Pass sanitaire, tests... cet été, on ne pensait qu'à ça, effrayés qu'un oubli nous empêche de prendre l'avion. Mais ce n'était pas la seule menace qui planait sur nos vacances. En Corse, les annulations de vol ont été fréquentes, provoquant bien des tracas. On a tenté d'en savoir plus.
- "Evidemment, personne ne peut me renseigner... Au comptoir d'embarquement, ils m'ont dit qu'il fallait appeler Volotea... Mais c'est ce que j'ai fait toute la soirée d'hier !" En vain.
Alors, en désespoir de cause, Anne a pris sa voiture pour se rendre à l'aéroport de Poretta. En espérant trouver un interlocuteur de la compagnie qui pourrait l'aider. Sans plus de succès.
Anne doit se rendre à Toulouse jeudi. Prévoyante, et parce qu'elle sait que si elle le fait à l'aéroport, elle devra payer des frais supplémentaires, hier, elle est allée sur le site pour imprimer sa carte d'embarquement. C'est là qu'elle a appris que son vol était déplacé au samedi. Et c'est la même chose pour son vol retour. Elle devra revenir en Corse le samedi, et pas le jeudi.
Cela ne lui convient pas. Elle ne nous dira pas pourquoi, mais Anne veut absolument partir jeudi. C'est presqu'une question de principe. Et elle veut des explications, et des excuses, de la part de la compagnie aérienne. "C'est scandaleux, j'ai jamais vu ça ! Depuis quand c'est eux qui décident des dates de nos vacances ! J'ai réservé en mai !"
Annulations et modifications intempestives
Depuis l'ouverture de la Corse aux compagnies low-cost il y a quelques années, l'île a découvert les joies des annulations intempestives, des modifications d'horaires anarchiques, et des changements de jour de vol arbitraires. Auxquels personne n'a d'autre choix que celui de se soumettre. Mais depuis l'irruption de la crise sanitaire, en 2021, la tendance semble s'être accentuée.
Depuis quand c'est eux qui décident des dates de nos vacances ?
Et si, l'été dernier, tout le monde se pliait aux changements de planning en maugréant, mais conscient des bouleversements liés au Covid, cette année, c'est plus difficile. Les voyageurs ont l'impression, depuis le mois de juin dernier, et le discours d'Emmanuel Macron, que l'on peut de nouveau voyager plus ou moins normalement. Alors ils se montrent moins conciliants. D'autant que tous n'ont pas la chance d'Anne, qui est retraitée, et part chez sa fille. Face au changement de ses dates de voyage, elle n'aura pas à annuler de réservation, à faire une croix sur des arrhes versées, et ne devra pas modifier ses congés dans l'urgence.
Des conséquences financièrement lourdes
Nous avons fait appel, sur les réseaux sociaux, aux témoignages de voyageurs et de voyageuses qui ont subi des annulations intempestives, afin de nous assurer que le cas d'Anne n'était pas isolé. Après tout, une annulation de vol, ça peut arriver...
Nous avons reçu, en moins de 24 heures, plus d'une centaine de messages. De touristes, et d'insulaires. Ainsi, Laura et Pierrick sont partis en Sicile, et avaient planifié leur voyage avec une correspondance à Nice dans la journée, avant d'arriver à Palerme. La veille, Easyjet les a prévenus que leur vol Nice-Palerme partirait un jour plus tard. Ils ont donc perdu une journée de vacances en Sicile, et ont dû passer une nuit à Nice. Ce qui a provoqué un coût supplémentaire, d'autant que leur première nuit en Italie ne leur a pas été remboursée.
Audrey, quant à elle, vit à Aigues-Mortes, en Camargue. Elle devait venir en juillet en Corse assister au baptême de la fille de ses amis. Son vol aller-retour a été annulé. Impossible de trouver un autre vol, en plein cœur de la saison touristique. Audrey a dû faire une croix sur le baptême.
Antoine et Jessica sont venus passer leurs vacances en mai, avant les grandes chaleurs, du côté du Cap Corse. Alors qu'ils se baignaient du côté de Pietracorbara, ils ont appris que leur vol retour vers Strasbourg était annulé. Ils ont dû se rabattre en catastrophe sur un Bastia/Bâle, puis un Bâle/Strasbourg... "Résultat, 220 euros d'avion en plus, et une nuit d'hôtel à Calvi. Le 27 août. Pour la modique somme de 260 euros".
La liste des inconvénients, et des difficultés, créées par ces annulations ou modifications est interminable. Et si, avec les compagnies "traditionnelles", à qui il arrive également de succomber à ce genre de pratiques, les démarches pour se faire rembourser ou pour modifier son vol sont plutôt faciles, c'est loin d'être le cas pour les low-cost. Nelly, Karine et Marc-Antone, de leur côté, attendent toujours leur remboursement...
Les low-cost plus coutumières du fait que les compagnies traditionnelles
Série de circonstances malheureuses ou nouvelle tendance dans le monde des compagnies aériennes, qui ont été durement touchées par la crise sanitaire mondiale, et doivent faire avec une trésorerie fragile ? C'est difficile de le déterminer, pour l'heure. Seul le temps, et les prochaines saisons touristiques, nous le dirons.
Du côté de l'Agence du Tourisme de la Corse, on affirme qu'on n'a pas fait remonter d'aggravation des annulations, et on souligne que "les réservations des vacanciers de septembre auprès des professionnels sont encourageantes, et laissent augurer d'une bonne arrière-saison". Ce qui laisse penser que ce n'est pas une brusque chute des réservations qui aurait contraint les compagnies à procéder à de tels ajustements pour faire face à des taux de remplissage inquiétants.
Ce que confirme Luc Bereni, le président du directoire d'Air Corsica : "la capacité mise en œuvre en septembre et octobre correspond à celle de la période équivalente en 2019. Depuis le mois de juin, la tendance de la demande est semblable à celle d’il y a deux ans sur le marché domestique français. Il n’a donc pas été nécessaire, en ce qui concerne Air Corsica, de procéder à des ajustements".
Aléas d'exploitation...
Mais Luc Bereni concède que, plus tôt dans l'année, en avril ou en mai, Air Corsica a été contraint, parfois, de déplacer ou annuler des vols. Depuis, affirme-t-il, la compagnie a "effectué près de 3.000 vols en août, et les irrégularités de programme se sont fort heureusement comptées sur les doigts de la main, soit un pourcentage infime de notre programme global. Il s’est agi d’aléas d’exploitation comme on en rencontre en toutes saisons, pour des causes opérationnelles diverses, notamment la météo, qui n’ont rien à voir avec la crise sanitaire."
Des passagers abandonnés par certaines compagnies low-cost ont littéralement pris d'assaut les dernières places restantes à bord de nos avions.
Pour autant, le président du directoire d'Air Corsica accrédite la thèse d'une tendance à avoir recours à ce genre de pratique. "Nous avons effectivement assisté plusieurs fois au report sur Air Corsica de passagers abandonnés par certaines compagnies low-cost, qui ont littéralement « pris d’assaut » les dernières places restantes à bord de nos avions". En clair, chez les compagnies qui, depuis quelques années, sont venues se positionner sur l'île, face à Air Corsica. La compagnie insulaire, aujourd'hui, a beau jeu de faire valoir sa différence, alors que les voyageurs mécontents sont de plus en plus nombreux.
... ou crise sanitaire ?
Nous avons eu le plus grand mal à joindre les compagnies low-cost, qui pour certaines, n'ont même pas de service de presse ou de communication. Volotea est la seule compagnie que nous avons réussi à joindre. Pour la compagnie espagnole, contrairement à Air Corsica, ce serait "l’incertitude de la situation actuelle concernant la COVID19, entraînant des changements continus des restrictions sanitaires", qui l'aurait contraint à réajuster son programme de vols".
En clair, tout cela serait passager, et dès que l'épidémie sera derrière nous, tout rentrera dans l'ordre... Volotea, qui ne veut pas effrayer les clients éventuels, s'empresse de rajouter que "malgré ces ajustements, Volotea a offert un total de 35 routes entre juillet et septembre depuis la Corse, 10 de plus qu’en 2019, et un total de 48% de sièges en plus (toujours en comparaison avec 2019 sur la même période)". Et qu'elle offre "à toutes les personnes concernées par les annulations, la possibilité de choisir entre un bon d'une valeur équivalente à 120% du coût du vol, valable pour les 12 prochains mois, ou le remboursement intégral du prix du billet".
Pas sûr que l'explication suffise à contenter Anne, qui continue très certainement de sillonner l'aéroport de Poretta, à l'heure qu'il est, dans l'espoir de trouver un interlocuteur de la compagnie aérienne...
Quels sont vos droits si votre vol est annulé ?
contrairement à un vol décalé, un vol annulé implique un changement de numéro de vol. C'est à vérifier impérativement si, comme anne, votre vol est déplacé d'un ou plusieurs jours.
Dans le cas d'une annulation, vous avez droit au minimum au remboursement de votre billet. Et vous pouvez demander des dommages et intérêts si vous estimez que cette annulation vous a causé un préjudice particulier, qu'il soit financier ou moral.
La compagnie aérienne est tenue à vous proposer un réacheminement sur un autre vol vers la destination finale, dans des conditions de transport comparables. Ou à vous rembourser votre billet dans un délai de 7 JOURS, pour la partie non effectuée mais aussi pour celle effectuée et devenue inutile, selon le site de ministère de l'Economie et des Finances.
Elle doit également vous verser une indemnité forfaire de 250 euros pour les vols de moins de 1 500 kilomètres, ou de 400 euros pour les vols intracommunautaires ou de 1 500 à 3 500 kilomètres. Si votre vol est plus long, l'indemnité sera de 600 euros.
La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes précise que : « si vous optez pour un réacheminement, la compagnie aérienne doit prendre en charge l’ensemble de vos frais d’hôtel et de restauration, jusqu’à votre arrivée à destination finale. Vous avez également le droit à deux appels téléphoniques. En revanche, si vous choisissez le remboursement de votre billet d’avion, la compagnie aérienne est alors libérée de son obligation de prise charge de vos frais d'hôtel et de restauration ».
Il existe 3 cas dans lesquels l’indemnisation pour cause d'annulation n'est pas due :
- Si la compagnie aérienne a informé les passagers de l'annulation du vol au plus tard 2 semaines avant l’heure du départ,
- en cas de délai inférieur, si une place leur est offerte sur un autre vol à une heure proche de l’horaire initialement prévu tant au départ qu’à l’arrivée,
- en cas de circonstances extraordinaires (conditions météorologiques, risques liés à la sécurité, grève, etc.).
Comment procéder ?
L'indemnisation n'est ni immédiate ni automatique. Le passager ou la passagère doit le solliciter auprès de la compagnie aérienne, par accusé de réception, ou directement en ligne sur le site de la compagnie. Joignez à votre demande tous les justificatifs possibles, du billet électronique aux reçus justifiant les dépenses engagées, en passant par le message de la compagnie vous prévenant de l'incident.