Depuis le 2 mars dernier, date de la violente agression d'Yvan Colonna au sein de la maison centrale d'Arles, les villes de Corse sont le théâtre de nombreuses manifestations violentes. Depuis le début de ces événements, 11 personnes ont été interpellées et plus d'une centaine de blessés.
Cocktails Molotov, gaz lacrymogènes, boules de pétanque, grenades de désencerclement… Depuis la violente agression d'Yvan Colonna par un codétenu de la maison centrale d'Arles, le 2 mars dernier, les rues des grandes villes de Corse sont, quasi quotidiennement, la scène de manifestations qui dégénèrent en affrontements entre protestataires et forces de l'ordre.
Des affrontements particulièrement violents ont été observés lors de quatre rassemblements d'ampleur. Regroupant pour trois d'entre eux plusieurs milliers de personnes - à Corte, Bastia et Ajaccio- ces heurts ont fait 118 blessés (67 manifestants et 51 membres des forces de l'ordre). Parmi eux, six jeunes lors d'un rassemblement lycéens à Ajaccio le 8 mars dernier.
"Les peines encourues sont de 20 ans, ce sont des faits criminels"
En tout, 11 personnes ont été interpellées depuis le début des manifestations insulaires réclamant "Justice pour Yvan Colonna, libération des prisonniers politiques et solution politique". " Les consignes sont celles d'absorber au maximum toutes les violences qui sont aujourd'hui présentes en Corse. Il n'y a pas de consignes précises. Il y a surtout la volonté de montrer que nous sommes en capacité de gérer une manifestation. On interpelle le moins possible, on attend le plus longtemps possible pour répondre", commente Bruno Bartoccetti, secrétaire national chargé de la zone sud unité SGP Police.
Pour l'heure, un homme interpellé le 6 mars à Corte est poursuivi pour participation à des attroupements en étant en procession d’une arme par destination et en dissimulant son visage. Il comparaîtra libre, le 12 avril prochain. Une information judiciaire a été ouverte à l’encontre d’un autre manifestant arrêté le 13 mars à Bastia pour participation à un attroupement en étant porteur d’un engin incendiaire en vue de porter atteinte à des biens ou des personnes et violence aggravée. Il a été placé en détention provisoire au centre pénitentiaire de Borgo. Enfin, un jeune homme de 18 ans, interpellé à Furiani, a été placé sous contrôle judiciaire et sera présenté en comparution immédiate jeudi.
À Ajaccio, le procureur de la République évoque l'ouverture d'une dizaine d'enquêtes pour des faits d'associations de malfaiteurs, dégradation de biens publics par moyen dangereux en bande organisée. "J'insiste sur le fait que ce n'est pas parce qu'il n'y a pas d'interpellation sur le moment qu'il n'y en aura pas. Dans ces cas, les peines encourues sont de 20 ans, ce sont des faits criminels. Les services de la police judiciaire sont saisis comme ceux du commissariat d'Ajaccio et nous espérons bien que dans les semaines, les mois qui viennent, un certain nombre sera élucidé", souligne Nicolas Septe.
Un collectif d'avocats pour venir en aide aux manifestants
Afin de venir en aide aux manifestants un collectif composé d'une vingtaine d'avocats a vu le jour. "Nous proposons une aide juridique gratuite aux personnes susceptibles d'être poursuivie ou ayant été blessés lors des manifestations. Et cette aide s'applique seulement dans le cadre des manifestations et de leurs revendications. En clair, nous ne sommes pas là pour aider les casseurs", explique Maître Jean-Marc Lanfranchi, membre du collectif.
Selon ces avocats, ces interpellations vont à l'encontre de la volonté d'apaisement prônée par le gouvernement. Ils dénoncent également "un nombre inédit et manifestement disproportionné, au regard de l'événement de fonctionnaires de police et de gendarmerie."
Une accusation que n'accepte pas Bruno Bartoccetti, secrétaire national chargé de la zone sud unité SGP Police. "Au vu des violences, on ne peut pas parler de disproportion. Lorsqu'on a une vingtaine de blessés à Ajaccio, lorsqu'on se fait tirer dessus à l'arme à feu ou à grenaille, cela reste à déterminer, lorsque l'on reçoit des bombes agricoles, des boules de pétanque ou divers projectiles… Je crois que c'est surtout dans les rangs des policiers où on subit de véritables violences. Après, lorsqu'il y a, dans le cadre d'une manifestation, la volonté de disperser une foule, c'est toujours très regrettable lorsqu'il y a des blessés, mais n'inversons pas le sujet. Les policiers font tout pour préserver la tranquillité des Corses et certainement pas d'entrer dans une violence et une surenchère de violences loin de là", commente-t-il.
Ce mardi 5 avril, un nouveau rassemblement est organisé devant le commissariat de Bastia.