Après la vague d'accusations d'agressions sexuelles à l'encontre de l'Abbé Pierre, de nombreuses villes se demandent que faire des lieux qui portent son nom. À Nantes, Lyon ou Nancy, la décision est effective. En Alsace, Scherwiller vient de passer à l'acte. Ostwald s'interroge.
En deux coups de clé à molette, l'opération est terminée. Le maire de Scherwiller est venu lui-même, ce lundi 28 octobre, armé de sa boîte à outils, pour déboulonner le panneau de la place Abbé Pierre, située entre le chemin de fer et les locaux d'Emmaüs. La place reprend son ancienne dénomination, celle bien moins connotée de "place de la gare" qu'elle avait toujours gardée accolée à celle de l'homme d'église accusé de dizaines d'agressions sexuelles depuis l'été 2024.
La municipalité de Scherwiller a pris la décision de débaptiser la place en conseil municipal la semaine dernière. "Au-delà de l'œuvre de l'Abbé, il y a quand même des accusations graves qui ont été produites et aujourd'hui en termes d'images, tant pour la communauté Emmaüs, que la commune de Scherwiller, il a été décidé de revenir à la situation historique de "place de la gare" sans plus faire référence à l'Abbé et à l'histoire qui lui est désormais liée", justifie le maire Olivier Sohler.
Le premier édile explique que le changement de nom avait été envisagé dès les premières révélations, mais que les élus voulaient "faire les choses de manière concertée. Nous nous sommes demandé pourquoi il s'était écoulé 17 années pour que ce scandale soit révélé, et si toutes ces accusations et ces interrogations étaient véridiques. Aujourd'hui, on sait que ces choses étaient connues en haut lieu et il n'y a plus lieu de discuter", explique le maire Olivier Sohler.
Pourtant, parmi les administrés, ça discute. Les avis s'opposent même. Si cette habitante approuve la décision de supprimer la référence à l'Abbé Pierre parce "qu'il faut savoir raison retrouver et que les choses s'apaisent", cette autre trouve ça "aberrant", qu'il "faut laisser comme c'est. C'est une histoire qui date et il faut aussi penser aux bonnes choses qu'il a faites". Avant d'ajouter que selon elle, "la vie privée des autres ne regarde personne."
"Pas sa place dans le village"
La communauté Emmaüs de Scherwiller n'a pas souhaité apporter de commentaire à ce changement. C'est derrière eux, ont-ils lâché en substance à notre équipe sur place. Sûrement éprouvés par les révélations qui s'accumulent depuis des semaines et les sollicitations qui s'ensuivent. Ils ont envie "d'aller de l'avant". Et de parler d'autre chose, on imagine.
Un autre habitant nous dit encore son adhésion à la décision municipale. "Moi je pense qu'une place à son nom n'a pas sa place dans un village. Et que d'autres communes devraient faire la même chose." La question concernerait justement 150 communes françaises, à en croire un décompte réalisé par l'AFP et relayé par nos confrères de France 24. Toujours en Alsace, la ville d'Ostwald s'interroge. Le changement est "dans les tuyaux" mais la municipalité souhaite consulter les habitants de la rue avant de prendre une quelconque décision, en raison des soucis administratifs que comporte un tel changement.
En attendant, le panneau de la rue Abbé-Pierre d'Ostwald semble avoir pris les devants. Complètement de guingois à cause des travaux actuels, il semble proche de la chute.