Faute de tournée cette année et pour donner vie à leur second album, The Big Picture, les Alsaciens du groupe Last Train ont réalisé leur tout premier documentaire. Un voyage entre la Norvège, l'intimité d'un studio sundgauvien et les rigolades entre potes.
Pour un groupe né de la scène, né pour la scène comme Last Train, la période que nous vivons aurait pu être fatale. Du moins désespérante. Pas pour eux. Quand on a 25 ans, déjà 300 concerts au compteur et des premières parties de dingues avec Muse ou Placebo, on n'a plus peur de rien. Pas même du grand froid. Récit.
Alesund
Les quatre musiciens d'Altkirch (Haut-Rhin) aiment la foule des fosses pogotantes, des visages échaudés par le bruit et la fureur des cordes. Pas celle des grandes villes anonymes. Peut-être est-ce là l'atavisme sundgauvien. Pour l'enregistrement de leur second album, The Big Picture, le groupe a naturellement choisi les grands espaces et les paysages grandioses. De ceux qui impriment la rétine. Et parfois la pellicule. La Norvège. Alesund.
"Nous aimons enregistrer ensemble, tous les quatre. Jamais l'un après l'autre. Ce n'est pas notre façon de faire. Et il n'y a pas beaucoup de studios qui le permettent. Si, Abbey Road mais c'était très cher et on avait envie d'évasion. Quand on nous a parlé d'Avesund, petite ville paumée au bord de mer, nous n'avons pas hésité" raconte Julien Peultier, guitariste du groupe et réalisateur du documentaire.
C'était une expérience fantastique, c'était fou. Quand on enregistrait on voyait la mer.
Les Beatles n'ont qu'à se rhabiller. Et Last Train bien se vêtir. En automne 2018, les quatre musiciens passent dix jours en Norvège. Le temps que The Big Picture se révèle à la lumière crue du Nord. "C'était une expérience fantastique, c'était fou. Quand on enregistrait on voyait la mer. Un paysage qui correspondait parfaitement à ce second album plus introspectif. Alors que tout va toujours plus vite, là, on était hors du temps." Suspendus à un fil de guitare électrique.
Hugo Pillard, réalisateur de clips pour Pomme ou Fauve, fait aussi partie de ce voyage intérieur. Il filme le groupe musical. Il filme surtout le groupe d'amis, complices depuis dix ans, agrégés dans le froid ."On est rentrés avec 15 heures de rushs."
La genèse
L'histoire aurait pu s'arrêter là, à 2 minutes, durée moyenne d'un clip. C'était sans compter sur le Covid et son cortège d'annulations de concerts et de festivals. "Ça été vraiment compliqué, on était en pleine promotion de notre deuxième album, on commençait à peine notre tournée en France et puis tout s'est arrêté. On devait faire la première partie de The Red Hot Chili Peppers au Groupama Stadium, les Vieilles Charues, les Eurockéennes, The Main Square Festival ... On en a eu les ailes coupées."
On en a eu les ailes coupées.
The Main Square Festival demande alors aux artistes, faute de concerts, de réaliser des cartes blanches pour les réseaux sociaux. "On s'est pris au jeu. On a commencé à tourner des interviews. Au final on s'est retrouvés avec sept heures d'entretiens. Ça faisait trop ..."
Trop et ce n'était pas assez. Last Train a beaucoup à chanter et encore plus à dire. "Nous avons décidé de faire de cette matière un documentaire, un vrai. Nous avons pris les images tournées en Norvège, celles des sessions avec l'orchestre philarmonique de Mulhouse, les séances d'enregistrement au White Bat Recorders à Emlingen (Sundgau)" C'est Julien qui a décidément plusieurs cordes à sa guitare qui réalisera le tout. 43 minutes."C'est long mais nous on aime le temps long, l'expérimentation, les phases instrumentales." C'est qu'il en faut du temps pour raconter à la fois une genèse et une histoire longue de dix ans.
Renouer avec le public
"Ce documentaire c'est une odyssée. Pavée de doutes, de frénésie créative et de grands moments d'amitié. Un témoignage empreint de sincérité livré par ceux qui ont fait et pensé ce disque, et qui retrace son processus de création, des premières notes posées sur un piano aux intenses sessions d'enregistrement qui l'ont fait naître."
Ce documentaire c'est une odyssée. Pavée de doutes, de frénésie créative et de grands moments d'amitié
C'est aussi une manière de retrouver le public, de donner vie à ce second album d'une manière certes moins spectaculaire mais plus visuelle. "Cet album, on aura quasiment pas eu l'occasion de le faire vivre sur scène. L'automne prochain, ça fera deux ans qu'on l'aura enregistré, il faudra proposer autre chose. De la nouveauté. Ce documentaire oui, c'est une manière de donner ce second album au public. Différemment mais avec autant d'émotions. Peut-être plus."
Certainement. Loin de la fureur de la scène, et de l'éclat des poursuites, The Big Picture raconte la vie nue, celle d'un groupe d'amis du collège qui se rêvaient en rock star et qui le sont presque, presque, devenus. The Big Picture, le documentaire sera visible, gratuitement sur YouTube via le médium musical de Canal+ : Jack