Le gouvernement a mandaté les préfectures pour demander leur avis aux maires sur le maintien ou non des élections régionales et départementales en Juin. Ils ont jusqu’à ce dimanche soir 11 avril pour donner leur réponse. Sondage en avant-première auprès des maires du Bas-Rhin et du Haut-Rhin.
Bernard Fischer est le Maire (LR) d’Obernai dans le Bas-Rhin, mais il est aussi docteur en pharmacie. Selon lui, seul le vaccin va réellement changer la situation dans laquelle nous sommes coincés depuis plus d'un an. "Mais d'ici juin, je l'espère, la situation va évoluer positivement" précise Bernard Fischer et de rappeller que les situations sanitaires, comme le signale le Conseil scientifique dans son avis sur la possibilité de maintenir ou non de ces élections, sont très disparates selon les régions, départements et communes. "Faisons confiance à nos agents et élus locaux. On va prendre toutes les mesures nécessaires, mais je suis pour le maintien des élections, sauf si le taux d’incidence devait à nouveau s'envoler."
Deux autres points posent question à l'édile : d'abord, le faible intérêt des électeurs pour les régionales et les départementales, "A mon avis 90 à 95% des gens ignorent qu'il y a ces élections en juin. Leurs préoccupations sont toutes autres : se faire vacciner, respirer, sortir de cette situation, revivre plus normalement. " puis les journées d'élections elles-mêmes. "Les agents municipaux, les assesseurs, les élus, toutes les personnes mobilisées pour ces élections devront être vaccinées pour la fin mai, afin de pouvoir assurer sans craintes, les élections des 13 et 20 juin."
De nombreux autres maires s'inquiètent aussi à ce sujet. Dans le Haut-Rhin, ils en ont fait part au président de leur association des maires, Christian Klinger. Il a recueilli les questionnements des maires de son département et en a fait part à la préfète, vendredi matin. "J'ignorais à ce moment-là que le soir-même nous aurions un courriel nous demandant de nous prononcer sur la tenue ou non des élections du mois juin. Les maires s'inquiètent car certains élus ou assesseurs ne sont pas vaccinés, d’ici juin les choses vont évoluer, mais la réponse est à donner aujourd'hui!"
"Les maires ont l'impression qu'on les consulte en espérant qu'ils répondront qu'il faut reporter les élections"
Consulter ceux qui organisent les élections, lui semble être une bonne chose, mais la manière de faire pose question : "Un sondage envoyé un vendredi soir quand les mairies sont fermées, avec réponse demandée pour le dimanche soir, génère de l'agacement, parfois de la colère chez certains, voire un sentiment d'être pris en otage." Car pour beaucoup d'élus, ce n’est pas de leur champ de compétence de décider si ces élections doivent ou non se tenir.
"Le conseil scientifique n'a pas dit strictement oui ou non, donc le gouvernement se tourne vers les maires, les conseillers départementaux et régionaux... on ne peut pas s'empêcher de penser à une stratégie politique." raisonne Christian Klinger. "Les maires ont l'impression qu'on les consulte en espérant qu'ils répondent qu'il faut reporter les élections. On sait qu'Emmanuel Macron veut les repousser. On peut donc se dire qu'il se tourne vers les élus pour justifier le report."
"Si on nous demande d'organiser ces élections, on est prêt, on sait faire" déclare de son côté le maire de Muttersholtz, Patrick Barbier depuis toujours engagé pour l'écologie et l'environnement. "Mais cela signifie que tous les élus et assesseurs et intervenants dans l'organisation de ces élections deviennent public prioritaire pour le vaccin." Pour ce maire, il existe un autre problème dont on parle moins, mais essentiel aussi : la campagne électorale. "Le vrai problème c'est la campagne électorale, c’est là qu'on sert les mains et voit du monde. Même si les réunions publiques ne font plus le plein, on part sur les marchés, à la sortie des gares, on donne des tracts de main à la main. Il faudra même que les médecins nous disent si c'est possible ".
"Il faudra que tous les élus et assesseurs et intervenants dans l'organisation de ces élections soient vaccinés à temps."
Concernant l'avis que leur demande le gouvernement, il s'étonne pour deux raisons :"D'abord, nous ne sommes pas épidémiologistes et nous poser cette question un vendredi soir pour une réponse le dimanche, montre que nous sommes taillables et corvéables à merci. C’est un délai très court, moi j’ai l’habitude de consulter mes adjoints, mais là je n'aurais même pas le temps si je devais répondre d'ici ce soir, alors je répondrai au gouvernement un peu plus tard."
Le sondage envoyé aux maires pour avis sur la possibilité de tenir ou non des élections de juin ne semblent pas enthousiasmer les élus alsaciens. Certains estiment que le délai d'un week-end est trop court, d'autres qu'ils n'ont pas les éléments pour savoir quelle sera la situation sanitaire en juin, pour d'autres encore, il s'agit d'une stratégie du gouvernement pour pouvoir reporter les élections en septembre, sous couvert de crise sanitaire.
Pour certains ces élections peuvent se tenir, dans le plus stricte respect de distanciation physique, avec toutes les mesures barrières, les masques, des personnels vaccinés, pour d'autres cette campagne se fera par les réseaux, mais ne touchera pas tous les électeurs...Certains élus estiment aussi que des citoyens auront peur d'aller déposer leur bulletin dans l'urne, d'où la nécessité de bien préparer le vote par procuration. "On peut imaginer que 25 millions de personnes en France auront eu la première dose de vaccin, mais certains auront quand même peur de se déplacer pour aller voter", estime le maire d'Obernai, "Il faudra un dispositif de procuration très simple et permettre aux électeurs de se déplacer sans justificatif."
Reste à rappeler aux citoyens à quoi servent ces élections, de quoi s'occupent les régions (Innovations, transports et lycées...) et les départements (Social, personnes âgées, personnes handicapés, routes départementales...). La vie au quotidien est impactée par les élus d'une région et des départements et chez nous de la CEA."
"Si on avait 35 ou 40 pour cents de citoyens vaccinés, on ne se poserait peut-être pas cette question du report des élections. Mais de toute façon, les modes d’élections doivent évoluer dans les temps à venir " conclut le maire d'Obernai. Se pose alors la question de la volonté politique de permettre aux plus petits villages de disposer des équipements nécessaires au vote électronique dans les bureaux et pour le vote à distance, les efforts de sensibilisation à faire dans toutes les communes, auprès de tous les maires, tous les élus et tous les citoyens, voire à proposer des formations à l'informatique pour certains.
La réponse des maires est à envoyer aux présidents des maires des départements et aux préfectures avant ce dimanche soir minuit. Connaîtra-t-on leurs réponses et combien d'entre eux auront répondu ? 15% ou 70% ? Car pour finir, seuls ceux qui se seront exprimés auront raison. Comme aux élections.