Elections européennes : les limites du système

Visas à vendre, crise de l’euro, absence de défense commune, l’Europe montre ses failles et ses limites.
 

Des états s’enrichissent en vendant des visas dorés

Incroyable mais possible : on peut acheter un passeport européen, ou un permis de résidence dans l’Union européenne soit en échange de gros investissements, soit en le payant directement, rubis sur l'ongle, comme un bien de luxe. Corrompus et criminels peuvent se réfugier en Europe grâce à ces visas dorés. Parmi les champions de cette pratique : l’Autriche, la Bulgarie, Chypre et Malte, mais aussi l’Espagne, le Portugal la Hongrie.

Coût d’un passeport : entre 650 000  et 2 millions  d’euros, selon les pays. Des sommes astronomiques mais très accessibles pour des milliardaires saoudiens notamment. Un business très lucratif  pour les Etats vendeurs, mais par forcément éthique. Et les pays ne sont pas très regardants sur l’origine des fonds :"Ce qui est grave c’est qu’il n’y a pas de transparence sur l’origine des fonds, souligne Eva Joly, eurodéputée Europe Ecologie Les Verts. Nous ne savons pas de façon certaine qui sont ces nouveaux citoyens. Et chaque pays qui vend sa citoyenneté ouvre la porte de l’Europe à ces nouveaux membres. Les Russes, les Chinois qui achètent le passeport maltais achètent le droit de circuler librement en Europe."

C’est une sorte de blanchiment de l’argent criminel de tous ces pays. Car le contrôle effectué avant d’obtenir le passeport européen est très léger.

Mais pas de prohibition à l’horizon. La naturalisation et la délivrance des titres de séjour sont la compétence exclusive des états. En janvier dernier, la Commission européenne a simplement  exhorté les états membres à ne pas abuser des sésames ouvrant le droit au séjour ou à la citoyenneté dans l’Union.
 
L'Europe sans défense commune

L’Europe n’a jamais eu de défense commune. Chaque pays a sa propre armée. Et depuis 1945, l’Europe compte sur la protection des Etats-Unis. Mais récemment les menaces se sont succédées : la guerre en Ukraine, la crise des migrants et les attentats terroristes ont ébranlé l’Europe. Et l’Amérique prend ses distances vis-à-vis de l’Europe. Un fond européen de la défense a été créé en 2017. Son objectif : renforcer les investissements nationaux en matière de défense. On évoque même une armée européenne. Les européens sont déterminés à assurer la sécurité des 28 états membres :Arnaud Danjean, eurodéputé PPE est convaincu: "Tout le monde s’est réveillé avec Trump. Les déclarations du président américain ont fait prendre conscience aux européens que cette alliance avec les Etats-Unis n’est peut-être pas aussi solide qu’elle l’était lors des décennies précédentes. Il est sain que les européens prennent leur destin en main en matière de défense, et ne soient pas aussi dépendants de puissances extérieures pour assurer notre propre sécurité."

C’est difficile de trouver le bon équilibre entre la fidélité à nos alliances historiques et la construction d’une Europe de la défense.


Aymeric Chauprade, eurodéputé Europe de la Liberté et de la Démocratie estime qu' "il y a des logiques stratégiques différentes entre les partenaires européens. Sans nier la relation avec les Etats-Unis, nous pouvons construire une véritable défense européenne. Mais il faut aussi repenser les liens avec la Russie. La Russie est un voisin géopolitique important. Il y a l’émergence de la Chine On doit construire un partenariat stratégique avec ce grand pays."
L’euro : 20 ans de bricolage

Présent aujourd’hui dans 19 pays, l’euro est considéré comme bénéfique par 64% des Européens. La monnaie européenne a survécu aux crises des subprimes en 2007, à la crise grecque en 2009. Mais elle est en panne de croissance :L'Euro n’est pas vraiment l’expression d’une volonté politique. "Un rapport de Jacques Delors dans les années 80 disait déjà que la monnaie ne pouvait marcher que si on avait un budget commun et une politique fiscale forte, explique Ernest Urtasun, eurodéputé Verts espagnol. Si les Etats continuent de vouloir garder leur souveraineté économique cela ne peut pas marcher."

"L’Europe a une politique monétaire unique mais pas une politique économique unique", analyse Jean Arthuis, eurodéputé libéral (ALDE). "L’urgence est d’arriver à une vraie convergence des politiques économiques nationales et que "nous puissions faire converger les législations fiscales et sociales. Cela ne bouge pas suffisamment. S’il y a autant d’optimisation fiscale, c’est parce que les européens ne sont pas raisonnables."

Pour Ernest Urtasun du Groupe des Verts : "Le coût de la sortie de la zone euro aurait un coût énorme pour les classes populaires. Mais les parlementaires le savent. Ils n’ont pas le choix : réformer la zone euro. Mais la volonté politique manque. Et pour Ernest Urtasun, l’Europe n’est pas armée pour affronter une nouvelle crise économique."


Budget: L’Europe paye ses faiblesses

Les budgets des deux politiques historiques de l’Union vont subir des coupes drastiques: la politique de cohésion dont la mission est d’aider les régions les plus pauvres, et la politique agricole commune.
Première raison : le départ des Anglais engendre une diminution de 10 % de budget . De plus, l’Europe est confrontée à de nouveaux enjeux : défense, migration, frontières, recherche ou numérique :Ce sont les Etats qui alimentent le budget. Et ils ne sont pas très généreux. La Commission et le Parlement préconisent donc de nouvelles rentrées : taxes sur les sacs plastiques, sur les géants du net, et surtout la taxe carbone. Mais en attendant, les pays de l’est sont furieux qu’on touche à la cohésion, les Français refusent que l'on touche à la PAC. Les pays riches ne veulent plus payer. Les scandinaves veulent développer du numérique...

Alain Lamassoure, eurodéputé PPE, estime "qu'on ne peut plus continuer cette hypocrisie, consistant d’un côté à accroitre les responsabilités de l’Union Européenne avec des moyens budgétaires trop modestes mis à disposition. L’Europe est un géant politique et un nain budgétaire qui prétend financer une politique mondiale avec des pourboires. Il faut que le président Macron et Angela Merkel tapent du point sur la table : ou bien nous voulons une Europe qui fonctionne et nous aide à faire face aux défis d’aujourd’hui, nous avons besoin de beaucoup plus d’argent. Sinon nous en resterons à l’Europe d’aujourd’hui qui fonctionnent mal et ne nous sert à rien. Il faut oser le débat."
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