"On progresse, mais on doit encore faire mieux", en Corse, plus de 3000 personnes atteintes d'autisme et un accompagnement qui se renforce d'années en années

Le 2 avril est la journée mondiale de sensibilisation à l'autisme. On estime que les troubles du spectre autistique touchent 1% de la population nationale. En Corse, cela représente plus de 3000 personnes. Le point sur les structures et les dispositifs en place pour les accompagner sur l'île avec Julie Le Berre, cheffe de service et neuropsychologue au sein d'Espoir Autisme Corse.

De quelles structures disposent aujourd'hui les personnes atteintes de TSA (trouble du spectre de l'autisme) en Corse ?

Julie Le Berre : Depuis janvier 2024, on en est à peu près à 220 personnes, enfants ou adultes, prises en charge par Espoir Autisme Corse. On intervient sur toute la région, en Corse-du-Sud comme en Haute-Corse, dans les grandes villes comme Bastia et Ajaccio ou dans le Niolu ou Porto-Vecchio... Peu importe où la personne habite, on peut intervenir, et de 0 à plus de 60 ans.

Dans le domaine d'intervention, on a par exemple le SESSAD (Services d'éducation spéciale et de soins à domicile), qui s'occupe beaucoup de la scolarisation des enfants, on a le SAMSAH (Service d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés) qui travaille plus sur l'inclusion dans la cité, c’est-à-dire pour la recherche d'emploi, pour décrocher le permis, pour faire des rencontres amoureuses... Et le SAMSAH intervient pour aider la personne dans ces situations-là.

Il y a d'autres services qui sont aussi importants, comme la plateforme de répit, qui là, n'est pas destinée directement aux personnes TSA, mais à leur entourage. Vous avez par exemple un enfant qui présente d'importants troubles du comportement, vous avez dû arrêter de travailler... Cela sert à vous apporter - comme l'indique son nom - du répit : on va venir, on peut garder votre enfant, pour vous permettre de retrouver une vie sociale et un emploi.

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Julie Le Berre est cheffe et service et neuropsychologue au sein d'Espoir Autisme Corse, à Biguglia. ©Axelle Bouschon, Luc Oerthel / FTV

La prise en charge des personnes TSA sur l'île s'est-elle améliorée au cours des dernières années ?

Julie Le Berre : Bien sûr. Nous n'avons des services médico-sociaux au sein d'Espoirs Autisme Corse que depuis 2011.

En l'espace de 13 ans, nous avons pris une vraie ampleur, en passant de 0 prise en charge à aujourd'hui plus de 200 ou 300 en tout, c'est énorme.

L'Institut national de la santé et de la recherche médicale estime que les troubles du spectre autistique touchent environ 1% de la population en France. En Corse, cela correspondrait à près de 3400 personnes. Un total bien au-delà des 220 aujourd'hui suivies par l'association...

Julie Le Berre : C'est vrai, et si nous nous sommes énormément développés, ce n'est toujours pas suffisant. On progresse, mais on doit encore faire mieux. Tous les jours, nous avons des nouvelles demandes de personnes TSA, enfants comme adultes, qui ont des besoins de prise en charge.

Plus de 3000 personnes en Corse sont TSA. Mais où sont ces 3000 personnes, puisqu'elles ne sont pas dans des services médico-sociaux ? Certaines sont suivies par des personnes en libéral, mais il y a bien besoin de plus de place.

On travaille beaucoup avec l'Agence régionale de santé, qui nous suit sur plein de projets, et qui en sortent eux-mêmes, mais il y a besoin encore de développer des nouveaux services, des nouveaux modèles d'accompagnement. Chaque année, on compte 7500 naissances de personnes TSA en France. En Corse comme ailleurs, nous avons encore besoin d'évoluer.

Les troubles du spectre autistique peuvent également représenter une source de difficultés ou d'incompréhension pour les proches des personnes qui en sont atteints...

Julie Le Berre : Espoirs Autisme Corse est aussi là pour les accompagner le fait, tout comme le CRA, le Centre ressources autisme, qui peut les conseiller, ainsi que la MDPH (maison départementale des personnes handicapées).

Au sein de notre association, nous recevons souvent des appels ou des mails qui nous demandent à qui s'adresser, si on connaît des gens qui peuvent prendre en charge, quand est-ce qu’ils auront une place disponible...

Ce qui est bien aujourd'hui, c'est qu'il n'y a plus de liste d'attente dans nos services. Si vous avez un diagnostic et que vous déposez un dossier chez nous, vous allez être pris en charge. Les listes d'attente n'existent plus.

Le milieu scolaire est-il aujourd'hui adapté aux personnes TSA ?

Julie Le Berre : Il y a toujours des progrès à faire. Après, les avancées qui ont déjà été faites sur les dernières années sont énormes. Maintenant, on retrouve dans le milieu scolaire des unités d'enseignement : Espoir Autisme Corse en a deux, à Folelli et à Bastia.

Cela permet aussi une inclusion scolaire des enfants en situation de handicap : ce sont des tout-petits, des 3 à 6 ans, qui, s'ils n'avaient pas cette inclusion scolaire, ne pourraient pas être scolarisés, même avec une aide humaine.

Donc cela permet à ces enfants de se confronter au milieu scolaire, aux interactions sociales, à l'exigence de ce qu'est le statut d'élèves... Mais cela permet aussi aux autres enfants, aux personnes dites neurotypiques, de voir ce qu'est un enfant TSA et d'être eux-mêmes sensibilisés à cette cause.

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Julie Le Berre est cheffe et service et neuropsychologue au sein d'Espoir Autisme Corse, à Biguglia. ©Axelle Bouschon, Luc Oerthel / FTV

Qu'en est-il des adultes et de l'accès au monde professionnel ?

Julie Le Berre : Aujourd'hui on compte moins de 10% des personnes TSA qui sont en emploi. Ce n'est pas normal, et il faut qu'on fasse mieux à ce niveau-là.

Nous avons un dispositif d'emploi accompagné qui suit les personnes TSA, mais aussi atteintes de tout handicap, vers le milieu de l'emploi. Nous disposons de partenariats forts avec des entreprises locales, comme Burger King, Paul, et d'autres encore, qui veulent vraiment inclure des personnes TSA, et nous travaillons main dans la main avec eux.

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