Le 12 septembre 2019, Mickaël Kohl, 29 ans, était retrouvé mort dans l'appartement de sa petite amie à Haguenau. Un an plus tard, sa sœur, Johanna, raconte la descente aux enfers de ce petit frère parti trop tôt, addict aux drogues dures, dans un livre coup de poing. Rencontre.
Au téléphone, en ce dimanche 11 octobre, Johanna Kohl prend le temps de se livrer et de raconter la vie de son petit frère. D’une voix limpide, sans trémolos. Chacun de ses mots ou presque, distribue un uppercut pour être bien certaine de faire passer son message : "Mickaël ne doit pas être parti pour rien".
Habitante de Steinbourg (Bas-Rhin), la jeune femme a publié le 16 septembre dernier, un livre intitulé "Loin du noir je cherche la lumière, loin du noir vers un nouvel horizon". Elle y raconte la descente aux enfers de ce beau brun aux yeux bleus, décédé le 12 septembre 2019. Retrouvé pendu dans l’appartement de sa petite amie. Une fin tragique, après des années de souffrance et d’addictions.
"Dans le livre, c’est lui qui parle. Il évoque son combat, son calvaire, et le nôtre, par la même occasion. On le suit de sa première cigarette au premier joint, jusqu’aux drogues dures", confie-t-elle.
167 pages de la vie ordinaire d’un jeune homme ordinaire, qui a vécu une descente aux enfers, "malheureusement ordinaire". Johanna en est convaincue, "cela peut arriver à n’importe qui, dans n’importe quelle famille". "Mon frère ne manquait de rien, il avait tout, il était choyé. C'est le fait de ne pas savoir dire non qui a provoqué sa chute. Il suffit d’une fois et on est dedans. Les dealers profitent aussi de la naïveté des enfants. Pour lui, tout commence à partir du moment où les premiers joints arrivent, vers 11 ans. Pour faire comme les autres. Il voulait faire le bonhomme, comme les copains", raconte-t-elle encore.
A 24 ans, il avait les poumons d’un homme de 85 ans
Après des études à La Walk, un placement en foyer à Strasbourg, parce qu’il était devenu un "petit caïd", un quotidien d’errance, c’est en 2015 que Johanna et ses parents prennent conscience de l’état de Mickaël. Le jeune homme est hospitalisé dans le coma suite à une overdose.
"A l’hôpital de Haguenau, je suis tombée sur les fesses. On avait rien vu. Jamais on n’aurait pensé qu’il se droguait. Ils ont retrouvé 10 drogues dures différentes dans ses analyses. Lorsqu’il a été transféré à Strasbourg, on nous a carrément dit qu’il ne passerait pas la nuit. Et puis finalement, il s’en est sorti par miracle mais extrêmement fragilisé. A 24 ans, il avait les poumons d’un homme de 85ans. Je suis certaine que s’il avait su les ravages que tout cela peut donner, s’il avait su la vie qu’il allait avoir en commençant à se droguer, il n’aurait même pas essayé".
S’ensuit alors une tentative de reconstruction, aidé par un addictologue, entouré par les proches. "On était derrière lui tous les jours, mais au bout d’un moment on est impuissants. On le voit se détruire et on ne peut rien faire. L’addiction, c’est un suicide à petit feu".
Pourtant, les efforts de chacun étaient sur le point de porter leurs fruits. Au moment de sa disparition, Mickaël avait décidé de suivre une cure de désintoxication. Il n’en a pas eu le temps.
"Autour de lui, il y avait la drogue, mais il y avait aussi les mauvaises fréquentations qui vont avec". Sont-elles en lien avec sa mort ? L’enquête privilégie la thèse du suicide mais la famille, qui a des doutes sur les circonstances du décès, a porté plainte pour suspicion d’homicide.
"Nous aujourd’hui on se retrouve devant une pierre tombale et il reste les regrets de ne pas avoir fait plus. De ne pas s’en être rendu compte avant. Il y a des signaux qui peuvent alerter".
Alerter le grand public, faire comprendre aux familles qu’il ne faut jamais baisser les bras face au fléau de l’addiction, c’est pour cela que Johanna prend la plume. A 33 ans, l’Alsacienne est en cours d’écriture d’un second livre, "Sans toi", qui "rentre dans le détail des drogues et de leurs conséquences". De son combat, naîtra également une association pour pouvoir mener des actions de sensibilisation dans les collèges.
Reste, en attendant, à trouver un éditeur pour son premier ouvrage uniquement disponible en ligne, pour l'instant.