait engendrer un surcoût allant jusqu'à un million d'euro par an, selon Ange-Pierre Vivoni, maire de Sisco et vice-président de la Communauté de communes.

"Les options retenues devront être conciliées avec la maîtrise des coûts, sauf à devoir augmenter les ressources fiscales", conclut le rapport.

Ce rapport, on ne peut pas le contester

Ange-Pierre Vivoni, vice-président de la Communauté de communes du Cap Corse

"Ce rapport, on ne peut pas le contester, il ne dit que la vérité", reconnaît Ange-Pierre Vivoni, qui rappelle que communauté de commune avait déjà commandé un audit sur les déchets auprès d'un cabinet privé. Il rappelle d'autres particularités du territoire : des habitants âgés, qui ne peuvent pas nécessairement rejoindre les conteneurs d'une commune voisine si ceux-ci venaient à être regroupés, un ramassage au porte à porte rendu quasi-impossible par des ruelles étroites, la "tournée la plus longue de Corse en été", l'impossibilité d'anticiper sur les quantités de déchets.

Quelles solutions ?

Côté solutions, Ange-Pierre Vivoni assure que le sujet sera débattu par les élus l'intercommunalité. Lui, préconise de piocher dans "l'excédent de fonctionnement" de la communauté de communes pour amortir le surcoût lié au traitement des biodéchets et investir dans la modernisation de la collecte. Le but : limiter au maximum l'augmentation de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, déjà élevée. Pour lui, augmenter la contribution des professionnels est possible mais cela ne ferait pas considérablement changer le montant des recettes.

Du côté de la Cab

La Chambre régionale des comptes s'est également penchée sur la collecte des déchets dans la communauté d'agglomération de Bastia. Les conclusions se rapprochent, même si les raisons évoquées sont différentes : le tri a progressé mais le coût est encore trop important pour le contribuable.

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