Le tribunal de Bastia a reconnu coupable un homme de sévices graves envers Nina, une petite chienne Cursinu qu'il avait adopté. L'animal est décédé en avril dernier, très amaigri et affaibli par la maladie.
C'était pour l'association Nos amis à quatre pattes une plainte symbolique, qui visait à rendre justice à la petite Nina, chienne Cursinu d'environ 4 ans, décédée suite à la négligence de son propriétaire. Cédric T., la quarantaine et chef d'entreprise, comparaissait ce vendredi 24 septembre devant le tribunal de Bastia, pour "sévices graves ou acte de cruauté envers un animal domestique".
Le 6 avril 2021, déroule la présidente d’audience, Pauline Moulard, les gendarmes de Corbara reçoivent le signalement d’un chien très affaibli attaché sur un terrain non loin du port. Arrivés sur les lieux, ils découvrent une femelle Cursinu en état d’importante maigreur, et ne disposant ni de gamelle de nourriture, ni d’eau, ni d’abri.
La chienne est transportée chez un vétérinaire, qui constate alors un fort état de fatigue et déshydratation, et lui découvre une leishmaniose cutanée [maladie parasitaire qui provoque notamment des lésions cutanées].
Le propriétaire est rapidement identifié : Cédric T., chef d’entreprise. Celui-ci consent à laisser la petite chienne, Nina, aux soins de l’association de protection animale Nos amis à quatre pattes, qui la font hospitaliser auprès d’un second vétérinaire. Malgré les soins qui lui sont prodigués, l’animal décède trois jours plus tard, encourageant l’association à déposer plainte contre son propriétaire.
"Quand les gendarmes sont passés chez vous, précise la juge, ils ont constaté que vous aviez un autre chien, qui se trouvait lui en bonne santé." Comment expliquer cette différence de traitement entre les deux animaux, s'interroge la juge.
"Je ne me suis pas aperçu de son état de santé"
L’un est le "chien de famille", détaille l’homme, tête basse, celui qui a vu naître son dernier enfant. L’autre, Nina, c’était une petite chienne errante qu’il avait recueilli 2 ans plus tôt, et, il le reconnaît, qu’il a "sûrement négligée". "Je traverse une période de ma vie compliquée, plaide-t-il. Ma femme est malade de dépression depuis deux ans, je m’occupe des enfants, je n’ai pas beaucoup de temps. Je ne me suis pas aperçu de son état de santé."
Quand je l’ai récupéré, elle était déjà très petite et pas très grosse. Je l’ai toujours connue comme ça, je n’ai pas fait attention.
"Elle pesait 9 kilos contre 16 ou 18 normalement", renchérit la présidente d’audience. "Et quand vous la promeniez, vous n’avez pas non plus remarqué qu’elle avait du mal à se déplacer ?" Non, répond le prévenu, qui assure l'avoir nourri régulièrement. "Quand je l’ai récupéré, elle était déjà très petite et pas très grosse. Je l’ai toujours connue comme ça, je n’ai pas fait attention."
"Vous l'avez laissé crever"
Un discours inaudible pour maître Joëlle Acquaviva qui représente l’association Nos amis à 4 pattes. "Non, vous n’avez pas simplement oublié de caresser et de promener cette chienne, vous l’avez laissé crever", assène-t-elle. Un discours suivi de celui de maître Valérie Vincenti, pour la SPA. "Dans les faits, il y a deux chiens dans cette maison : le chien de famille, et la chose attachée à un arbre". Pourquoi, si le problème était celui d’un manque de temps, ne pas l’avoir donnée à une association, ou ne pas l’avoir simplement détachée "ce qui lui aurait permis d’espérer trouver un meilleur maître", se questionne encore l’avocate.
Des faits qui l’encouragent même à demander l’interdiction définitive pour Cédric T. de détenir un animal, et la confiscation du chien qui aujourd’hui lui appartient. "C’est au procureur de proposer les peines", la reprend la substitut du procureur, qui requiert trois mois d’emprisonnement avec sursis, 350 euros d’amende, et une interdiction pendant 5 ans de détention d’un animal domestique. "Ce manque d’empathie dont monsieur a fait preuve avec cet animal, on est en droit de se demander s’il ne peut pas aussi se traduire dans ses rapports avec la société."
Oui, mon client est coupable de ce qui est arrivé à la Nina. Mais il n’est pas un bourreau des bêtes !
"Oui, mon client est coupable de ce qui est arrivé à la Nina. Mais il n’est pas un bourreau des bêtes !", rétorque maître Gilles Antomarchi, conseil de Cédric T. L’avocat, qui se décrit comme un "fervent défenseur de la cause animale", le reconnaît : c’est par la faute de son client que la chienne est aujourd’hui décédée. "Mais il faut aussi prendre en compte l’humain. Qui peut dire que cet acte était intentionnel ? Qui peut dire qu’il n’a pas de cœur ? L’histoire de Nina me touche profondément. Mais la misère de ce monsieur, dont la femme est malade, me touche aussi."
Pas d'interdiction de détention d'animaux domestiques
Le délibéré tombe quelques heures après l’audience : Cédric T. est déclaré coupable, et condamné à trois mois de prison avec sursis, assortis de 350 euros d’amende, de même que 1000 euros à verser à Nos amis à quatre pattes et 1300 euros pour la SPA.
L’interdiction de posséder un animal n’est-elle pas prononcée, ceci afin de ne pas séparer le second chien de la famille, ce dernier ayant été contrôlé en bonne santé.