La SNCF a décidé de décaler d'une heure et demi le départ du TGV Strasbourg-Paris qui s'arrête à Saverne, Sarrebourg et Luneville. Les élus locaux craignent que cela laisse présager une fermeture à terme. Ils se mobilisent depuis le début de l'été.
Ils ont été informés par un simple courrier, dans le courant du mois de juillet 2024. Les maires de Saverne (Bas-Rhin), de Sarrebourg (Moselle) et de Luneville (Meurthe-et-Moselle) ont appris qu’à partir du mois d’octobre 2024, le TGV qui s’arrête dans leur gare respective partirait une heure et demi plus tard. Soit une arrivée à Paris à 10h24 au lieu de 8h46 actuellement. Une très mauvaise nouvelle pour ces territoires qui ont engagé des discussions avec la direction des TGV Est.
Pour les édiles, 10h24, c’est trop tard pour une arrivée à Paris. "Et surtout, ça ne permet pas de faire l’aller-retour dans la journée ! Personne ne va plus vouloir la prendre", précise Stéphane Leyenberger, le maire de Saverne. Pour les chefs d’entreprises de ces territoires, se rendre dans la capitale dans la journée est très important.
Courrier de protestation
Les trois députés (Patrick Hetzel pour le Bas-Rhin, Fabien Di Filippo pour la Moselle, et Thibault Bazin pour la Meurthe-et-Moselle) ainsi que les trois maires (Stéphane Leyenberger à Saverne, Alain Marty à Sarrebourg et Catherine Paillard à Luneville) ont immédiatement envoyé un courrier au directeur de la SNCF pour protester contre cette décision, qui selon eux revient à "condamner à terme cet arrêt".
En amont de la mise en service de la deuxième phase de la LGV Est [ndlr : en 2007], les élus s’étaient démenés pour que le TGV s’arrête chez eux. Un combat qu’ils avaient également mené financièrement. "À l’époque, les régions traversées avaient payé une part plus importante que d’autres lignes à grande vitesse en France, se souvient le maire de Saverne. Et puis on avait aussi investi dans les gares ! On avait eu une dizaine de réunions, présidée par le préfet, et on avait obtenu l’engagement d’un arrêt dans nos villes", précise encore l’élu.
Le vice-président à la Région en charge des transports, Thibaud Philipps, ne cache pas son inquiétude : selon lui, ces engagements seraient valables jusqu’en 2027. Fin juillet, il a pu rencontrer la directrice du TGV Est. Celle-ci lui aurait apporté une double explication motivant ce changement d’horaire. "Ils disent [les responsables de la SNCF] qu’il faut atteindre un taux de 80% de remplissage pour qu’une ligne soit rentable, et qu’ils veulent récupérer des rames pour renforcer la desserte Strasbourg-Paris."
Un nouvel opérateur d'ici 2030 ?
Pour les endroits concernés, l’enjeu est crucial. "C’est très important pour l’équilibre des territoires, et je l’ai fait valoir auprès de la SNCF, explique Thibaud Philipps. Nous [ndlr : la Région] on fait du TER pour la desserte fine mais c’est très important la desserte de ces villes avec Paris. Je pense que la SNCF muscle son offre (en récupérant la rame, à terme, en période de forte affluence) pour anticiper l’arrivée de la concurrence. L’opérateur Kevin Speed a en effet annoncé son intention d’ouvrir une ligne Strasbourg-Paris entre 2028 et 2030."
Les discussions ne sont pas terminées. Thibaud Philipps et Franck Leroy (qui a également envoyé un courrier de protestation) ont prévu de remettre le dossier sur le tapis en septembre en sollicitant le patron de SNCF Voyageurs. Les députés et maires co-signataires se disent quant à eux "unis et mobilisés" car il s’agit pour eux d’une "question vitale pour l’attractivité de nos territoires".
Les maires (mais pas les députés selon nos interlocuteurs) ont reçu une réponse de la SNCF leur proposant une entrevue. "C’est nous tous ou personne !" prévient Stéphane Leyenberger, plus déterminé que jamais. "Il y a 10 ans, avec le maire de Sarrebourg, on avait dit qu’on s’allongerait sur les voies avec nos écharpes si on n’était pas entendus. On n’a pas eu à le faire, j’espère qu’on n’aura pas à le faire cette fois-ci."