Des discussions entre le gouvernement et l'exécutif de Corse étaient prévues vendredi. Mais suite aux violences qui émaillent les mobilisations insulaires depuis un mois, ces dernières ont été reportées par Paris. L'annonce a été officialisée, lundi, par une lettre du ministre de l'Intérieur adressée au président du conseil exécutif de Corse.
"Ce que j'ai encore vu ce week-end est inacceptable, y compris avec des responsables politiques en tête de cortège. Donc moi, il n'y aura pas de discussion avec des gens comme ça." Voici la phrase, prononcée par le président-candidat, Emmanuel Macron, ce lundi 4 avril au micro de FranceInter, et par laquelle le rendez-vous entre le gouvernement et l'exécutif de Corse, prévu vendredi, a commencé à être remis en question.
Une position officialisée en fin de journée par le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, dans une lettre adressée au président du conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni. Il rappelle ainsi qu'à l'issue des discussions entre les deux hommes, en mars dernier à l'occasion de la visite du ministre de l'Intérieur dans l'île, "il était clairement exprimé 'qu'en tout état de cause, le ministre et le président du conseil exécutif de Corse conviennent que la mise en œuvre de ce processus historique ne peut s'envisager que dans un cadre général apaisé et calme privilégiant le dialogue entre les différentes parties concernées. À la lumière des deux dernières semaines, force est de reconnaître que les conditions d'un dialogue normalisé ne sont guère réunies.'"
"43 actions ou manifestations émaillées de débordements violents"
Dans le même temps, le ministre de l'Intérieur précise : "Près de 43 actions ou manifestations se sont déroulées, quasi toutes émaillées de débordements violents, en présence d'élus pourtant censés participer aux discussions prévues à Paris. Au total, ce sont près de 59 blessés, tant parmi les forces de l'ordre que les manifestants, qui n'ont d'ailleurs fait l'objet d'aucune condamnation publique."
Le dernier grand rassemblement remonte au dimanche 3 avril. Organisé à Ajaccio en mémoire d'Yvan Colonna, décédée le 21 mars dernier des suites d'une violente agression au sein de la maison centrale d'Arles, il a rassemblé 10.000 personnes selon les organisateurs, 4.000 selon les autorités. Une mobilisation qui a une nouvelle fois vu se jouer de violents affrontements entre protestataires et forces de l'ordre. 15 personnes ont été blessées, dont trois grièvement.
"Ces événements sont inacceptables, tant pour la démocratie qui ne saurait faire preuve de complaisance vis-à-vis de la violence, que pour les Corses eux-mêmes qui désapprouvent ces événements. C'est la raison pour laquelle je me vois contraint de reporter la réunion de vendredi prochain. Naturellement, le gouvernement de la République se tient dans les mêmes dispositions d'ouverture et de dialogue une fois le calme recouvré", conclut Gérald Darmanin.
"La seule issue est le dialogue, maintenant"
Une décision qui n'a pas manqué de faire réagir la classe politique insulaire. Mardi, dans un tweet, le député de la 2e circonscription de Haute Corse écrit : "En ce jour de naissance de Paoli, notre responsabilité est de dire que le seul courage politique qui vaille, la seule issue, pour faire taire les tensions, arrêter un conflit, est le dialogue, maintenant. En tout temps, en tout lieu, c'est le dialogue sur les causes qui amènent à la Paix."
Le maire de Porto-Vecchio et président du groupe Avanzemu à l'assemblée de Corse indique quant à lui, lundi : "Aujourd'hui les tensions sont au plus haut, hier, il y a eu des incidents graves. Je crois que le moment n'est pas aux préalables, mais au dialogue urgent. Si ce report venait à être confirmé, je pense que ce serait une mauvaise nouvelle pour la Corse et pour Paris."
Le groupe d'opposition une Un Soffiu Novu à l'Assemblée de Corse a déclaré dans un communiqué qu'il ne participerait pas "aux réunions organisées ans les jours qui viennent dans les agences, organismes satellites de la Collectivité tant que des prises de position allant dans le sens de l'apaisement ne seront pas clairement exprimées."
Le président du groupe, Laurent Marcangeli, a part ailleurs été la cible de tags injurieux lors de la manifestation du 3 avril. Des responsables politiques de tout bord lui ont apporté leur soutien.