Depuis le début du mois de février, une équipe du CNRS expérimente une méthode douce pour éloigner les corbeaux des habitations du quartier strasbourgeois de Cronenbourg. Pour cela, des haut-parleurs diffusent des bruits de femelles afin d'attirer les mâles.
Dans le quartier Cronenbourg, à l'ouest de Strasbourg, le problème des nuisances sonores des corbeaux n'est pas nouveau. Depuis février, une expérimentation est en place pour déplacer ces oiseaux qui gênent les habitants. Portée par Valérie Dufour, chercheuse du CNRS, et la ville de Strasbourg, la méthode douce est censée conjuguer bien-être des oiseaux et des riverains grâce à des haut-parleurs qui attirent les corbeaux dans une zone loin des habitations.
Jusqu'ici, pour faire fuir des oiseaux, la méthode privilégiée consistait à intervenir directement dans les nids : "C'est quelque chose de pas très éthique, et qui touche au bien-être des oiseaux", explique la chercheuse, spécialiste des corvidés (la famille des corbeaux).
L'expérimentation se fait sur près d'un kilomètre, route de Mittelhausbergen (voir carte ci-dessous): "Sur certaines portions, les arbres et donc les nids sont à quelques mètres seulement des balcons. Les gens se plaignent depuis de nombreuses années", explique Guillaume Libsig, élu référent du quartier Cronenbourg.
Le protocole se fait en deux étapes. D'abord, l'effarouchement : pendant quinze minutes, les haut-parleurs émettent des bruits de rapaces pour faire fuir les oiseaux. Puis, des bruits de femelles sont émis une centaine de mètres plus loin pendant une heure, de manière à attirer les corvidés. Ces bruits ont été enregistrés par des micros directionnels au mois de janvier : "On les déplace avec la guerre, et on les attire avec l'amour", résume avec humour Guillaume Libsig.
Les corbeaux ne s'installent que trois mois par an, au printemps. C'est pendant cette période que l'expérimentation a lieu : "Avec des caméras, nous comptons les oiseaux sur les arbres de la rue, avant et après l'effarouchement. Puis, nous faisons de même sur l'autre zone, avant et après l'attraction", détaillent Émeline et Louise, deux étudiantes en M2 qui travaillent sur le projet. Les premières données seront connues en avril.
"Nous n'avons aucune garantie de succès. Mais si on n'essaie pas, on ne saura jamais ce qui marche ou pas", ajoute Valérie Dufour. L'expérimentation durera jusqu'en mai, et sera renouvelée encore deux années. À Strasbourg, elle sera également testée dans le parc du Contades et le quartier de l'Elsau. Ailleurs en Alsace, l'équipe du CNRS a repéré d'autres sites à Sélestat et Mulhouse.