Plus de la moitié des forêts de montagne de l'Hexagone et de l'île sont menacées par le changement climatique, selon une étude de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) publiée jeudi 23 janvier.
Les forêts insulaires sont-elles en danger ?
Selon une étude de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) portant sur les écosystèmes forestiers des différents massifs montagneux de France, plus de la moitié des forêts de montagne de l'Hexagone et de l'île sont menacées par le changement climatique.
Ainsi, 10 écosystèmes sur les 19 étudiés apparaissent comme menacés, c'est-à-dire "en danger critique" (CR), "en danger" (EN) ou "vulnérable" (VU) et 6 "quasi menacés", soit le niveau juste en dessous en termes de risque d'effondrement.
Le Pin Laricio "quasi menacé"
Dans cette dernière catégorie figure notamment le Pin Laricio. Variété emblématique des forêts insulaires, elle représente environ 25 000 hectares sur les 550 000 que comptent les forêts corses.
"Le mode de régénération du Pin Laricio ne tolère pas une récurrence trop importante d’incendies, contrairement au Pin maritime, son principal compétiteur des basses altitudes, détaille l'UICN. Ainsi, si des incendies occasionnels peuvent favoriser la régénération du Pin Laricio, notamment en éliminant les principales espèces compétitrices, des feux trop fréquents sont une menace. Or la fréquence actuelle des incendies en Corse est statistiquement plus de deux fois supérieure à leur fréquence historique."
Autre écosystème concerné sur l'île : les boisements à genévriers thurifères, présents notamment dans le massif du Cinto. Victimes de la concurrence des autres essences, ils sont également fragilisés par les incendies. Les boisements à Olivier sauvage sont quant à eux menacés par "l’urbanisation et l’aménagement des espaces littoraux auxquels ils sont inféodés" ainsi que par "la présence de la bactérie Xylella fastidiosa".
À noter que d'autres écosystèmes présents en Corse, notamment les forêts d'if, n'ont pu faire l'objet d'une catégorisation, faute de données disponibles.
Liste rouge
Cette "liste rouge des écosystèmes", mise en place en 2014 par l'UICN, est l'équivalent pour les habitats naturels terrestres, aquatiques et marins de la liste rouge des espèces menacées pour la faune, qui fait référence pour mesurer l'effondrement de la biodiversité. Ses critères d'évaluation dépendent d'un référentiel commun à tous les pays d'Europe continentale.
Au niveau national, dans le détail, les cembraies (forêts de Pins cembro) et les mélézins (forêts de mélèzes) du subalpin ainsi que les hêtraies, sapinières et hêtraies-sapinières subalpines, sont classées en danger, tandis que 5 forêts mixtes, mélange de hêtres communs, de sapins blancs, ou d'épicéas communs, une forêt de sapins et d'épicéas et deux pineraies montagnardes sont classées "vulnérables".
Dans tous les cas, "le contexte de changements climatiques est un facteur déterminant des résultats de cette évaluation", indique l'étude.
"Cocktail de pressions"
Dans les environnements montagneux ou pré-montagneux, les hausses de température ont tendance à être plus marquées qu'en plaine, entraînant notamment un "déficit hydrique accru". Ainsi dans les Alpes et les Pyrénées françaises, la température a augmenté de +2°C au cours du 20ème siècle, contre +1,4°C dans le reste de la France, selon Météo-France.
Ces écosystèmes, qui accueillent une large diversité d'espèces animales, végétales ou fongiques parfois spécifiques à ces milieux qui leur servent d'ultimes refuges, sont par ailleurs soumis à d'autres pressions d'origine anthropique (pollutions, surexploitation, espèces exotiques envahissantes...).
Et "malgré une abondance de recherches sur les forêts, il reste difficile de prédire les trajectoires futures des forêts de montagne de l'Hexagone et de Corse face au cocktail de pressions qu'elles subissent", estiment l'UICN, l'Office français de la biodiversité (OFB) et le Muséum national d'histoire naturelle (MNHN) dans un communiqué commun.