Mahomet en Une de Charlie Hebdo proclame "Je suis Charlie"

Soutenu par des millions de manifestants dimanche, Charlie Hebdo a décidé de tenir tête aux terroristes en dessinant à nouveau en Une de son prochain numéro le prophète Mahomet qui proclame "Je suis Charlie".

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Cible des islamistes justement pour avoir souvent caricaturé Mahomet, Charlie Hebdo dessine en couverture un prophète qui pleure et tient entre ses mains une pancarte "Je suis Charlie".

Le prophète reprend ainsi à son compte le slogan mondial contre les attentats qui ont tué 17 personnes dont les dessinateurs Cabu, Charb, Wolinski, Tignous et Honoré.

Au-dessus de ce croquis de Luz, le journal titre "Tout est pardonné". Ce numéro dit "des survivants" qui sortira mercredi, sera tiré à trois millions d'exemplaires, contre 60.000 habituellement, et vendu dans 25 pays.
L'avocat du journal, Richard Malka avait rappelé lundi après-midi que les dessins de Mahomet et autres autorités religieuses étaient habituels dans le journal depuis des années. "Dans chaque numéro de Charlie Hebdo depuis 22 ans, il n'y en a pas un où il n'y ait pas de caricatures du Pape, de Jésus, de curés, ou de rabbins, d'imams et de Mahomet". "L'étonnant serait qu'il n'y ait pas" de dessins de Mahomet dans ce numéro, avait-il dit. "On ne cédera rien, sinon tout ça n'aura pas eu de sens. L'état d'esprit "Je suis Charlie" cela veut dire aussi le "droit au blasphème", avait averti Me Malka. Il a également déclaré que Charlie Hebdo n'est "pas un journal violent mais irrévérencieux, qui porte le rire" et réfuté avec virulence toute accusation d'islamophobie.

Quant aux manifestations monstre contre les attentats, qui ont rassemblé près de quatre millions de personnes en France et déclenché des manifestations de soutien dans le monde entier, elles mettent l'équipe de Charlie mal-à-l'aise, a expliqué le porte-parole du journal. "C'est un pied-de-nez de l'histoire ubuesque, car nous sommes le journal le moins consensuel qui soit, et on se retrouve aujourd'hui avec le monde entier qui fait corps autour de nous !", a-t-il lancé. Interrogé sur la question de savoir si le journal est "islamophobe", Richard Malka a répondu que Charlie Hebdo "s'en est pris bien moins à l'islam qu'au christianisme" et critiqué un "relativisme de mauvaise foi indécent et obscène".

Trois millions d'exemplaires

Le tirage du numéro de mercredi a été porté de un à trois millions d'exemplaires au vu de l'avalanche de demandes en France et à l'étranger, a expliqué Patrick André, directeur général des MLP (Messageries lyonnaises de presse), le distributeur du journal. Les MLP enregistrent depuis plusieurs jours des commandes émanant des organismes les plus divers, et réclament parfois des milliers de copies : des maires qui veulent les offrir à leurs administrés, des entreprises pour leurs salariés, des théâtres pour les spectateurs ou encore des distributeurs de presse en Inde, en Australie...
Des points de presse de villages qui ne vendaient que deux Charlie Hebdo en réclament plusieurs centaines pour mercredi. Les MLP ont même reçu l'appel d'un jeune Italien de 14 ans qui voulait le journal...

A l'export, où Charlie Hebdo ne vendait que 4.000 exemplaires, le MLP prévoient d'en expédier 300.000, a raconté M. André. Pour le premier million d'exemplaires, toute la recette ira au journal, le réseau de distribution ayant accepté de travailler gratuitement. Les points de ventes seront livrés quotidiennement, du 14 au 19 janvier inclus, et le numéro restera en vente pendant huit semaines. "Tous les 27.000 points de vente de presse français en auront, contre 20.000 habituellement. Chacun en aura au moins une dizaine, mais certains plusieurs centaines", a-t-il dit.

"Nous enregistrons sur le terrain des réservations monumentales", a confirmé Dominique Gil, président du Syndicat des dépositaires de presse, qui livrent les points de vente. "On est submergés, les points de presse réclament parfois cinquante fois la mise en vente normale. Par exemple la centrale de Cattenom veut offrir un exemplaire à chaque salarié, soit 1.500 exemplaires", a témoigné le gérant d'un  dépôt de presse à Forbach, Stéphane d'Altri o Dardari.
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