INFOGRAPHIES. Bon niveau des nappes phréatiques en Corse : « C’est une bonne nouvelle, mais n'oublions pas que l’équilibre est fragile »

En France, le niveau des nappes phréatiques affiche une tendance préoccupante. Une tendance à laquelle semble, pour l’heure, échapper la Corse. Trois questions à Stéphane Ghiotti, directeur de recherche au CNRS.

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Le réchauffement climatique et ses conséquences. L’été 2022 a été marqué par un fort épisode de sécheresse. Pour y faire face, 93 départements ont été soumis à des restrictions d’eau.

Cette année, le pays a été traversé par une sécheresse hivernale lors de laquelle il n’a pas plus durant 32 jours. « 80 % de nos nappes phréatiques ont un niveau bas ou très bas », a alerté Emmanuel Macron lors de la présentation du « plan eau » du gouvernement, jeudi, dans les Hautes-Alpes.

En Corse, néanmoins, les ressources en eaux souterraines sont « en hausse » comparées aux niveaux moyens des cinq dernières années à la même période. Directeur de recherches au CNRS, Stéphane Ghiotti répond aux questions de France 3 Corse ViaStella.

En Corse, en mars 2023, le niveau des nappes phréatiques, comparé à la moyenne des cinq dernières années à la même date, est en hausse. De plus la moyenne mensuelle de ces eaux souterraines est comprise entre « très haut » et « modérément bas ». C’est une bonne nouvelle ?

Au regard de ce qu’il s’est passé l’été dernier, c’est une très bonne nouvelle. Il faut savoir qu’en Corse il y a deux types de nappes phréatiques. D’une part les nappes de montagne où l’eau circule, elle est cloisonnée, elle donne des sources et d’autre part les nappes d’accompagnement des cours d’eau. C’est une bonne chose qu’elles soient en bonne situation, mais il faut garder en tête qu’elles sont vulnérables et qu’elles sont liées à ce qui se passe en surface.

La Corse à une géologie et une hydrologie particulières. Ainsi si les précipitations baissent, le niveau des nappes phréatiques va baisser aussi. C’est un équilibre extrêmement fragile.

Comme vous le disiez, l’été dernier a été marqué en Corse par des ruptures en alimentation d’eau. Doit-on s’attendre à une généralisation de ces événements ?

On va être confronté à ce genre de problématique dans les villages les plus isolés. Mais elles ne seront pas toujours liées à la question de la quantité. Il faut également faire très attention à l’état du réseau de distribution où parfois certaines communes peuvent perdre plus de 50 % de l’eau. Si aucun investissement n’est fait pour rénover et sécuriser les ressources, les épisodes de sécheresse vont augmenter le manque de disponibilité lorsque les ressources sont plus faibles.

J’aimerai revenir sur ce qui s’est passé dans le Cap Corse l’année dernière à Rogliano. Selon moi, les structures de désalinisation sont une fausse bonne idée. Il faut avoir une réflexion autour de l’énergie que ces structures consomment en termes de fioul, de coût de fonctionnement et d’entretien. Leur utilisation est compréhensible pour des situations d’urgence, mais ça ne peut être qu’une solution ponctuelle car sur le long terme c’est une aberration.

La structure de Rogliano a été financée à hauteur de 30 % par la collectivité de Corse et de 70 % par l’État. Donc cela veut dire que sans financements publics, ce serait une catastrophe pour les communes confrontées à ces problèmes.

À cela peut aussi être ajouté un problème environnemental car les usines de désalinisation rejettent de la saumure dans la mer. De plus il faut 100 litres d’eau de mer pour obtenir 70 litres d’eau douce.

De manière générale, quels sont les enjeux du réchauffement climatique sur les ressources en eau ?

Selon les prévisions, notamment du Giec, même si ce dernier manque parfois de données, nous allons vers une augmentation des périodes de hautes températures en été, c’est une tendance forte et elle est remarquée partout.

Par conséquent il y a un manque d’eau en période estivale. On peut prendre l’exemple du Rhône on observe une diminution du débit, entre 30 et 40 %, en été. Cela est impactant dans l’accès à l’eau et dans la distribution de l’eau dans les différents types d’usages. Parfois cela induit une mise en place de solutions qui peuvent être politiquement et économiquement difficiles à faire passer.

De plus ces changements impliquent aussi une augmentation en intensité et en fréquence des crues. Leur saisonnalité a aussi varié puisqu’en fonction des territoires elles ont lieu plus tôt ou plus tard qu’avant. Néanmoins, malgré l’augmentation en intensité des précipitations, les pics de crue sont moins importants, mais provoquent plus de dégâts et les événements extrêmes sont plus nombreux.

Cela peut s’explique notamment par l’évapotranspiration qui assèche les sols. Avec le changement climatique, l’atmosphère a une capacité plus grande à absorber de l’eau. Les sols sont plus secs et donc, malgré des intensités de précipitations plus fortes, les débits sont stockés dans les bassins versants et s’infiltrent. En parallèle la vulnérabilité des sociétés augmente.

Il faut également poser la dimension économique. Un de mes professeurs disait : « On ne manquera jamais d’eau, mais d’argent pour la faire venir ». C’est pour cela, je pense qu’il ne faut pas céder aux sirènes techniques et qu’il ne faut pas investir dans des solutions à court termes. Cela induit par conséquent la question politique. On ne coupera pas à ces débats animés et parfois violents. Les ressources en eau, c’est une chose, mais la gestion c’est des processus sociaux, économiques et politiques.

 

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