Une tour de Monaco, des élus et des fortunes de la Côte d'Azur pour un procès de corruption

Elus, riches hommes d'affaires, entrepreneurs en bâtiment: le tribunal correctionnel de Marseille juge à partir de lundi des membres du gratin de la Côte d'Azur et de Monaco. Un vaste dossier de corruption, fraude et blanchiment, dont l'un des volets concerne la plus haute tour monégasque.

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Elus, riches hommes d'affaires, entrepreneurs en bâtiment: le tribunal correctionnel de Marseille juge à partir de lundi des membres du gratin de la Côte d'Azur et de Monaco. Un vaste dossier de corruption, fraude et blanchiment, dont l'un des volets concerne la plus haute tour monégasque.

Parmi les 11 prévenus qui doivent comparaître pendant deux semaines figurent le maire de Beausoleil --une commune voisine de Monaco-- Gérard Spinelli, ainsi que la veuve, une fille et le gendre de l'ancien sénateur-maire de Saint-Jean-Cap-Ferrat, René Vestri, mort en février 2013. A leurs côtés, des entrepreneurs en bâtiment et des hommes d'affaires de la Côte d'Azur et de Monaco.

Relations multiples et variées


Dans le dossier est apparu le nom d'une autre grande fortune: Chantal Grundig, veuve de Max Grundig, fondateur de la marque d'électroménager allemande du même nom, mais elle a bénéficié d'un non-lieu. Ce qui relie toutes ses personnes? Leurs liens avec le personnage central du dossier, Ange-Roméo, dit "Lino", Alberti, un self-made-man né en Italie et aux relations multiples et variées --élus, hommes d'affaires, mais également mafieux présumés, comme Gianni Tagliamento, souvent présenté comme un membre de la Camorra napolitaine. C'est d'ailleurs une enquête italienne qui a amené la justice française à s'intéresser aux affaires de M. Alberti.

Des envelopppes


Lino Alberti a quitté l'école à 13 ans et possède alors une entreprise de BTP, ainsi que de multiples participations et comptes bancaires offshore, un patrimoine d'une "particulière complexité", selon les enquêteurs. Arrivé en 1978 à Monaco, dont il est administrativement résident, il vit, au moment de son arrestation en 2009, en couple avec Chantal Grundig à Roquebrune-Cap-Martin. Mme Grundig --qui touche 280.000 euros par mois de la fondation Grundig-- a reconnu avoir préparé pour les affaires de son compagnon des enveloppes destinées à recevoir de l'argent liquide, sans savoir exactement de quoi il retournait. En effet, Lino Alberti est au centre, selon l'accusation, de plusieurs opérations douteuses.

Comptes en suisse 


La première concerne la construction de l'immense et luxueuse tour Odéon, un double gratte-ciel de 170 m de haut et 49 étages bâti à Monaco, à la frontière de la commune française de Beausoleil, avec à son sommet un appartement "penthouse" sur 5 niveaux réputé parmi les plus chers du monde. Un chantier évalué à plus de 500 millions d'euros. La justice reproche à Lino Alberti d'avoir été l'intermédiaire d'un pacte écrit noir sur blanc, et saisi par les enquêteurs lors d'une perquisition, entre d'une part le maire de Beausoleil Gérard Spinelli, "un ami de 30 ans", et d'autre part deux frères, Claudio et Paolo Marzocco, des promoteurs monégasques dont la société "porte le projet" de la tour Odéon et qui sont eux aussi renvoyés devant le tribunal.

Commission de deux millions d'euros


Le pacte, écrit "en 10 points" et mentionnant une commission de 2 millions d'euros, sera retrouvé dans un coffre de la villa de Chantal Grundig, ainsi qu'une enveloppe contenant 60.000 euros avec une liste de montants et une inscription : "ODEON GERARD". Mais les enquêteurs se sont aussi intéressés au rôle de Lino Alberti auprès de la famille René Vestri, une figure politique de la Côte d'Azur jusqu'à son décès en 2013.

Selon l'enquête, il aurait aidé par l'entremise d'un financier, Silvio Perlino --également renvoyé devant le tribunal--, les filles du sénateur-maire de Saint-Jean-Cap-Ferrat à détourner une partie des recettes de la plage privée dont elles avaient la gestion sur des comptes suisses, au nom de sociétés établies dans les îles Vierges britanniques. Un montage financier qui leur a permis, toujours d'après l'enquête, de mettre à l'abri du fisc cet argent, ainsi qu'une partie du patrimoine familial, "un bas de laine" d'environ 1,8 million d'euros.

Symbole du microcosme azuréen qui gravitait autour de Lino Alberti et de ses affaires, le déroulement le 4 juillet 2009 à son initiative, de "la fête des pirates" dans l'établissement d'un ami. Parmi les invités, les frères Marzocco, Gérard Spinelli, ou encore Giovanni Tagliamento et d'autres acteurs du dossier. Une fête "à laquelle ne manquait que René Vestri, souffrant", soulignent les enquêteurs.
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