En tant que président du syndicat nationaliste étudiant Cunsulta di a ghjuventù corsa (CGC), Pierre-Joseph Paganelli a participé aux différentes mobilisations ainsi qu’à la réunion avec le ministre de l’Intérieur. À la suite du décès d’Yvan Colonna, il évoque la forme que pourrait désormais prendre le mouvement ainsi que l’avenir du collectif qui en est à l’origine.
France 3 Corse Viastella : Plus de deux semaines après l'agression d'Yvan Colonna ayant entraîné son décès lundi soir, où en est-on de la mobilisation insufflée par la coordination dont vous faites partie ?
Pierre-Joseph Paganelli : Elle se concentre actuellement essentiellement sur les veillées car nous sommes en période de recueillement et de deuil. Par respect pour la famille et selon sa volonté, des veillées ont été organisées à Corte, Bastia, Ajaccio et dans toutes les villes.
Jusqu’à l’enterrement d’Yvan Colonna, prévu ce vendredi à Cargèse, la mobilisation va donc prendre cette forme-là ?
Je pense. On verra. Pour l’instant, l’heure n’est pas à la poursuite de la mobilisation telle qu’elle était avant.
Les syndicats étudiants sont partie prenante de la coordination réunissant l'ensemble de la famille nationaliste. Celle-ci a organisé plusieurs réunions à la fac de Corte depuis deux semaines. Quelles pourraient être les décisions prises dans les jours à venir par ce collectif ?
Le collectif s’était réuni la semaine dernière. Ensuite, le drame s’est produit. Tout a été stoppé. Au départ, ce collectif a été créé pour aller discuter avec le ministre de l'Intérieur et il s’est concentré sur l’organisation de la mobilisation, ce que l’on pouvait faire largement seul en tant que jeunes. Je pense donc qu’il faudra également se questionner sur sa pertinence pour la suite.
Cela signifie que ce collectif n’a plus forcément de raison d’être ?
Oui. Puis il y a la majorité territoriale qui n’est pas venue à la dernière réunion, vendredi. On ne sait pas si elle souhaite poursuivre son engagement en son sein. Si des organisations s’en vont, cela perd son sens. Il faudra là aussi se questionner pour savoir si on continue comme ça. Peut-être qu’il y aura encore une réunion, je ne sais pas. En tout cas, il faudra se poser la question.
Le fait que "Femu a Corsica" n’ait pas assisté à la dernière réunion du 18 mars est révélateur de divisions au sein de la famille nationaliste sur la gestion de cette mobilisation, notamment après le protocole d'accord signé par le président de l'Exécutif et le ministre de l'Intérieur. Le collectif ne pourrait donc pas continuer sans l’un des partis, qui plus est celui majoritaire ?
Je ne sais pas. En revanche, ce que je sais, c’est que nous, les jeunes, avons en ce moment une capacité de rassemblement, de mobilisation aussi. On l’a vu pendant ces trois semaines. Je pense qu’il ne faut pas que l’on perde ça et que l’on se perde au milieu des partis et des organisations. À partir de ce principe-là, sans regarder les divisions nationalistes qui ne nous concernent pas réellement, je pense qu’il faut que les jeunes soient à l’initiative du mouvement et des mobilisations.
Avec ces divisions, n’avez-vous pas le sentiment d’être pris en étau entre les différents partis nationalistes ?
Je ne sais pas s’il y a ce ressenti-là. Ce que je sais, c’est que les premières mobilisations ont été initiées par les jeunes. Il n’y a pas eu besoin du collectif pour les faire ; Après, le collectif s’est réuni par notre volonté afin de permettre qu’il y ait des échanges avec le ministre et pour représenter ce qui était en train de se passer au niveau citoyen dans la rue. Maintenant, on est dans une autre séquence. Il faudra s’interroger sur la suite et on verra.
Ces trois semaines de mobilisation ont fait redescendre dans la rue la jeunesse nationaliste. Cela faisait quelque temps qu’on ne l’avait pas vue autant occuper le terrain. selon vous, l’arrivée au pouvoir des nationalistes en décembre 2015 à l'Assemblée de Corse a-t-elle contribué au fait que cette jeunesse se soit moins mobilisée ?
C’est vrai qu’avec l’accession des nationalistes au pouvoir, il y a eu un enfermement institutionnel. Forcément, le terrain a été délaissé, même s’il aurait fallu à un certain moment changer de stratégie avec un rapport de force institutionnel tout en maintenant cette lutte de terrain qui est un élément important chez les nationalistes. Les élus se sont retrouvés face à un mur. Forcément, les jeunes y ont vu le déni démocratique et il n’y avait plus trop de mobilisation sur le terrain. Aujourd’hui, on en arrive à cette situation-là qui est la suite logique et la goutte d’eau qui fait déborder le vase.
Pour l’instant, il n’y a aucune date concernant cette mobilisation et aucune information sur la forme qu’elle pourrait prendre.
Pierre-Joseph Paganelli
Cette mobilisation de terrain pourrait-elle faire grossir les rangs des syndicats étudiants ?
Je ne sais pas. En tout cas, ce n’est pas une volonté de réduire la mobilisation des jeunes aux syndicats étudiants. Chez nous, tout le monde pousse dans le même sens. Après, il y a des jeunes qui ne sont pas étudiants qui sont mobilisés et qui ont tout autant envie de s’engager. Ce n'est donc pas une question d’entre-soi au sein des syndicats étudiants.
L’organisation d’une manifestation à Ajaccio avait été évoquée avant le décès d’Yvan Colonna. Du coup, pourrait-elle avoir lieu après le temps du recueillement et les obsèques ?
Pour l’instant, il n’y a aucune date concernant cette manifestation et aucune information sur la forme qu’elle pourrait prendre. Ce n’est plus à l’ordre du jour pour le moment. Nous sommes dans le respect de la période de recueillement et de deuil.