Le procès en appel de Joseph Aguzzi pour l’assassinat de Laurent Bracconi, le 21 juillet 2015 à Bastia, se tient depuis le 30 janvier devant les Assises de Corse-du-Sud. Le troisième jour des débats a été marqué par l’interrogatoire de l’accusé qui refuse le mobile que l’accusation lui prête.
Nicole Aguzzi se retourne rapidement. En quelques secondes elle parcourt les quelques mètres qui séparent la barre du public. Elle se jette dans les bras de sa sœur. Elle sanglote, enfonce la tête entre son épaule et sa nuque. Un cris de douleur. Une phrase. « Ils me font revivre la mort de Marc ».
Selon l’accusation, l’assassinat du fils Aguzzi, en 1999 à la sortie d’une boite de nuit, est une partie du mobile de Joseph, son père. Ce dernier est accusé de l’assassinat de Laurent Bracconi, le 21 juillet 2015, à la terrasse du bar L’Empire à Bastia et dont le procès en appel se tient devant la cour d’Assises de Corse-du-Sud depuis le 30 janvier.
Pour Me Paul Sollacaro et Me Francesca Seatelli, si le sexagénaire est passé à l’acte c’est pour venger l’assassinat de son fils qu’il attribue à Laurent Bracconi. L’homme a été soupçonné un temps dans ce dossier, avant de bénéficier d’un non-lieu en 2003.
Un mobile que Joseph Aguzzi réfute depuis le début de la procédure. Tout comme le reste de sa famille et de ses proches, qui ont été entendus durant ces trois jours d’audience, il assure ne « nourrir aucune haine contre Laurent Bracconi ». Ne « pas vouloir venger la mort de (s)on fils ». S’il a pu penser à la culpabilité de la victime, il affirme n’en avoir jamais été certain.
« Une manœuvre de la police »
Pour Me Francesca Seatelli, il en est autrement. « Mr. Aguzzi, Paul Bracconi, père de Laurent, pensait que l’assassinat de son fils était une ‘vendetta de José’. Il dit : je l’ai croisé à plusieurs reprises et il m’a toujours dit : C’est Laurent. » Joseph Aguzzi, la voix basse, répond : « Je ne comprends pas comment il peut dire une chose pareille. »
Pour l’accusé, ce mobile serait plutôt une « manœuvre de la police ». « A chaque fois que je me rendais dans les commissariats ou en gendarmerie on me disait que Laurent Bracconi était l’assassin de mon fils. Mais que rien n’avait pu être fait parce qu’il n’y avait pas de preuve. Ça, ça fait votre mobile, c’est vous qui l’inventez avec la police. Moi, ma préoccupation ne tourne pas autour de Laurent Bracconi», lâche-t-il à l’attention de Me Paul Sollacaro. Des propos que les enquêteurs auraient également tenus à Anthony, fils de l’accusé et à Nicole, son épouse, hors procès verbal.
« Le soir de l’assassinat vous fumiez un cigare sur votre terrasse »
D’autres éléments interrogent les parties civiles et principalement les résidus de tir retrouvés sur une chaussure et le pantalon que portait Joseph Aguzzi le 21 juillet 2015. « Si celui qui est retrouvé sur votre bras peut être dû à une activité de bricolage comme le précise l’experte, comment expliquez vous les autres ? », interroge Me Paul Sollacaro. « Je ne fais pas de tir et je ne possède pas d’armes. Je n’ai pas de réponse », rétorque l’accusé.
Si le sexagénaire dit partager la peine des proches de Laurent Bracconi, des déclarations enregistrées quelques jours après son assassinat, pourraient montrer un changement de comportement. « Une voisine raconte que le soir des faits, elle vous voit fumer un cigare sur votre terrasse, chose que vous n’aviez pas l’habitude de faire », soutient Me Francesca Seatelli. « Elle m’espionne ?, sourit Joseph Aguzzi. Oui je fume un cigare et je crois même que je bois un verre de vin. Choses que je fais. »
Du côté de la défense, Me Lia Simoni rappelle que les témoignages des personnes ayant assisté directement à l’assassinat de Laurent Bracconi « ne permettent aucune conclusion certaine ». Et remémore à la cour une remise en liberté accordée à Joseph Aguzzi avant son procès en première instance. « Les expertises sur les résidus de tir étaient dans la procédure, et elles n’ont pas permis son maintien en détention », soutient-elle.
Ce jeudi, la journée sera consacrée aux auditions des parties civiles. En première instance, Joseph Aguzzi a été condamné à 12 ans de prison. Il risque la réclusion criminelle à perpétuité.