La garde des Sceaux annonçait la création d'un Parquet national antiterroriste, lundi 18 décembre. Certains avocats de détenus corses craignent que ce dispositif, destiné à lutter contre le terrorisme islamiste, ne soit aussi appliqué à des militants insulaires.
Dans l'émission de France 2, Les 4 vérités, Nicolas Belloubet, garde des Sceaux, est revenue sur une décision annoncée aux magistrats le 18 décembre. L'idée est de créer un Parquet national antiterroriste. « Face à la montée de la menace terroriste, à sa présence permanente, il nous a semblé important que le Parquet de Paris, puisse d'une part s'occuper des affaires territoriales et que d'autre part, il y ait un Parquet qui soit centralisé et focalisé principalement sur le terrorisme », soutient-elle.
Une réponse au terrorisme islamiste
Le procureur général près de la cour d’appel de Bastia était présent à Paris lors de l’annonce de la ministre. Il plébiscite un Parquet consacré à sa seule tâche et affirme que la Corse ne sera sans doute que très peu concernée.
« Je crois qu’aujourd’hui, tout le monde peut s’en féliciter, la dimension terroriste n’est plus première en Corse », souligne Franck Rastoul. « Ce renforcement de la structure, des moyens, du positionnement de la section antiterroriste de Paris qui deviendrait un Parquet national, en s’inscrit en réponse à des faits de terrorisme islamiste. Pour autant, la qualification est de "terrorisme". Ce parquet national aura donc vocation à traiter tout fait de terrorisme, où qu’il soit commis. »
Sans surprise, les avocats qui défendent, entre autres, des militants nationalistes emprisonnés ou recherchés y voient plutôt la généralisation d’une justice d’exception qui ne dit ni son nom, ni ses cibles.
« Tout l’arsenal législatif anti-terroriste depuis les attentats de 95, du GIA, les attentats islamistes… Toutes les lois qui ont été faites, ont été faites pour lutter contre le terrorisme islamiste, c’est vrai », reconnaît Benjamin Genuini, avocat du barreau de Bastia. « Mais ces lois sont appliquées aussi contre les nationalistes corses, basques et c’est ce qui nous inquiète. »
« Ce que l’on peut craindre, c’est que les nationalistes corses, notamment ceux condamnés pour des faits liés à la situation politique de la Corse, soient bridés et marqués au fer rouge tout au long de leur vie par des mesures attentatoires à la liberté. Il faut se méfier. »
En 2016, François Molins, procureur de la République du Parquet de Paris, se méfiait de cette idée. Cependant, il pourrait avoir changé d’avis : il serait pressenti pour diriger le futur Parquet national antiterroriste.