Procès en appel de Joseph Aguzzi : « Il a assassiné mon fils comme on tue un chien sur un trottoir »

Joseph Aguzzi comparaît devant la cour d’Assises d’appel de Corse-du-Sud depuis le 30 janvier pour l’assassinat de Laurent Bracconi, le 21 juillet 2015, à Bastia. Lors du quatrième jour d’audience, la famille de la victime a témoigné.

Ils sont quatre. La mère, le père adoptif, le frère et la veuve de Laurent Bracconi. Depuis le début des débats, ils ont écouté les descriptions faites de leur proche, les détails de sa vie, sans jamais réagir.

Ils sont tous habillés en noir et se succèdent à la barre. « Si je parle aujourd’hui, c’est parce que je ne veux pas qu’on garde l’image d’un délinquant, pour qu’on le respecte en tant que victime », explique Antoine, son père adoptif. 

C’est lui qui, le 21 juillet 2015, jour de l’assassinat Laurent Bracconi, est averti en premier par un coup de téléphone. « On m’a dit : viens vite au bar, il s’est passé quelque chose ». Antoine sort de son commerce et court en direction de l’Empire, petit établissement de la Rue Napoléon que son fils adoptif a racheté il y a quelques mois. 

« J’ai vu Laurent assis sur une chaise, la tête baissée. Quelqu’un m’a aidé à l’allonger pour essayer de le sauver avant que les secours arrivent... Depuis 8 ans, tous les mardis, j’ai une angoisse, je me refais le film de ce massage pour le sauver. Vous savez on m’a dit après qu’il avait une balle dans le front, je n’ai rien vu de tout ça », livre Antoine, dans un souffle. 

« Dans une rue, sous un drap blanc »

William, le frère ainé de Laurent Bracconi, est le deuxième a être informé ce mardi 21 juillet 2015. Mon père m’a appelé : « Viens vite, c’est ton frère, il est blessé ». « La dernière fois que je l’ai vu, c’était dans une rue, sous un drap blanc. » 

C’est lui qui a la charge d’annoncer la mort de Laurent Bracconi à sa mère. « Je n’ai jamais fait quelque chose d’aussi difficile de ma vie. Quand je lui ai dit, elle est tombée, comme si je l’avais frappée. » Il n’a « pas eu le courage » de le dire à ses deux neveux. « Mélanie et Antoine l’on fait. Et vous espérez qu’ils ne comprennent pas. Mais ils comprennent vite, le petit avant le grand. »

Selon lui, cette scène n’a pas été la plus difficile à vivre. « Non, c’est après, au moment de la restitution du corps. » Son père biologique, « qui se veut fort », a « le visage déformé par la douleur ». Sa mère « ne reconnait pas son fils, je vous laisse imaginer pourquoi ». 

« Mon cerveau n’arrivait pas à imprimer »

Vient le tour de la mère de Laurent Bracconi. Elle se souvient « ne pas avoir compris », « mon cerveau n’arrivait pas à imprimer ». Elle reconnaît que son fils « a fait des bêtises », « mais ce n’était pas un voyou ». Elle raconte « la honte », « l’humiliation » des parloirs lorsqu’elle rend visite à Laurent Bracconi en prison, condamné à huit ans de réclusion pour association de malfaiteur en vue de commettre un assassinat en 2003. 

« On est d’une famille de médecins, d’avocats, de commerçants, ce n’est pas notre monde et il le savait. Même lui avait honte. Quand je l’ai vu au parloir la première fois il m’a dit : Maman je te déçois. C’était mon petit », raconte-t-elle en retenant ses larmes. 

Des larmes qu’elle ne parvient plus à contenir lorsqu’il est question de l’accusé, Joseph Aguzzi, 68 ans, qui comparait devant la cour d’Assises d’appel de Corse-du-Sud depuis le 30 janvier. « Il a assassiné mon fils, comme on tue un chien sur un trottoir. Pour moi, il a tué mon fils, je demande la justice. » Dans un sanglot elle hausse le ton : « Une balle lui a traversé la tête, il était à 50 cm de lui ».

Pour l’accusation, le sexagénaire a tué Laurent Bracconi pour venger la mort de son fils Marc, assassiné en 1999 à la sortie d’une boite de nuit. Une certitude que l’accusé aurait forgé après que Laurent Bracconi a été entendu dans ce dossier, avant de bénéficier d’un non-lieu en 2003. Un mobile que l'accusé à toujours réfuté. 

« Il s’était rangé »

Tous les membres de la famille décrivent un homme « rangé ». « Il avait eu des problèmes, mais il avait payé sa dette », estime Antoine. « C’était un jeune adulte immature, un peu fou fou, je ne sais pas ce qui lui est passé par la tête. En prison il a appris, il a compris que ce n’était pas son monde, que ce n’était pas son éducation », complète la mère de Laurent Bracconi. 

Sa veuve, Mélanie, décrit un « homme exceptionnel », « capable de vous couvrir de fleurs ». « Ce n’était pas seulement mon époux, c’était aussi mon meilleur ami. En un an j’ai vécu le meilleur et le pire : un mariage, la naissance de ma fille et l’assassinat de Laurent ».

L’audience de poursuit, ce jeudi après-midi, par les plaidoiries de la partie civile. L’accusé, Joseph  Aguzzi, a été condamné à 12 ans de prison en première instance. Il risque la réclusion criminelle à perpétuité. 

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